Peut-on être de plusieurs traditions ?

binah

C'est dans le titre. Je me posais la question. Par exemple, être de la tradition zen avec Vajrayana ?
lausm

Qu'est-ce qu'etre d'une tradition?
Appartient-on à une tradition, ou la pratique-t-on?

Je pense qu'on peut s'intéresser à diverses choses, mais pour bien les comprendre, il faut aller dans une direction et l'approfondir. Chacune a des spécificités, et faire des combinaisons entre elles risque de s'avérer préjudiciable si c'est fait au mauvais moment.
Par contre, quand on est bien enraciné, rester ouvert et en dialogue me semble un enrichissement et meme source de remises en cause positives.
Le tout est d'etre clair : quand on pratique une chose, on ne mélange pas avec une autre. Chaque système a sa cohérence interne.
C'est quelqu'un qui pratique le zen et la voie tibétaine du Boeun, qui m'a dit cela.
Il pratique les deux, et ça donne un résultat intéressant, car il n'a pas fait une soupasse syncrétique.
Si on regarde l'histoire du bouddhisme, tous les courants se sont inter influencés.
Mais en France, avec notre esprit universitaro-administratif, on pourrait bien avoir la tentation de créer des barrières encore plus étanches qu'il n'est besoin.
Etre cohérent, oui. Créer un bastion identitaire sectaire, non.

Si on regarde le parcours d'un type comme Peter Fenner, il a pratiqué le zen, le dzogchen, le theravada, et il a fini par mettre toutes les barrières théoriques par terre-il semble qu'elles sont surtout tombées toutes seules- pour formuler la chose comme présence non-duelle.

Denys Teundroup comparait les traditions aux rayons d'une roue : tous sont différents, mais convergent vers le meme moyeu.
Jean

Avant d'enter dans le Vajra yana, je pratiquais le hatha Yoga et Zazen

Il n'y avait pas de problème.

Ensuite quand je suis entré dans le Vajrayana, le point d’intersection Zazen et Vajarayana étaient le Mahamoudra ou le Dzogchen.

Il y a la réalité et il y a les grilles de décodage de la réalité. Il y a la grille de décodage, le vocabulaire Zen et la grille de décodage et le vocabulaire vajra yana

On peut décoder Zazen avec la grille Vajrayana et le Vajrayana avec la grille Zen

Mais c'est surtout par l'expérience que l'on peut voire comme elles se rejoignent

Comme je pratiquais le hatha Yoga séparément de Zazen et inversement, j'ai commencé à pratiquer Zazen et Vajrayana séparément. J'ai vue ainsi comment elles s'articulaient et se rejoignaient.

Comme les 3 portes, Zazen peut être vu aussi comme une pratique spirituelle séculière et donc praticable dans le cadre de n'importe quelle spiritualité religieuse traditionnelle.

J'apprécie toujours autant l'art Zen, poémes, jardins, calligraphie, arrangement floral, cérémonie du thé, etc. et je suis pas le seul : Trungpa, Tenzin wangyal et de nombreux "jeunes" Lamas tibétains qui ont étudié la culture Zen aussi. Donc je ne crois pas m'être trompé.

Comment le Vajrayana pouvait préparer à Zazen, comment Zazen était l'essence du vajrayana. (Vécu, ressenti)

Aprés être rentré dans le vajrayana, j'ai fait des retraites en groupe de Zazen et c'était du pur bon temps

Je peux dire que Zazen m'a permis de mieux comprendre et d'intégrer le vajrayana, de pas me perdre dans les détails et le vajrayana m'a permis de stabiliser, de renforcer mon expérience de Zazen.

C'est un cheminement personnel, c'est à chacun de voir, de faire ses choix, de ressentir, de faire ou non ses propres expériences. Je ne conseillerai à personne de pratiquer les deux.

Dans mon cheminement personnel, il y a un côté karma, karma subi, adaptation au karma et suivre son ressenti et son intuition.

Très probablement, si le karma subi avait été différent, le cheminement aurait été différent (Si ma tante...)

Mais enfin, le ciel ne m'est pas tombé sur la tête et je suis trés heureux d'avoir suivi ce chemin, comme je suis très content d'avoir commencé par le Hatha Yoga (en fait à l'époque, il n'y avait pas grand choix).

Changer les grilles de décodage est excellent pour la souplesse d'esprit. Si on laisse tomber une des deux, on peut laisser tomber les deux, reste l'expérience directe de la réalité. On n'est attaché à aucune d'entre elles ce qui reste un remède excellent contre la crispation et la rigidité de l'esprit. On y trouve la joie et l'humour.
Robi

binah a écrit :C'est dans le titre. Je me posais la question. Par exemple, être de la tradition zen avec Vajrayana ?
Est-ce que dans la forêt tu peux marcher sur deux chemins à la fois?
longchen2

Cela me paraît difficile de s’engager dans plusieurs courants très différents en même temps ; par exemple le Théravada et le Vajrayana qui divergent sur pas mal de points. Par contre au niveau de l'étude, qui est intellectuelle (et qui ne correspond pas nécessairement à un engagement), oui c'est très possible.

A l’intérieur du bouddhisme tibétain il y a différentes lignées ou approches, là cela me semble à priori plus simple d’y circuler, enfin cela demande certainement un effort d’adaptation moins important même si une lignée x ou y peut revendiquer sa suprématie sur une autre.
Butterfly_tenryu
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Flocon
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Cela me paraît difficile.
Personnellement, j'ai un temps combiné Chan/Zen et Theravada, puis je m'en suis tenue à la première école. Je ne regrette pas d'avoir approché le Theravada, car cela m'a aidée à mieux comprendre le fonctionnement intellectuel du bouddhisme, notamment en étudiant le canon pali et en lisant les sutras de façon méthodique. J'ai également bénéficié d'excellents enseignements dans cette tradition, qui m'ont fait réfléchir. Mais à un moment, j'ai dû choisir pour ne pas me disperser dans trop de pratiques.
Quand on sonde les choses, les connaissances s'approfondissent.
Les connaissances s'approfondissant, les désirs se purifient.
Les désirs une fois purifiés, le cœur se rectifie.
Le cœur étant rectifié, on peut réformer sa personne.

Kong Tseu
Jean

Longchen a écrit :
même si une lignée x ou y peut revendiquer sa suprématie sur une autre.
Si on entend cela, il ne vaut mieux y prêter aucune attention. Si on a compris sa lignée, on a compris toutes les autres lignées. Si on déprécie une lignée, c'est que l'on a pas compris et expérimenté l'essence de sa propre lignée. C'est aussi stupide que le machisme de moines vis à vis des nonnes.

Je me rappelle d'un Lama, en plus important Toulkou de son état, qui parlait de l'Hindouisme avec un sourire qu'il voulait futé mais qui était condescendant , du genre : "Les pauvres crétins, ils n'ont rien compris". Pour moi il n'exprimait que sa qualité de rigolo. Il n'était rien à coté de gens comme Ramakrishna, Ramanana Maharishi, Ma Anandamayi, etc

Il ne faut pas non plus comparer un bon pratiquant d'une lignée avec un mauvais pratiquant d'une autre lignée. Ce serait malhonnête.

Trungpa avait peint sur l'arbre du Refuge de sa lignée un personnage qui représentait Shunryu Suzuki. Ce qui n'est pas rien quand on sait que les Tibétains ne plaisantent pas avec leur Arbre du Refuge qui représente la transmission plus que sacrée des enseignements qui remonte à Bouddha.
lausm

C'est effectivement un questionnement constant : qu'est-ce qui est compatible?
Chaque tradition a une cohérence, entre ce qui est de la pratique de la méditation, ce qui est l'enseignement sur un plan théorique, qui est un mode de pensée du monde, et aussi ce qui lie le tout : le cadre-système de transmission, enseignants, méthodes d'enseignements, qui peuvent etre très différentes entre elles.
Pour ma part, lire du theravada m'a parlé, mais après plus de douze ans de zen.
Idem pour le bouddhisme tibétain.
Comme disait Jean, par le zazen, j'ai compris et pu écrémer les éléments plus formels pour mieux comprendre le coeur du discours....mais c'est l'expérience du zen qui me l'a permis.

C'est Jacques Brosse qui disait qu'il était allé un jour chez les tibétains en retraite, mais c'était en tant que moine zen.

Je pense qu'il faut en fait trouver le type de pratique qui nous convient le mieux, si on en tente plusieurs, et s'en servir d'axe si l'on va voir autre chose.
Mais effectivement, combiner trop de choses en meme temps risque de créer une tambouille indigeste.
Je pense que si on expérimente différentes pratiques, il faut bien les délimiter entre elles.
C'est comme les thérapies, si on fait trente -six trucs, on finit par ne plus savoir ce qui fait quel effet.

PS : Chogyam Trungpa était un pionnier. Savoir reconnaitre les qualités d'une autre tradition et d'un autre maitre sont une vraie grandeur spirituelle.
binah

lausm a écrit :Qu'est-ce qu'etre d'une tradition?
Appartient-on à une tradition, ou la pratique-t-on?

Je pense qu'on peut s'intéresser à diverses choses, mais pour bien les comprendre, il faut aller dans une direction et l'approfondir. Chacune a des spécificités, et faire des combinaisons entre elles risque de s'avérer préjudiciable si c'est fait au mauvais moment.
Par contre, quand on est bien enraciné, rester ouvert et en dialogue me semble un enrichissement et meme source de remises en cause positives.
Le tout est d'etre clair : quand on pratique une chose, on ne mélange pas avec une autre. Chaque système a sa cohérence interne.
C'est quelqu'un qui pratique le zen et la voie tibétaine du Boeun, qui m'a dit cela.
Il pratique les deux, et ça donne un résultat intéressant, car il n'a pas fait une soupasse syncrétique.
Si on regarde l'histoire du bouddhisme, tous les courants se sont inter influencés.
Mais en France, avec notre esprit universitaro-administratif, on pourrait bien avoir la tentation de créer des barrières encore plus étanches qu'il n'est besoin.
Etre cohérent, oui. Créer un bastion identitaire sectaire, non.

Si on regarde le parcours d'un type comme Peter Fenner, il a pratiqué le zen, le dzogchen, le theravada, et il a fini par mettre toutes les barrières théoriques par terre-il semble qu'elles sont surtout tombées toutes seules- pour formuler la chose comme présence non-duelle.

Denys Teundroup comparait les traditions aux rayons d'une roue : tous sont différents, mais convergent vers le meme moyeu.
Oui, voilà, c'est avant tout de la cohérence qu'il est nécessaire d'avoir. Merci pour ta réponse, Lausm. jap_8
binah

Jean a écrit : Dans mon cheminement personnel, il y a un côté karma, karma subi, adaptation au karma et suivre son ressenti et son intuition.

Très probablement, si le karma subi avait été différent, le cheminement aurait été différent (Si ma tante...)

Mais enfin, le ciel ne m'est pas tombé sur la tête et je suis trés heureux d'avoir suivi ce chemin, comme je suis très content d'avoir commencé par le Hatha Yoga (en fait à l'époque, il n'y avait pas grand choix).

Changer les grilles de décodage est excellent pour la souplesse d'esprit. Si on laisse tomber une des deux, on peut laisser tomber les deux, reste l'expérience directe de la réalité. On n'est attaché à aucune d'entre elles ce qui reste un remède excellent contre la crispation et la rigidité de l'esprit. On y trouve la joie et l'humour.
Le karma subi n'est pas à subir justement, Jean. Il se libère comme toute souffrance... Merci pour ton témoignage. jap_8
Je ne m'attendais pas à avoir de réponse aussi développée pour chacun d'entre vous, merci.
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