Le chemin de la pacification stable

Zopa

Dans l'entraînement à la concentration (shamata ou "chi né" en tibétain), certaines écoles tibétaines utilisent un dessin représentant un moine courant derrière un éléphant (symbolisant son esprit).

Je ne sais pas comment joindre une photo de cette représentation ici mais peut être qu'un membre du forum aura la gentillesse de le faire.

Je voulais savoir ce que vous en pensiez.
Dhammadanam

Image

L’illustration de ci-dessus reproduit une xylographie tibétaine qui présente les neuf étapes du cheminement de shamatha en les illustrant par neuf scènes. Il y a deux personnages : l’homme, qui est le sujet méditant, l’observateur, et l’éléphant, son esprit. Le méditant manie les deux outils dont il dispose pour développer shamatha : l’attention et le rappel. La hachette, incisive, représente l’acuité de l’attention vigilante et la corde à crochet est le souvenir de la pratique, le rappel. Comme de nombreuses distractions interrompent l’état d’attention vigilante, le méditant doit y revenir par des rappels constamment répétés. La vigilance est l’acuité de base de la pratique et le rappel l’élément qui en assure la continuité.

L’état de shamatha a deux principaux obstacles : d’une part l’agitation créée par les fixations sur les pensées et les émotions, et d’autre part la torpeur, l’opacité mentale. La torpeur est représentée par la noirceur de l’éléphant et l’agitation par celle du singe. Le feu qui décroît au fil des étapes exprime le niveau énergétique de la méditation : au fur et à mesure qu’elle progresse, la pratique exige de moins en moins d’efforts. Les six virages du chemin déli­mitent six paliers de la progression, dominés successivement par six forces de la pratique qui sont : l’écoute des instructions, leur assimilation, leur souvenir, la vigilance, la persévérance et la parfaite habitude. En bordure du chemin sont placés différents objets : plat de nourriture, conque, petite cymbale et miroir représentant les objets sensoriels : saveurs, odeurs, sons, et formes visuelles, qui distraient du chemin de shamatha si le méditant les saisit.

1 – Au bas de la reproduction, à la « première station », la distance séparant le méditant et son esprit est grande. L’éléphant de l’esprit est mené par le singe de son agitation. Le feu est important, c’est-à-dire que la méditation demande beaucoup d’énergie ; les obstacles sont à leur maximum : tout est noir.
2 – À la deuxième station, le méditant grâce à son attention se rapproche de l’éléphant ; le singe mène toujours l’esprit mais le rythme s’est ralenti. L’opacité et l’agitation décroissant, du blanc filtre dans la noirceur de l’éléphant et du singe.
3 – À la troisième station, le méditant ne court plus vraiment après son esprit ; ils sont maintenant face à face. Le singe est toujours en avant mais il n’entraîne plus l’éléphant. Un contact suivi entre le méditant et l’esprit s’est établi avec la corde du rappel. Une forme de torpeur subtile, passée jusqu’alors inaperçue, apparaît ; c’est le petit lapin. La noirceur de l’opacité et de l’agitation décroît.
4 – À la quatrième station, l’évolution se précise, le méditant se rapproche encore de l’éléphant. La blancheur du singe, de l’éléphant et du lapin progresse. La scène est plus calme.
5 – À la cinquième station, la situation se renverse. Le méditant guide maintenant l’éléphant de l’esprit avec une attention et un rappel continus. Le singe ne conduit plus, mais le lapin est toujours là. La scène est encore plus claire.
Dans l’arbre, un singe blanc cueille des fruits blancs : il représente l’activité de l’esprit s’engageant dans des actes positifs. Bien que de telles actions doivent habituellement être cultivées, ce sont des distractions pendant la pratique de shamatha ; c’est pourquoi l’arbre est noir et à l’écart du chemin.
6 – À la sixième station, les progrès se précisent ; le méditant conduit ; le rappel de la méditation est constant sans que l’attention n’ait plus besoin d’être dirigée vers l’esprit. Le lapin est parti et la situation se clarifie de plus en plus.
7 – À la septième station, la scène est devenue très paisible. La marche n’a plus à être dirigée. La situation est devenue presque complètement transparente ; quelques taches noires signalent encore des points délicats.
8 – À la huitième station, l’éléphant marche docilement avec le méditant. Il n’y a pratiquement plus de noir et la flamme de l’effort a disparu. La méditation est devenue naturelle et continue.
9 – À la neuvième station, l’esprit et le méditant sont tous deux au repos complet. Ils sont comme de vieux compagnons habitués à rester tranquilles ensemble. Les obstacles ont disparu, shamatha est parfait.

Les tableaux suivants, portés par le faisceau émanant du cœur du méditant, représentent l’évolution de la pratique au sein de cet état de shamatha. La réalisation de shamatha est caractérisée par des expériences d’allégresse et de ravissement, illustrées par le méditant volant ou transporté à dos d’éléphant.

Le dernier tableau se réfère à la pratique conjointe de shamatha et de vipashyanâ. La démarche se renverse. Esprit et méditant sont ensemble, l’un chevauchant l’autre. Le feu révèle une nouvelle énergie qui apparaît : l’épée flamboyante de l’intelligence immédiate tranche les deux faisceaux noirs des voiles des passions et de la dualité.

Source
Zopa

jap_8
Merci Dhammadanam pour cette réponse. Tu portes bien ton nom, Don du Dharma ;-)

La réalisation de Shamatha demandant des efforts considérables et des conditions favorables, j'ai entendu dire que certains moines tibétains de la tradition guéloug, comme par exemple feu guéshé Rabten, quittaient leur monastère après leurs études de philosophie, pour rejoindre de petits ermitages sur les hauteurs de Dharamsala.

J'ai pu voir, il y a déjà une vingtaine d'années, ces petites maisons de pierres et de tôles, à l'écart de l'agitation du monde, dans le silence de la nature... Devant les maisons, des robes monastiques séchaient au soleil...

Pour ceux qui pratiquent cette stabilisation méditative en Occident, quelles sont vos expériences, vos difficultés, ou vos avançées sur ce chemin ?
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jules
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Pour ceux qui pratiquent cette stabilisation méditative en Occident, quelles sont vos expériences, vos difficultés, ou vos avançées sur ce chemin ?
UNE expérience
UNE difficulté
UNE avancée
UN chemin

:D
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axiste
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Merci pour le tableau et ce rappel du chemin.

J"en suis toujours au tout début, mais cependant le calme mental est là un peu mieux.
En fait je m'entraine et le résultat varie beaucoup d'un jour à l'autre.
Ca dépend aussi si j'ai fait des exercices avec mon corps ou pas avant: marche, yoga,sophro simple ou même un cours impromptu de danse avec ma fille hier soir ou j'ai beaucoup souri de voir combien je ne connais pas mon corps…sourire de reconnaissance: oui, j'apprends un peu et ça fait beaucoup de bien.

- Mais maman, flex, demi pointe, pointe, c'est pas compliqué quand même, tu sens tes muscles, il faut savoir par où ça passe, tu ne sais pas c'est tout, ça s'apprend.
- euh, oui.(sourire lâcher prise, je retente)
Ah mais j'ai fini par y arriver …je lui ai commandé quelques autres cours à venir.
C'était charmant, elle reprenait ses tous premiers exercices d'y il a 9 ans !

Pour le calme mental, il me semble que c'est facilité par des exercices simples préalables en ce qui me concerne, qui me font sentir mon corps.
Pour moi je reprends les mouvements lents et doux en exercice parce qu'ils m'aident à pacifier mon esprit ensuite dans la méditation…
Mais je n'ai pas trop de prétentions, je fais comme je peux et comme ça vient.

J'ai raccroché un programme qui m'envoie des newsletters et ça m'aide bien: parce que je sais que j'ai tel objectif pour la semaine suivante,alors ça m'aide vraiment à méditer. Sinon dans le quotidien, sans ces rappels bienveillants, les évènements ont tendance à me happer ailleurs et là, j'ai posé des jalons et je n'ai plus qu'à respecter les panneaux indicateurs. Ce que je fais avec beaucoup de gratitude et de joie, j'ai conscience que derrière il y a un travail monstre qui est fait...pour nous.
C'est bienfaisant, ce genre de rappel est très bienvenu et en fait je sais pas vraiment décrire mais c'est quelque chose auquel on peut avoir accès de nos jours et c'est une chance incroyable je pense.
Cinq clefs pour la parole correcte :
- dire au bon moment, prononcer en vérité, de façon affectueuse, bénéfique et dans un esprit de bonne volonté."
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