la prière

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Flocon
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Il existe une histoire bouddhiste très proche de cette "fleurette" (c'est le nom du recueil médiéval qui relate les "petits miracles" de François d'Assise, Les Fleurettes : joli, non? :D ). Elle est plus sévère que la fable chrétienne et ne relève sans doute pas de la prière à proprement parler :oops: , mais comme je l'aime bien... :)

La nonne bouddhiste (amidiste) Chiyo Ni était connue pour la grande pureté de son regard sur le monde et la beauté de sa poésie, à laquelle on attribuait des vertus de guérison quasi miraculeuses. Le gouverneur d'une province avait dans son jardin un cerisier qui lui était fort cher : l'arbre dépérissait et menaçait de mourir, aussi fit-on appel à la poétesse. Elle envoya en réponse le haiku suivant, qu'on suspendit aux branches.

Le printemps reviendra-
Toi, sans fleurs, on te débitera
En bois de chauffage.

Le cerisier comprit le message et se le tint pour dit : au printemps, sa floraison fut plus belle que jamais. :lol:
Quand on sonde les choses, les connaissances s'approfondissent.
Les connaissances s'approfondissant, les désirs se purifient.
Les désirs une fois purifiés, le cœur se rectifie.
Le cœur étant rectifié, on peut réformer sa personne.

Kong Tseu
ted

Flocon a écrit :Le cerisier comprit le message et se le tint pour dit : au printemps, sa floraison fut plus belle que jamais. :lol:
Et ça te fait rire, Flocon ba16
Serais-tu cruelle et sans pitié ! :D
loveeeee
Katly

Euh, moi aussi, ça m'a fait rigoler. :oops:
Belle histoire. jap_8

Pour ceux, celles qui n'auraient pas vu l'émission, disponible jusqu'au 24 novembre.

http://pluzz.francetv.fr/videos/matinee ... 28341.html
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jules
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ted a écrit :
Flocon a écrit :Le cerisier comprit le message et se le tint pour dit : au printemps, sa floraison fut plus belle que jamais. :lol:
Et ça te fait rire, Flocon ba16
Serais-tu cruelle et sans pitié ! :D
loveeeee
Le loup ne mange que ce qui est comestible. :cool: <<metta>>
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Flocon
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ted a écrit :Et ça te fait rire, Flocon ba16
Serais-tu cruelle et sans pitié ! :D
loveeeee
:lol: loveeeee

C'était un rire de plaisir, car l'histoire est vraiment merveilleuse dans sa simplicité. Le haïkaï décrit ce qui est, vu au plus près et dépouillé de toute rêverie (Chiyo Ni n'était pas pour rien disciple de Bashô, le maître du poème réaliste). On cultive le cerisier pour ses fleurs et ses fruits et sans eux, on le brûlera au prochain hiver : quoi de plus naturel? Cette évidence "guérit" l'arbre du tourment qui l'empêchait de fleurir - et il fleurit au printemps : l'ordre des saisons garde son cours et c'est là le vrai merveilleux à mes yeux :oops: - pas besoin de miracle, tout est juste normal.

Pardon pour la paraphrase :oops: . J'en profite simplement pour souligner qu'il s'agit d'un thème très courant dans la culture japonaise bouddhique : on le trouve aussi développé dans le Nô par exemple. J'ai en tête une pièce célèbre où un érable cesse de rougir à l'automne, à cause du culte qu'il reçoit pour sa beauté, et où un moine (ou un poète, je ne sais plus) lui prêche la Loi pour le libérer de son illusion d'être un dieu. ba11
C'est la même histoire.
Quand on sonde les choses, les connaissances s'approfondissent.
Les connaissances s'approfondissant, les désirs se purifient.
Les désirs une fois purifiés, le cœur se rectifie.
Le cœur étant rectifié, on peut réformer sa personne.

Kong Tseu
Katly

Cela me rappelle un autre arbre, que j'ai demandé de ne pas couper.
En pleine campagne, où j'habitais il y a quelques années, on avait un arbre mort dans notre champs en face. Il avait encore une belle allure robuste, malgré qu'il était gris et sec comme un os. Il servait de perchoir à une magnifique buse qui venait là, même l'hiver, je la regardais par la fenêtre, le matin tôt, dans les brumes et le silence.
Quand nous avons quitté les lieux, cette maison a été reprise par d'autres personnes qui s'étaient montrés peu amicales. Elles ont annoncé qu'elles couperaient l'arbre pour faire du bois de chauffage. Je leur ai dis de ne rien faire, qu'il appartenait à la nature et la buse qui venait chasser ici, que pour le bois, il y avait d'autres fournisseurs. Ils ne m'ont pas écouté. :-(
Pour eux c'était un arbre qui servait à rien et laid. :shock:

Je n'ai pas eu le pouvoir ni de la parole, ni de la prière, ni du haïkaï...
Cela fait toujours bizarre un arbre qui n'est plus dans l'espace.
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Flocon
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Katly a écrit :Je n'ai pas eu le pouvoir ni de la parole, ni de la prière, ni du haïkaï...
Bien sûr. Qui l'aurait? loveeeee
Il y a bien une part de merveilleux, ou de surnaturel, dans l'histoire de Chiyo Ni, comme dans celle de Saint François ; la nonne et le Saint ne sont pas exactement "comme tout le monde" (en termes bouddhiques, on dirait que Chiyo Ni joue dans le petit conte un rôle de Bodhisattva, je crois, voire qu'elle est carrément un avatar de Jizô Bosatsu). Bref, on n'est pas dans la réalité brute ; la réalité brute, en fait, elle est dans le haïkaï. Le destin normal d'un arbre devenu inutile aux yeux des hommes, beau ou laid, avec ou sans l'intervention d'un poète, c'est la cheminée.

Katly a écrit :Cela fait toujours bizarre un arbre qui n'est plus dans l'espace.
Oh oui.
Il y a de beaux textes à ce sujet. Je pense à Supervielle, il a bien décrit cette étrangeté du manque, qui est commune aux hommes et aux animaux.

Dans la forêt sans heures
On abat un grand arbre.
Un vide ver­ti­cal
Tremble en forme de fût
Près du tronc étendu.

Cher­chez, cher­chez, oiseaux,
La place de vos nids
Dans ce haut sou­ve­nir
Tant qu’il mur­mure encore.

love_3
Quand on sonde les choses, les connaissances s'approfondissent.
Les connaissances s'approfondissant, les désirs se purifient.
Les désirs une fois purifiés, le cœur se rectifie.
Le cœur étant rectifié, on peut réformer sa personne.

Kong Tseu
Katly

Flocon a écrit :
Katly a écrit :Je n'ai pas eu le pouvoir ni de la parole, ni de la prière, ni du haïkaï...
Bien sûr. Qui l'aurait? loveeeee
Il y a bien une part de merveilleux, ou de surnaturel, dans l'histoire de Chiyo Ni, comme dans celle de Saint François ; la nonne et le Saint ne sont pas exactement "comme tout le monde" (en termes bouddhiques, on dirait que Chiyo Ni joue dans le petit conte un rôle de Bodhisattva, je crois, voire qu'elle est carrément un avatar de Jizô Bosatsu). Bref, on n'est pas dans la réalité brute ; la réalité brute, en fait, elle est dans le haïkaï. Le destin normal d'un arbre devenu inutile aux yeux des hommes, beau ou laid, avec ou sans l'intervention d'un poète, c'est la cheminée.
Ouais, aux yeux des hommes.
Pour l'arbre mort, ils m'avaient prise pour une "uluberlue". :roll: :oops: Je ne sais pas comment il était mort, mais la foudre était le plus plausible. Mais c'est eux que je n'ai pas réussi à faire changer d'avis, à l'époque, c'est ce que je voulais dire.
Dans la nature ( sans les hommes )il y a des arbres morts qui restent debout longtemps, c'est leur façon à eux d'être morts(utile), encore debout, mangé par des vers, leur tombeau c'est le ciel et la terre. "Ami" de la buse et nourriture de la terre...

Flocon a écrit :
Katly a écrit :Cela fait toujours bizarre un arbre qui n'est plus dans l'espace.
Oh oui.
Il y a de beaux textes à ce sujet. Je pense à Supervielle, il a bien décrit cette étrangeté du manque, qui est commune aux hommes et aux animaux.

Dans la forêt sans heures
On abat un grand arbre.
Un vide ver­ti­cal
Tremble en forme de fût
Près du tronc étendu.

Cher­chez, cher­chez, oiseaux,
La place de vos nids
Dans ce haut sou­ve­nir
Tant qu’il mur­mure encore.

love_3
Très beau, merci Flocon, magnifique j'aime beaucoup Jules Supervielle et celui-ci, je ne le connaissais pas, bel hommage à nos souvenirs d'arbres, aux arbres. jap_8
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Flocon
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De rien, c'est toujours un plaisir de partager des souvenirs et des poèmes. :)

Pour revenir au sujet de la prière dans le bouddhisme, c'est quelque chose qui reste un peu obscur pour moi. Il existe des formules d'hommage au Bouddha (historique ou cosmique comme Amida, peu importe), des formules de vœux pour soi-même et pour autrui, des invocations aux êtres vénérés, mais s'agit-il à proprement parler de ce que nous avons l'habitude d'appeler "prière", je n'en sais trop rien. Personnellement, je ne pratique aucune prière dans un cadre bouddhiste, donc ma foi... :?:
Quand on sonde les choses, les connaissances s'approfondissent.
Les connaissances s'approfondissant, les désirs se purifient.
Les désirs une fois purifiés, le cœur se rectifie.
Le cœur étant rectifié, on peut réformer sa personne.

Kong Tseu
Katly

Je me disais pour un arbre, même mort, parfois, on ne peut pas être tranquille.
Mais pour les humains, on prie et cela les aide à faire le voyage tranquille, on prend le temps.

Je n'ai connu que deux prières enfant, du christianisme, mais mal transmises par le milieu familial, d'une mauvaise façon sur le sens, et les circonstances mais cela a malgré tout touché mon coeur, c'est passé au travers. :D Je m'en rend plus compte aujourd'hui... Après ça, ça s'est enfoui, la prière est devenue intérieure, puis plus tard spontanée dans le recueillement naturel du silence parfois, mais je ne savais pas vraiment si c'était "prier", ou en marchant souvent... puis maintenant je découvre la prière dans le bouddhisme petit à petit.
Je crois qu'on apprends pas vraiment cela comme une pratique, on grandit avec, on le vit au fil du temps, même si cela semble avoir disparu de notre vie à un moment, cela resurgit et on éprouve le besoin très intense un jour, que cela devient plus présent, comme respirer. On vit en respirant, on vit en priant. Donc, les prières du bouddhisme vont faire comme ça un chemin en nous, entrer dans notre coeur et dans notre vie naturellement.
S'il y a bien une chose qu'on ne peut pas forcer ou apprendre par coeur de façon confuse, c'est bien la prière.
J'ai mauvaise mémoire pour bien des choses, mais le début d'une prière qui revient, un mantra ou une chanson ça ça reste.
Mais à part ça, j'ai encore du mal à mettre ça dans une forme avec des mots, dans le bouddhisme, peut-être que la poésie m'aidera... :) Je ne sais pas. Je me sens mieux dans le silence, peut-être que la prière ça existait bien avant de parler, avant les mots, les langues...
La raison la plus bête aussi c'est qu'il faut lire la prière pour la connaître et mes yeux se sont fatigués sur les livres, faut des bonnes binocles.
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