Comment développer la bodhichitta ?

longchen2

Développer la bodhichitta dans le bouddhisme, qu’est-ce que cela veut dire ?

Est-ce réciter la prière de la bodhicitta (j’en ai une de mon côté mais elle ne me parle pas tant que cela, il faudrait peut être que je me procure un commentaire de cette prière s’il existe).

Est-ce que la bodhicitta c’est un peu ce que font les chrétiens lorsqu’il disent de s’aimer les uns les autres et même d’aimer autrui plus que soi-même ?

Est-ce que cela suppose des actions à faire, certaines pensées à cultiver ?
Mais il y a le détachement aussi, le non agir, alors comment faire ?
FleurDeLotus
boudiiii !

vaste question dont je connais toujours pas la réponse après quelques années de pratiques déjà .
Si quelqu'un pouvait éclairer ma lanterne , ça serait mon bodhisattva :cool:
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Flocon
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Développer la Bodhicitta, c'est développer l'aspiration à devenir Bouddha pour le bien des êtres, si j'ai bien compris.

Le Chan/Zen y attache beaucoup d'importance, souvent exprimée par la formule sur la nécessité d'entretenir une "détermination inébranlable" à atteindre l'éveil : selon cette école, il faut donc cultiver avant tout la fermeté dans la démarche spirituelle, combattre le doute et le découragement : d'où les images guerrières parfois employées. En matière d'action, il y a des formules de souhait spécifiques, que l'on répète avant la méditation (je crois qu'elles existent dans toutes les écoles), et dans la branche que je fréquente, on insiste beaucoup sur la vertu de la persévérance et de la réitération quotidienne des actes. On reprend la pratique chaque jour, sans interruption et sans faiblesse. Dût-on en mourir, on ne relâche pas l'effort (il y a des pages de Dôgen remarquables à ce sujet).

Je ne pense pas qu'il s'agisse de la même chose que l'amour dans le christianisme, quoiqu'on puisse peut-être faire un rapprochement dans la mesure où par l'imitation du Christ, qui a aimé les hommes plus que lui-même puisqu'il a donné sa vie pour les racheter et les sauver, le Chrétien tend à la divinisation. Il s'agit dans les deux cas d'un processus de transformation. Mais ce n'est pas forcément le même processus.

Désolée si j'écris des sottises, c'est ce que je crois comprendre. Il existe des commentaires sur la conception tibétaine de la Bodhicitta, par exemple celui du Dalaï Lama aux pages 239-255 (édition de poche) de La grande paix de l'esprit. C'est un texte excellent, simple et clair. Mais Jean et Dharmadhatu sauront certainement t'en indiquer d'autres.
Quand on sonde les choses, les connaissances s'approfondissent.
Les connaissances s'approfondissant, les désirs se purifient.
Les désirs une fois purifiés, le cœur se rectifie.
Le cœur étant rectifié, on peut réformer sa personne.

Kong Tseu
Sourire

longchen2 a écrit :Est-ce que la bodhicitta c’est un peu ce que font les chrétiens lorsqu’il disent de s’aimer les uns les autres et même d’aimer autrui plus que soi-même ?
Flocon a écrit :Développer la Bodhicitta, c'est développer l'aspiration à devenir Bouddha pour le bien des êtres, si j'ai bien compris.
anjalimetta jap_8 anjalimetta
ted

longchen2 a écrit :Est-ce que la bodhicitta c’est un peu ce que font les chrétiens lorsqu’il disent de s’aimer les uns les autres et même d’aimer autrui plus que soi-même ?
Ayant reçu une éducation chrétienne assez costaud, je précise que la formule consacrée est : "Tu aimeras ton prochain comme toi-même".
Jamais entendu parler d'un commandement qui demanderait d'aimer son prochain plus que soi-même.

Même si certains Saints ont eu des comportements qui pourraient le laisser penser.

Le commandement suivant étant : "Tu aimeras le seigneur ton Dieu de tout ton coeur, de toute ton âme et de tout ton esprit"

Ces deux commandements sont la base du nouveau testament.
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Boubou
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Chögyal Namkhai Norbu - Enseignements Dzogchen

La bodhichitta dans le dzogchen

Dans de nombreux livres originaux du dzogchen, dans les lung, ou mantras raccourcis, ou parfois dans les mantras eux-mêmes, il n'est pas fait mention du mot « dzogchen ». C'est le terme changchubsem, « bodhichitta », qui est toujours utilisé. La bodhichitta du dzogchen est traduite par « état primordial ». Si on regarde attentivement le sens de changchubsem, chang signifie « purifier », mais dans l’enseignement dzogchen notre nature véritable est pure depuis le début ; rien n’est a purifier, puisque déjà pur. Chub signifie que tout est parfait depuis le début, il n’y a pas de voie sur laquelle progresser, ni rien à développer. Cette qualité de posséder un état pur ou parfait est dans notre nature véritable de l'esprit. Ceci est la bodhichitta ou changchubsem. Dans son sens véritable changchubsem veut dire la même chose que dzogchen. Dzog signifie « parfait en regard de toutes nos qualités » et ainsi de suite, et chen signifie « totalement », « l'etat totalement parfait ». Ainsi, que nous disions dzogchen ou changchubsem ne fait pas de différence. Dans ce contexte il ne faut pas comprendre « bodhichitta » comme faisant référence à la « bodhichitta relative ». Dans les tantras et lung du dzogchen semde on utilise le terme « bodhichitta » des centaines de fois, et dans ce contexte référence est toujours faite a l’état primordial, notre nature véritable.
boudiiii !

Merci Boubou pour ce texte ! Mille fois merci !! Tu m'as enlevé enfin un doute sur ce que je prés(s)entais depuis longtemps .

A savoir : Bodhicitta =Energie primordiale= Dzogchen (ou Rigpa (rajout perso par rapport au texte original) )

Le reste , c'est des pissenlits à côté :mrgreen: <<metta>> <<metta>> <<metta>> <<metta>> <<metta>> <<metta>> <<metta>> <<metta>> <<metta>> <<metta>> <<metta>> <<metta>> <<metta>> <<metta>> <<metta>>
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Boubou
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De rien Boudiiii

Et voici l'approche habituelle (toujours de Chögyal Namkhai Norbu - Enseignements Dzogchen)

La bodhichitta dans les soutras

L’utilisation du terme « bodhichitta » selon le principe des soutras et celui du dzogchen n'est pas la même. Dans les soutras nous considérons deux sortes de bodhichitta : l'absolue et la relative. La « bodhichitta absolue » est la réalisation de shunyata, ou vacuité, et la possession de ce savoir, alors que la « bodhichitta relative » est le fait de cultiver la compassion. Dans ce cas, la bodhichitta absolue telle qu'utilisée dans le système des soutras est très proche de la bodhichitta telle qu'on la comprend dans le dzogchen. Il y a deux catégories de bodhichitta relative. La première est l’intention de faire quelque chose de bien afin d’obtenir la réalisation. La seconde est l’application effective de l’engagement dans l'action. Ce sont généralement les deux définitions les plus connues de la bodhichitta dont on parle. On ne parle pas beaucoup de la bodhichitta absolue, considérée comme le but final de la réalisation. Nous avons besoin de ces deux bodhichittas relatives, en cultivant intention et application.
lausm

Alors, Boudii, tu connais la vérité ultime??? :mrgreen:

Allez, je vais être basique et vulgaire : wikipédia (mais l'article est bien, et les sources les plus simples sont parfois les meilleures):

Le bodhicitta ou esprit d'Éveil (bodhi : éveil ; citta : cœur-esprit) est l'aspiration et l'engagement à atteindre l'Éveil, ou bouddhéité, afin d'y amener tous les êtres sensibles, et ainsi les libérer de la souffrance inhérente (duhkha) à l'existence cyclique (samsāra). Celui qui engendre cette motivation et qui en fait les vœux formels (pranidhāna) est appelé bodhisattva, littéralement: être d'Éveil, souvent traduit par héros pour l'Éveil, en fonction des connotations de pure et claire énergie du suffixe -sattva1. Le bodhicitta et le bodhisattva, son corollaire, sont au coeur de la pensée bouddhiste, particulièrement dans le mahāyāna et le vajrayāna; à tel point qu'ils justifient l'appellation « bodhisattvayāna », véhicule du bodhisattva, souvent donné au mahāyāna.
L'actuel dalaï-lama en dit : « Cet esprit d’Éveil transforme toutes les actions bénéfiques en un véritable catalyseur permettant l’émergence de la bouddhéité. […] Dans l’océan des pratiques qui mènent à la bouddhéité, le bodhicitta agit comme un raz-de-marée2 ».



Au final, c'est comme ça que je l'ai ressenti au début de la pratique : on aspire à ne pas pratiquer que pour soi, donc aux voeux de bodhissatva, à manifester l'esprit d'éveil.
Donc : souhaiter sauver tous les ètres (dont soi-même!), surmonter les passions attachements, expérimenter tous les enseignements sous toutes formes (franchir toutes les portes du dharma), et au final, réaliser la Voie du Bouddha.
C'est en tous cas les quatre voeux du bodhisattva dans le zen, et qui doivent se trouver partout.

Au final, cela peut signifier que la Voie du Bodhisattva n'est pas séparée de la Voie du Bouddha (mais pour moi c'est un faux problème, il est évident que les deux sont une façon de dire la même voie).
Donc c'est toujours la question de la non dualité : l'esprit d'éveil (bodaishin-bodhicitta), est à la fois une aspiration, et/ou un engagement.
Mais dans une voie non graduelle comme le zen, on ne considère pas l'aspiration comme autre que manifestation du Bouddha en nous....pratique et réalisation ne sont pas séparées.
alors que d'autres disent les choses de façon graduelle.
Mais pour moi, l'aspiration n'est pas séparée du but....au final la réalisation rend inutile l'esprit d'éveil...mais alors il est remanifesté, pour tous les êtres : si on ne pratique plus pour soi, on pratique pour autrui, pour le monde.
En fait, pratiquer en revenant à soi, nous renvoie aux autres...on ne peut pratiquer pour soi-même seul....on ne peut quelque part pratiquer seulement pour soi, c'est un non sens dans la Voie...tout comme est un non sens de se croire séparé de l'éveil, sinon cela voudrait signifier que l'on ne peut s'affranchir de la souffrance.
L'esprit d'éveil, c'est comme allumer le feu sous la casserole : on sait cuisiner, on sait même cultiver ses légumes, on sait les servir, mais quoi que ce soit qu'on maitrise, et qu'on ait accompli, on devra toujours rallumer le feu pour cuire le plat, pour pouvoir le manger et le partager avec d'autres...sinon c'est pas très bon!
ted

longchen2 a écrit : Comment développer la bodhichitta ?
Est-ce réciter la prière de la bodhicitta (j’en ai une de mon côté mais elle ne me parle pas tant que cela, il faudrait peut être que je me procure un commentaire de cette prière s’il existe).
...
Est-ce que cela suppose des actions à faire, certaines pensées à cultiver ?
Mais il y a le détachement aussi, le non agir, alors comment faire ?
Excellente question qu'on finit par se poser un jour où l'autre...
Comment concilier ce but, clair et bien défini, qui est d'aider tous les êtres... avec cette nécessité d'ouverture, d'acceptation, de non-saisie de ce qui se présente ?
La réponse c'est sans doute d'agir sans rien attendre en retour ? Pas d'attente = pas d'attachement.

Mais dans ce cas, quel est le moteur de l'action ? Bé, c'est pas nous. L'action "juste" remonte des tréfonds. Elle est l'expression de la Bodhicitta Absolue.

Mais alors, l'action juste serait "bonne" par nature ? hé, hé.. philosophiquement intéressant. :)

Mais je ne pense pas que cela soit de la bonté. C'est plutôt une impulsion de "mise en harmonie". Or, cette harmonie ne peut s'épanouir sur les écueils de la souffrance. Cette souffrance omniprésente doit donc disparaître pour que le Calme et la Paix puisse régner entre tous les êtres.

Heu... :oops: C'est une hypothèse, hein ? :D
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