Le culturel au détriment de l'essentiel ?

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tongra

En plus d'être un très bel enseignement sur la révélation de la nature inconsistante du soi, cette vidéo de Dz Ponlop R, aborde la problématique de la part culturelle dans l'enseignement, qui semble peser sur la découverte de la sagesse profonde.

http://www.youtube.com/watch?v=ciPBcc1tPqI

lausm

Et sur ce point, je le rejoins à 200 pour cent!
Le bouddhisme est trop connoté à un truc exotique, et il faut faire le boulot de voir où est le bouddhisme dans les formes de notre société telle qu'elle est (c'est à dire avec un très gros fond de culture monothéiste!).
Jean

Tous ces enseignants qui ont une bonne conscience professionnelle ont une tache très délicate et difficile : Transmettre l'enseignement de leurs lignées pour qu'il ne disparaisse pas et transmettre l'essence de ces enseignements.

Pour un Lama Tibétain, c'est beaucoup plus difficile d'enseigner le Dharma à un Occidental qu'à un Tibétain, c'est le pourquoi le Dalai lama, le Karmapa, etc ont envoyé et continuent d'envoyer de Lamas très réalisés en Occident. D'une certaine manière des Lamas comme Trungpa,Tartang Tulku, Lama Yéshé, TWR ont été envoyés en occident que pour préparer le terrain pour les enseignements des grands Lamas. TWR bien que "révolutionnaire" dans son enseignement n'arrette pas de conseiller à ses élèves de suivre les enseignements traditionnels des grands lamas de sa lignée.

Il me semble qu'ils mettent maintenant plus l'accent sur transmettre l'essence. C'est de cela dont ont besoin la majorité de leurs élèves. Et il semble qu'ils aient accepté l'idée que ce sera une minorité qui sera intéressée par et l'essence et par les pratiques traditionnelles.(Apprendre le Tibétain, les mudras, les pujas, les pratiques préliminaires, etc).

Dans tous les cas, s'habiller à la mode Tibétaine et manger de la tsampa ne veux absolument rien dire. Peut être s'habiller en Schtroumf et manger de la salsepareille a une signification plus profonde :D

Ils ont constaté qu'enseigner en premier la voie traditionnelle sans la compréhension de l'essence provoquait de nombreuses erreurs d'interprétation. Cela se traduisait aussi bien chez l'enseignant que chez l'élève par souffrance, perte de temps et d'énergie et cela pouvait même dégouter du Dharma des personnes qui étaient intéressées par cette voie et qui auraient pu la pratiquer si on leur avait bien expliqué de quoi il s'agissait.

Il existe des séminaires d'enseignants du Dharma où ils discutent de leurs expériences pédagogiques, de ce qui marche et qui ne marche pas.

Il semble que jusqu'à présent, c'était chacun qui faisait sa petite cuisine de son côté, mais ils se sont aperçus qu'avec "A little Help of My Friends", ils pouvaient améliorer leur pédagogie. Ils cherchent à être plus efficaces.

Grâce à certains de leurs élèves ou par leur recherche. ils se tiennent au courant de ce qui marche dans les psychologies, psychothérapies, les pratiques de développement personnel. Ils ont rencontré des pratiquants ou des enseignants de ces disciplines et se sont aperçus que ce n'étaient pas tous des idiots et même que certains avaient des expériences ou des réalisations très profondes.

Ils s’aperçoivent que les occidentaux réagissent plus à certains concepts qu'à d'autres par exemple le terme de vacuité qu'ils remplacent par les termes ouverture, espace ou par exemple le terme de compassion qu'ils remplacent par ouverture du coeur, bienveillance, tendresse, empathie, etc

Il y a un bon exemple : Au début ils enseignaient la compassion pour tous les êtres, ils se sont aperçu que peu comprenaient du fait qu'ils ne s'aimaient pas eux-mêmes!!! Ils ont commencer à souligner l'importance de s'aimer soi-même, de rentrer en amitié avec soi-même. ils ont fixé des buts intermédiaires, s'aimer soi-même, apaiser les relations avec les parents, l'époux/épouse, les enfants etc. Cela est enseigné dans les textes traditionnels mais ce n'est pas aussi souligné.

Les occidentaux ayant compris cela peuvent aborder les concepts de vacuité et de compassion en ayant plus de chance de comprendre de quoi il s'agit et de le réaliser et d'une manière générale ils ont plus de chance de comprendre le pourquoi ou l'essence des pratiques traditionnelles.

Tous les occidentaux ne souffrent pas de manque d'amour, d'estime pour eux-mêmes mais il semblerait qu'il y en a, quand même, un nombre important que les enseignants du Dharma ont rencontré.

L'un des messages qu'il me semble se dégager de tout cela est qu'un pratiquant de la voie "adaptée" n'est pas forcément moins réalisé qu'un pratiquant de la voie "traditionnelle". Il n'y a pas de pratiquant de premier ordre ou de pratiquant de second ordre. Il y a la hierarchie samsarique et la hiérarchie spirituelle.

PS "Rebel without a cause " était le second film de James Dean. A peu près 60 ans plus tard, c'est "Rebel Buddha". C'est vrai que la nature de Bouddha fait péter toutes les opinions, les attitudes mentales, les comportements stéréotypés, les murs de l'esprit étroit. De son coté, Trungpa parlait de matérialisme spirituel, de folle sagesse et de compassion impitoyable.
Jean

TWR a fait des vidéos ou il reprend en Tibétain son enseignement du Refuge Intérieur, des 3 Portes. C'est un enseignement pour les Tibétains, pour les moines qui vivent dans les monastères et qui y apprennent le Dharma. C'est peut être pour rafraichir l'approche culturelle et souligner l'essence des enseignements.

Je me demande quel en est l'impact?

Est-ce que les livres de Trungpa ont été traduits en Tibétains ou le livre de Sogyal?

Je sais que dans certains monastères Tibétains aux Indes, Népal, etc les découvertes des neuro-sciences font partie maintenat du cursus de formation des moines.

Trungpa disait qu'un jour ce seront les occidentaux qui enseigneront le Dharma aux Tibétains. Sans aller jusque là, c'était le signe que déjà le besoin de secouer la poussière du culturel pour retrouver l'essence se faisait sentir.
tongra

Après avoir été formaté aux éléments culturels d'une voie traditionnelle, il parfois difficile de se dégager de cette gangue. Mais tôt ou tard il faut y passer, ce qui, paradoxalement, n'oblige pas à ne plus utiliser ces éléments mais on sait à quoi on a affaire, pourquoi et comment on le fait. On peut très bien les utiliser comme éléments de célébration car tout acte de la vie devient célébration.

Donc rien n'est rejeté ... ni n'est devenu attachement à des croyances.
ted

tongra a écrit :Après avoir été formaté aux éléments culturels d'une voie traditionnelle, il parfois difficile de se dégager de cette gangue. Mais tôt ou tard il faut y passer, ce qui, paradoxalement, n'oblige pas à ne plus utiliser ces éléments mais on sait à quoi on a affaire, pourquoi et comment on le fait. On peut très bien les utiliser comme éléments de célébration car tout acte de la vie devient célébration.

Donc rien n'est rejeté ... ni n'est devenu attachement à des croyances.
Je suis d'accord avec ça, sauf que je trouve que les mots "gangue" et "formaté" semblent un peu péjoratifs. Pourquoi ne pas parler plutôt de "terreau" et "d'éducation" ? qui ont des connotations positives ? La culture tibétaine est aussi précieuse pour un tibétain que la culture française l'est pour un français. Maintenant, si l'on voyage ou si on s'ouvre aux autres, un français s'apercevra que la culture tibétaine est elle aussi, précieuse pour lui. Parce qu'il aura touché du doigt son humanité, la diversité chatoyante de l'espèce, la contribution de chaque peuple, de chaque culture, au patrimoine commun des hommes.

Un jour, j'ai vu une jeune femme qui fredonnait une chanson au volant de sa voiture. Elle était pourtant dans un gros bouchon, sans doute sur le point d'être en retard. Je me suis dit qu'elle essayait de retrouver un peu de sérénité avec ce qu'elle avait sous la main. Cette chanson, je ne la connaissais sans doute pas. Mais moi aussi je connais des chansons qui me calment. Elles m'ont été transmises dans mon adolescence. Elles se sont installées aux endroits clés. Et maintenant, elles ont un pouvoir dingue, même 25 ans après ! Je les réécoute et je vais mieux. ba11 Pourquoi s'en priver ? Devrais-je aller apprendre la chanson de cette jeune femme pour me calmer ? Chanson qui n'est associée chez moi à aucun évènement marquant :shock: et qui n'aura donc aucun pouvoir sur mes états d'âmes ? :oops: Peut être que ça marchera si la jeune femme est très séduisante ou très brillante, ou très sympathique. loveeeee Et si en apprenant la nouvelle chanson avec elle, cela me crée un choc émotionnel aussi marquant que ceux de mon enfance et de mon adolescence. love2

Il y a des personnes qui ont la chance d'avoir expérimenté ce choc émotionnel à la rencontre d'une nouvelle culture. Et pour elles, c'est merveilleux ! Elles sont motivées pour apprendre le tibétain ou une autre langue, en quelques mois. Tout est beau, tout est neuf ! La plus petite tradition du pays d'adoption devient un objet de satisfaction ! <<metta>> C'est une nouvelle adolescence qui s'ouvre à elles ! Ces personnes ont beaucoup de chance. Elles peuvent redistribuer tout un tas de leviers énergétiques de façon plus équilibrée. Désamorcer de vieilles blessures. Commencer une nouvelle vie ! Il faut qu'elles foncent. Pas question de rater cette seconde chance.
ted

Mais tout le monde ne vit pas ainsi les échanges culturels. Et pour ceux qui restent accrochés à leurs vieux vêtements, leurs vieux paysages, leurs traditions, etc, les mécanismes décrits par le Bouddha sont bien ancrés, enracinés dans leur expérience personnelle de la vie. Et il va falloir à l'enseignant une bonne connaissance de ces mécanismes culturels particuliers si il veut les désamorcer, les court-circuiter.

Un bon maître, à mon avis, c'est quelqu'un qui connait bien son disciple. Encore mieux qu'un policier, qu'une mère ou qu'un psychiatre. :) C'est quelqu'un qui voit juste sur l'état d'avancement du disciple. Alors, l'humain étant universel, un maître exceptionnel, issu d'une autre culture, pourra sans doute, après un échange, poser un diagnostic assez juste sur le niveau d'obscurcissement d'une personne. Mais il s'agira, à mon avis, simplement d'un constat sur le degré de confusion de la personne qui se tient devant lui. Certains maîtres sont brillants dans cet exercice et leurs propos et conseils immédiats sont à la limite des supers pouvoirs chers à notre ami Yudo. :mrgreen: Mais quand il s'agira de donner des exercices au quotidien, pendant de longs mois, de contrer tous ces petits mécanismes culturels ancrés dans des siècles d'éducation, il est préférable sans doute d'avoir un enseignant qui connait un peu la complexité de la culture du disciple. Thich Nhat Hanh l'a bien compris et fait un travail remarquable en ce sens. Mais si, comme je l'ai dit, le disciple a fait l'effort d'adopter les codes culturels de l'enseignant, c'est plus facile.

Et puis au final, comme dit Tongra, tout cela est vu pour ce que c'est : des attachements. Des attachements précieux qui construisent et remplissent toute une vie de bonheur et de souffrance. Mais des attachements tout de même. Indispensables pour pratiquer. Parce qu'on pratique dans la dualité.
longchen2

ted a écrit :(...) Un bon maître, à mon avis, c'est quelqu'un qui connait bien son disciple. Encore mieux qu'un policier, qu'une mère ou qu'un psychiatre. :) C'est quelqu'un qui voit juste sur l'état d'avancement du disciple. Alors, l'humain étant universel, un maître exceptionnel, issu d'une autre culture, pourra sans doute, après un échange, poser un diagnostic assez juste sur le niveau d'obscurcissement d'une personne. Mais il s'agira, à mon avis, simplement d'un constat sur le degré de confusion de la personne qui se tient devant lui. (...)
Oui, mais actuellement il n’y a pas ce lien entre disciple et maître ou élève et enseignant.
On va à des enseignements, les écoute attentivement, et c’est là que tout se passe, tu n’es pas en contact réellement personnel avec le maître, il ne te connait pas et vice versa dans la mesure où tu ne partages pas le quotidien du maître.

Bien sûr il y a la possibilité d’obtenir un entretien privé, et parfois c’est proposé, mais je n’en avais même pas demandé. Pourquoi faire ? Tu viens à des enseignements ; le maître est là et s’investit pour les transmettre de son mieux ; que lui demander ? Rinpoché que devrais-je pratiquer ? La réponse logique dans ce cas pourrait être quelque chose comme ben que faites-vous là ! :D
longchen2

Sinon sur le sujet du topic…
On peut trouver un intérêt intellectuel dans les enseignements traditionnels, c'est mon cas, mais au niveau de la pratique quotidienne un manque (relatif) de pertinence. Enfin je ne sais pas exactement comment formuler cela, comme une forme d'inadéquation. Il fait savant ce mot n'est-ce pas :D
FleurDeLotus
Jean

Un livre sur le sujet :

http://www.wisdom-books.com/ProductDeta ... ral_Feb_14

J'apprécie tous ces anarchistes spirituels, heureusement qu'ils existent, mais je garde un oeil sur les cadrans du tableau de bord de la voie graduée comme elle est enseignée chez les Gelougpas. N'est pas Brung Pa Kun Leg qui veut, qui le voudrait bien ou qui voudrait qu'on le considère comme le Brig Pa kun leg des temps modernes.

J'aime Ryokan ou Lama Guendune qui disait "Qu'est-ce que j'ai fait dans ma vie? J'ai bu du thé, mangé de la tsampa, c'est tout!"

L'ego est malin, il peut aussi se parer d'une super humilité.

En tout cas, jouer à la babale avec sont chien ou faire le pitre et rire des enfants qui sont vraiment bon public, c'est reposant.
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