Un bouddhisme athée

existence

Assez d'accord avec toi lausm, d'ailleurs je ne considère pas que le bouddhisme doit être athée. Cela dit, je pense qu'à partir du moment où l'on réfléchit à la réalité, on aboutit à des conclusions, et mes conclusions sont athées et matérialistes, quand bien même je me sens proche affectivement du bouddhisme. Et donc se pose la question du développement théorique qu'on peut faire à partir de ces considérations, tout comme d'autres vont développer à partir de l'axiome que l'esprit est premier et générateur de la réalité.
lausm

En fait on en arrive au fait qu'il est utile, au stade de réflexion auquel tu te situes, d'explorer l'histoire de nos philosophies et modes de pensée, pour comprendre les conditionnements mentaux qui nous habitent, vu qu'on est abreuvé depuis tout petit de discours qui sont influencés par des façons d'appréhender le monde, de se le représenter, se le formuler.
klesha

Bonjour Lausm,
merci de tes interventions. Je reviens sur ce que tu dis à propos du fil sur la phénoménologie en réponse à Chakyam :
Si c'est en relation avec le sujet de l'athéisme bouddhique, en fait je ne vois pas vraiment le lien direct.
Si ce n'est que le Bouddha sous son arbre, n'a-t-il pas eu comme intention de justement cesser d'en avoir???.
Eh bien, justement... pas si sûr. La question de la phénoménologie et ce qui la sous-tend (chez certains), l'intentionalité, mérite qu'on s'y arrête, des kalpas s'il le faut, car elle est, souvent sans que nous ne le percevions, fondamentale dans notre pratique et peut modifier notre compréhension des enseignements donc de la ou des bases auxquels nous nous référons. D'ailleurs, si nous faisions une étude statistico-qualitative des sujets postés, nous constaterions qu'un grand nombre d'entre eux sont liés à ce "malaise confus" qui en résulte.
Par ailleurs, c'est une approche intéressante pour "comprendre" la différence entre l'esprit ordinaire et la nature de l'esprit. Car lorsque nous sommes dans la contemplation de l'esprit primordial, c'est tout sauf de l'intentionalité.
Je cite wikipedia :
...est intentionnel ce qui est « à propos de quelque chose », « contient quelque chose à titre d'objet », « a un objet immanent ». Les croyances sont un exemple typique d'états mentaux intentionnels. Elles sont nécessairement à propos de quelque chose. Certains philosophes, comme les phénoménologues, ont fait de l'intentionnalité une caractéristique centrale de la conscience, affirmation qui est controversée...

Sur le second point que tu développe :
explorer l'histoire de nos philosophies et modes de pensée, pour comprendre les conditionnements mentaux qui nous habitent
C'est effectivement très intéressant. Ça rejoint directement l'étude des aspects du mythe au sens de Mircea Eliade, entre autres. mais, tout aussi intéressant que cela puisse être, ça n'enlève rien à la souffrance parce que ce n'est une approche ni globale ni expérimentale. Le seul intérêt, peut-être, c'est que cela nous dirige doucement vers une voie comme le bouddhisme, par élimination.
chakyam

Lausm,

« Si c'est en relation avec le sujet de l'athéisme bouddhique, en fait je ne vois pas vraiment le lien direct. »

Vraisemblablement, tu ne m'as pas bien lu. Je précise à nouveau : Gautama Siddharta ne « prétendit pas avoir été inspiré par un dieu ou une puissance extérieure. Il attribua sa réalisation et tout ce qu'il acquit et accomplit au seul effort et à la seule intelligence humaine » - Walpola RAHULA – l'Enseignement du Bouddha -

J'ajoute :Il n'y a rien d'absolu, de contraint auquel nous ne pourrions échapper par nature. Bien au contraire le Bouddhisme athée – et j'ajoute vivant – nous permet d'échapper à ce que les êtres à détermination faible appellent le fatalité, la prédestination ou le karma.

Ce simple rappel pour confirmer que l'Athéisme consiste bien à nier l'existence d'un Dieu ou des Dieux et qu'en l'occurence, l'exercice de l'intelligence humaine est largement suffisant. Après çà, libre à chacun de croire que le cercle est carré...

Par ailleurs,

« ...le Bouddha sous son arbre, n'a-t-il pas eu comme intention de justement cesser d'en avoir???... »

 Confusion entre intention et intentionnalité. Encore faut-il essayer de définir concrêtement le terme. Je remarque la pauvreté de Wikipédia qui en l'espèce confond les deux termes et assigne à l'intentionnalité ce qui appartient à l'intention. En outre je suppose, indépendamment de la confusion, que les prêches du bouddha pendant 50 ans avaient bien une intention, celle de fournir les moyens d'éradiquer la souffrance NON ?

BRENTANO prétend qu'en dehors du « moi » nous n'atteignons que des phénomènes tandis que j'ai l'outrecuidence de définir l'intentionnalité comme : Disposition de l'Esprit à ouvrir un champ possible d'investigation qui va permettre alors la désignation d'un objet à étudier.

Cette disposition est a-historique, en deçà de l'espace-temps, à priori, non-phénoménale et par définition ne connaît pas le moi en tant qu'entité. N'est-ce pas ce que poursuit le bouddhisme, toutes écoles confondues, quant à l'identification des ravages de l'égo ?

Cela est tellement vrai que tu le reconnais toi-même au travers de cette conclusion : Le seul intérêt, peut-être, c'est que cela nous dirige doucement vers une voie comme le bouddhisme, par élimination.


FleurDeLotus Butterfly_tenryu
klesha

Voilà, je suis sur le bon sujet... Donc, tu t.adresses à lausm ou à moi ?
chakyam

Excuses ! emporté par mon élan, j'ai oublié de préciser.

Les deux, mes amis.

merci
lausm

Y a confusion des bonhommes!

En tous cas, je ne crois pas que le bouddhisme soit une voie par élimination, encore moins qu'on s'y dirige une fois qu'on y est tombé!!
ce qui me différencie de Klesha avec qui tu me confonds, Chakyam.

Je ne rentrerai pas dans le débat rhétorique entre intention et intentionnalité.

Certes le Bouddha a eu l'intention d'aider, encore s'est-il posé la question.
Mais là, je pense que se joue justement toute la différence de représentation du monde qu'il y entre nous occidentaux, et le monde asiatique. Et comme je n'ai pas l'argumentation intellectuelle pour justifier cela, qui nécessiterait des études poussées de philo, et que je ne me risquerais pas à user de concepts comme cela se fait ici de peur de les écorner, je le dis simplement parce que c'est ce que je ressens fortement : une incompréhension de fond, culturelle.
Oui, il a eu l'intention d'enseigner pour aider.
Mais il l'a fait, à mon avis, justement à partir de cette expérience où il s'est arrèté complètetement.
Cette expérience où, en s'arrètant, on prend conscience de ces mouvements, ces volitions qui nous animent, qui, quand on les suit, nous restent inconscientes.
C'est tout l'art asiatique de la non pensée, tout l'art aussi des arts martiaux et autres, que d'apprendre à percevoir que justement l'intention précède cérébralement la conscience de l'acte. Que la plupart du temps on fabrique une intention mentale pour justifier une intention purement motrice, archaïque, animale, inconsciente, qui la précédait et dont on n'a même pas conscience, noyé dans nos propres mouvements pour se les cacher.
Donc s'il a eu intention, il l'a fait à partir de cette cessation de tout, où il a vu dans le mouvement de la vague l'essence insaisissable qui fait qu'elle est ce qu'elle est. Qui n'est pas justifiable.
Après, que cela soit athée ou pas, n'a jamais été sa question. En fait il s'en fout, et ce n'est pas un problème, car à mon sens, le bouddhisme n'est pas athée pas plus que théiste : penser ainsi est encore une forme de dualisme. Si Bouddha niait Dieu, il nierait la plus grande création de l'homme pour justifier la gratuité de son existence! Mais s'il le confirmait en tant que croyance, il nierait la capacité humaine à voir le réel sans justification ni cause aucune, à juste voir parce qu'on peut voir, sans avoir des yeux derrière les yeux.
Je pense que Dieu, ou tout autre façon de le dire, a une fonction : rendre à l'homme sa relativité, lui éviter de s'y croire.
En ce sens, le bouddhisme ne tranche pas la question, pour cela que je ne pense pas qu'il soit athée ou pas, ni même que qualifier le bouddhisme n'ait d'autre valeur que de désigner des particularités relatives à certaines façons de le pratiquer.

De toutes façons, pour moi le bouddhisme n'existe pas en soi, il n'existe que si l'on le pratique.
Le reste c'est des mots.
klesha

En tous cas, je ne crois pas que le bouddhisme soit une voie par élimination, encore moins qu'on s'y dirige une fois qu'on y est tombé!!
ce qui me différencie de Klesha avec qui tu me confonds, Chakyam.
Ce n'est pas ce que j'ai écrit. J'ai dit :
Sur le second point que tu développe :

explorer l'histoire de nos philosophies et modes de pensée, pour comprendre les conditionnements mentaux qui nous habitent


C'est effectivement très intéressant. Ça rejoint directement l'étude des aspects du mythe au sens de Mircea Eliade, entre autres. mais, tout aussi intéressant que cela puisse être, ça n'enlève rien à la souffrance parce que ce n'est une approche ni globale ni expérimentale. Le seul intérêt, peut-être, c'est que cela nous dirige doucement vers une voie comme le bouddhisme, par élimination.
Donc, il ne s'agit pas de la "voie bouddhiste", ça peut éventuellement y mener. A force de constater que telle et tell méthode ne marche pas, donc par élimination, il se peut que l'on en vienne au bouddhisme. C'est simplement une éventualité.
Sinon, pour ça :
Oui, il a eu l'intention d'enseigner pour aider.
Mais il l'a fait, à mon avis, justement à partir de cette expérience où il s'est arrèté complètetement.
C'est bien vu. Je le dit autrement mais c'est juste car un Bouddha ne peut pas être dans l'intentionnalité.
chakyam

La vigilance, l'attention, la détermination bouddhique consiste notamment à ne pas « déifier, réifier, figer, fixer » la Nature de Bouddha, le Dharma, le Bouddha lui-même.

Or qu'est-ce faire que dire ? : un Bouddha ne peut pas être dans l'intentionnalité.

Et pourquoi donc ? Ne serait-il donc pas un homme mais un être extra-ordinaire ? Et même dans ce cas … Serait-il l'expression idéalisée d'une crainte, d'un espoir qu'il faudrait préserver à tous prix ?

Soyons tout à fait clair. Le Bouddha est un homme, rien qu'un homme mais tout un homme. Il n'est pas un prophète, ni un envoyé d'un dieu hypothétique, ni encore moins fils de …

… mais il a réalisé en lui-même et par lui-même son entière Humanité qui nous paraît « extra-ordinaire » au point d'aller chercher une ou des origines fabuleuses avec une naissance fantastique.

A ce titre, comme l'ensemble des êtres sensibles/humains /Bouddhas et de la même manière qu'il n'est pas extérieur à l'Univers – car alors où serait-il ? - il est soumis à l'intentionnalité et en tant qu'omniscient la connaît parfaitement sans pour autant la subir.


FleurDeLotus Butterfly_tenryu
klesha

Ça c'est ton approche Chakyam. Elle est intéressante mais je n'ai pas la même.
Personnellement, je ne cherche pas à changer les enseignements de la tradition à laquelle je suis rattaché car ils me conviennent. J'ai longtemps cherché une voie mais maintenant, j'ai trouvé et je pratique.
D'abord, sans être un surhomme, un bouddha n'est plus un être humain ordinaire dans la mesure où il échappe au samsara, au cycle des renaissances.
Pourquoi ? Parce qu'il n'y a plus de karma. Pourquoi n'y a-t-il plus de karma ? Parce qu'il n'y a plus de volition... Alors, peux-tu m'expliquer où trouver l'intentionnalité quand il n'y a plus de volition ?
D'après les enseignements, l'esprit d'un bouddha est dans dans la contemplation de l'état primordial. Il n'est plus dans la dualité et la pensée discursive mais dans la sagesse.
La vigilance, l'attention, la détermination bouddhique consiste notamment à ne pas « déifier, réifier, figer, fixer » la Nature de Bouddha, le Dharma, le Bouddha lui-même.
Si nous parlions de yoga, et de la réintégration de l'homme dans l'univers, de sa fusion avec le divin, je comprendrais. Mais il s'agit de bouddhisme et d'état naturel. D'ignorance et de sagesse ou non-ignirance.
… Serait-il l'expression idéalisée d'une crainte, d'un espoir qu'il faudrait préserver à tous prix ?

Soyons tout à fait clair. Le Bouddha est un homme, rien qu'un homme mais tout un homme. Il n'est pas un prophète, ni un envoyé d'un dieu hypothétique, ni encore moins fils de …

… mais il a réalisé en lui-même et par lui-même son entière Humanité qui nous paraît « extra-ordinaire » au point d'aller chercher une ou des origines fabuleuses avec une naissance fantastique.
Je ne me souviens pas avoir abordé tout ça... Qui te parles de ça ? J'ai essayé de comprendre car ça a l'air de te tenir à coeur. Et effectivement, je comprends mieux... Je ne parle pas du Bouddha historique de notre ère mais de tous les bouddhas. Car lorsque tu parles du Bouddha, là c'est vrai que tu « déifies, réifies, figes, fixes » la Nature de Bouddha, le Dharma, le Bouddha lui-même. Mais, ça doit être un lapsus.
il est soumis à l'intentionnalité et en tant qu'omniscient la connaît parfaitement sans pour autant la subir.
Ça, c'est très, trsè fort Chakyam ! :mrgreen:
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