Le suicide comme une réponse à la souffrance ? (M. Attwood)

Dhammadanam

ted a écrit : On dirait que tu essaies de présenter la vision "canonique" comme une sorte de dogme. :On sait que les suttas décrivent, bien souvent, des réponses personnalisées faites par le Bouddha aux personnes à qui il s'adressait, en tenant compte de leur situation, de leur parcours, etc... A untel, il conseillera de prendre la robe de moine, en lui disant qu'il n'y a rien de mieux que la vie sainte. Mais à tel autre, il rappellera ses responsabilités de fils de famille et l'enverra prendre soin des siens.
J'amorce ce sujet en lien avec les sutta du Tipitaka d'ou la "vision canonique" (et ne souhaitant pas aborder dans cette section une analyse basée uniquement sur le vécu). Je ne cherche pas à imposer quelque vues ni de dogme, qu'elle soit mahayaniste, theravadine, orthodoxe ou moderne. Faut il rappeler que le texte et l'analyse n'est pas de moi, je ne fais qu'argumenter dans le sens de ma compréhension. Je partage tout à fait ton analyse des suttas, cela en fait sa richesse.

Je vais essayer de trouver des sources contradictoire, il me semblait avoir lu une analyse allant dans le sens contraire de celle proposé ici.

ted a écrit : Mais de là à parler de "suicide", le terme me semble impropre.
Pour moi il s'agit bien de suicide (les cas relatent de d'Arahants qui se tranchent la gorge avec un couteau)

Suicide (du latin suicidium, des mots sui : « soi » et caedere « tuer ») est l’acte délibéré de mettre fin à sa propre vie

Le suicide n'est pas systématiquement un acte de dégout, de désespoir. Il est décrit à priori (dans un contexte précis) comme un acte sage.
ted

Dhammadanam a écrit :J'amorce ce sujet en lien avec les sutta du Tipitaka d'ou la "vision canonique". Je ne cherche pas à imposer quelque vues ni de dogme. Faut il rappeler que le texte et l'analyse n'est pas de moi, je ne fais qu'argumenter dans le sens de ma compréhension; je partage tout à fait ton analyse des suttas.
Oui, oui... j'entends bien... jap_8
Dhammadanam a écrit :
ted a écrit : Mais de là à parler de "suicide", le terme me semble impropre.
Pour moi il s'agit bien de suicide (les cas relatent de d'Arahants qui se tranchent la gorge avec un couteau)
Suicide (du latin suicidium, des mots sui : « soi » et caedere « tuer ») est l’acte délibéré de mettre fin à sa propre vie
Mais les projections qu'un lecteur lambda associe au terme "suicide" ne collent pas avec l'acte de cet arahant particulier.
D'ailleurs, en 2500 ans, yen a pas eu des masses qui ont fait ça, apparemment. :)
De plus, à un tel niveau de maîtrise yogique, l'usage d'un couteau me semble totalement inutile si on souhaite se donner la mort.
Ce qui me ferait plutôt pencher vers l'avis de Lausm.
Reste à vérifier la cohérence de ce sutta avec l'ensemble du tipitaka. :) Parfois, on trouve de drôles de choses. :)
ted

Dhammadanam a écrit :Le cas de Godhika

Le bhikkhu Godhika est un méditant enthousiaste. Il réalise la «libération temporaire de l'esprit», ou l'un ou l'autre des États "superconscients" plus élevés, mais ne parvient pas toujours à obtenir la libération définitive parce qu'il est en proie à la maladie. Après six échecs, il se retrouve une fois de plus dans un état ​​de libération temporaire et prends couteau afin de se trancher la gorge. Son raisonnement est le suivant: s'il meurt dans un état ​​de conscience ordinaire sa renaissance est incertaine, mais s'il meurt alors dans un état ​​suprême-il renaîtra dans le domaine de Brahma.
En même temps, ça recoupe les enseignements tibétains qui disent que la dernière pensée, le dernier état de conscience, est capital, et conditionne la renaissance suivante.

De là à conclure que de grands méditants vont essayer de choisir les circonstances de leur mort afin de pouvoir maîtriser le processus, il n'y a qu'un pas... que je ne franchirai pas... à cause... du couteau... :D
Si on maîtrise les "états superconscients" comme il est dit dans le texte, à priori, mourir est une simple affaire de dissolution volontaire de certaines énergies.
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Mais que faites vous de Khamma, le suicide n'entraine-t-il pas l'inéluctable Khamma ?
avec metta
gigi
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Versets sur les paires d’opposés
Yamaka-vagga
(extrait)


Tous les phénomènes qui se manifestent à nous
Naissent dans notre coeur et dans notre esprit ;
Ils sont dirigés par le coeur et l'esprit,
Ils sont fabriqués par le coeur et l'esprit.
Si nous parlons ou agissons
Avec un coeur et un esprit obscurcis
La souffrance s'ensuivra
Aussi sûrement que la roue du chariot
Suit la trace des sabots du boeuf qui le tire.


Tous les phénomènes qui se manifestent à nous
Naissent dans notre coeur et dans notre esprit ;
Ils sont dirigés par le coeur et l'esprit,
Ils sont fabriqués par le coeur et l'esprit.
Si nous parlons ou agissons
Avec un coeur et un esprit paisibles et lumineux,
Le bonheur s'ensuivra
Aussi sûrement que notre ombre
Qui jamais ne nous quitte.

Code : Tout sélectionner

Son raisonnement est le suivant: s'il meurt dans un état ​​de conscience ordinaire sa renaissance est incertaine, mais s'il meurt alors dans un état ​​suprême-il renaîtra dans le domaine de Brahma.
gigi dit:
Le raisonnement n'est qu'un phénomène de l'esprit, et si il y a véritablement détachement au corps alors il ne pose plus un problème, car un Éveillé sait très bien que le temps qui lui reste n'est que relatif et de bien peu d'importance face à l'Infinité qu'il a commencer à goûter
le suicide ne peut être qu'un acte, soit de sacrifice en acceptant ce qui va découler des effets du Khamma ou un acte de désespoir qui découle d'un déséquilibre du mental, donc de la souffrance, cela peut indiquer une approche erronée de la méditation, l'interprétation des suttas est très délicate, l'important est l'expérimentation équilibrée de la méditation, la Voix des Bouddhas est la Voix de l'équilibre, la Voix du Saint Dhamma
avec metta
gigi
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ted

cgigi2 a écrit :Le raisonnement n'est qu'un phénomène de l'esprit, et si il y a véritablement détachement au corps alors il ne pose plus un problème, car un Éveillé sait très bien que le temps qui lui reste n'est que relatif et de bien peu d'importance face à l'Infinité qu'il a commencer à goûter

le suicide ne peut être qu'un acte, soit de sacrifice en acceptant ce qui va découler des effets du Khamma ou un acte de désespoir qui découle d'un déséquilibre du mental, donc de la souffrance, cela peut indiquer une approche erronée de la méditation
Plutôt d'accord avec ça...
cgigi2 a écrit :]l'interprétation des suttas est très délicate, l'important est l'expérimentation équilibrée de la méditation
Oui. Je comprends tout à fait le souci de Dhammadanam qui veut rester objectif en faisant une présentation objective des textes, sur une base dite "canonique", sans y mêler d'opinions personnelles. Mais est-ce que l'interprétation d'un sutta peut se passer du ressenti personnel du lecteur ? Car c'est à la lueur de sa propre pratique qu'il va déterminer si ce sutta est vraiment canonique ou pas. C'est la recommandation principale du sutta aux Kalamas.
ted

Dhammadanam a écrit :Mais là n'est pas le sujet de ce post; il est question de savoir si le suicide (dans un contexte précis et selon les sutta du Canon Pali) est kusala/akusala etc ... :D
Bon. j'ai relu toute la file et, du coup, je trouve mes réponses un peu légères, car il s'agit apparemment d'un travail de recherche en profondeur.

Du coup, je me sens plutôt proche de la réponse de Thanatos, qui me semble le mieux correspondre à mon ressenti :
Thanatos a écrit :En fait, dans le bouddhisme, le suicide n'est toléré que dans le cas de méditants très avancés ayant atteint au minimum l'état de "entré dans le courant" voir même seulement celui de "une fois retournant" car ils ont déjà éliminés une très grosse partie d'ignorance et leur geste est motive par le détachement au corps.

Cependant, dans toute autre circonstance et pour la très grande majorite du monde, le suicide est motivé par l'aversion pour la souffrance, l'illusion, le désespoir et le désir des sensations agréables, soit de très mauvaises raisons qui sont sources dencore plus de souffrance. Il existe d'ailleurs une histoire à propose d'un moine qui souffrait tellement qu'il voulait se suicider. Mais il décida finalement de méditer sur la souffrance et attint l'éveil comme ça. Bref, a part quelques cas particuliers d'arhants, le suicide apparait en contradiction avec l'éthique bouddhiste.
N'oublions pas que l'Arahant est quasiment l'équivalent des saints chrétiens ! C'est une personne d'une pureté extraordinaire qui, de toute façon, ne renaitra plus jamais dans le samsara. On ne parle pas du premier venu là.

Dire que le suicide est toléré pour un Arahant n'a même pas de sens; C'est l'Arahant qui tolère notre existence. :)
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Flocon
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Je suis d'accord. Dans une perspective bouddhiste, même selon le Zen (du moins pour ce que j'en connais) on ne peut pas comparer l'acte d'un Arhat et l'acte d'un pratiquant ordinaire.
Dans le Chan, il y a des exemples assez nombreux de suicides ou d'auto-mutilations qui sont considérés comme positifs de la part de maîtres, ou de pratiquants reconnus comme très avancés, souvent en relation avec le Sutra du Lotus, où l'on voit des Bodhisattvas détruire des parties de leur corps, ou leur corps entier, pour accéder à des Terres Pures. Sans entrer dans le détail de l'histoire du bouddhisme chinois, à l'époque moderne, il existe un cas fameux, celui de Xu Yun : il s'était coupé un doigt, et c'est un acte qui est interprété comme acte de Bodhisattva : une pratique de la perfection du don.
Cela ne veut dire en aucun cas que les pratiquants de son école, encore très nombreux, sont encouragés à se mutiler : Xu Yun est un modèle en tant que maître, mais il n'est pas considéré comme imitable sur ce point.
Quand on sonde les choses, les connaissances s'approfondissent.
Les connaissances s'approfondissant, les désirs se purifient.
Les désirs une fois purifiés, le cœur se rectifie.
Le cœur étant rectifié, on peut réformer sa personne.

Kong Tseu
Jean

Dans les histoires des vies précédentes de Bouddha, il y a la fois où il a donné son corps à manger à une tigresse pour qu'elle puisse nourrir ses petits.
Katly

Vu comme ça, no problem, ça peut se comprendre. jap_8
Une faculté de voir sa propre mort sacrificielle comme un bien, n'en ressentir aucune souffrance, sans que cela laisse de la souffrance, no problem, aussi. jap_8
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