Flocon a écrit :kum a écrit : En gros, peut on entrer dans l'absolu avec sa connerie intacte.
A condition d'admettre que l'éveil puisse être décrit comme une "entrée dans l'absolu" (ce qui se discuterait), je crois que la réponse du bouddhisme à cette question est "oui". Encore que tout dépende de ce qu'on met derrière le mot "connerie", naturellement. Mais il y a les cas des arhats parvenus à cet état alors qu'ils étaient des monuments de stupidité, tant morale qu'intellectuelle : le plus connu est peut-être Cudapanthaka, très révéré dans le Chan, mais il y aurait d'autres exemples. On peut interpréter diversement leurs histoires, mais il me semble qu'il y a bien derrière une mise en garde sur la confusion entre éveil et ce qu'on appellerait aujourd'hui "développement personnel".
- Pas besoin d'être intello pour s'éveiller. Pas besoin de jongler avec des notions très complexes. L'intellectualisation est une voie comme une autre. Elle est empruntée par ceux qui s'y sentent à l'aise je suppose. On est bien d'accord ?
- Pas besoin non plus d'être prof de Yoga. De réussir à mettre le pied derrière la tête. Ou de faire le lotus ou le demi lotus parfaitement.
On peut s'asseoir sur une chaise pour méditer.
- Pas besoin d'être érudit, ni de connaître l'histoire du bouddhisme sur le bout des doigts.
- Pas besoin d'avoir eu une vie exemplaire. On peut être un ancien drogué, ou bien sortir de prison, ou bien être alcoolique. On peut être con. Dans les limites du raisonnable quand même...
Mais tout ça, c'est au départ !!! Parce que, une fois sur la Voie, on change, imperceptiblement peut être, mais inéluctablement.
On ne rentre pas dans les jhanas avec des émotions négatives. Avec des doutes, de l'arrogance, de l'inquiétude, de la colère, des peurs, ou des attentes. On y entre sans affaires, qu'on soit jeune ou vieux.
Je ne crois pas à l'éveil subit qui frapperait sans prévenir, en pleine crise de délire egotique.
En revanche, on peut sans doute se réveiller un matin, dans un club echangiste, au milieu d'une mare de corps nus et repus, et avoir une fenêtre qui s'entrouve sur un doute existentiel profond. Une vision implacable de dukkha.
C'est ce qui est arrivé à Siddharta Gautama. Après une nuit de plaisir. Il a brusquement pris conscience du vide abyssal de la vie qu'il menait.
Celui qui s'éveille, apparemment brutalement, comme ces histoires Zen, sans parcours particulier, doit tout simplement avoir de bonnes empreintes karmiques et plusieurs vies de pratique intensive derrière lui. Je ne vois pas d'autres explications.