Le rôle du désir dans la quête spirituelle ?

Zopa

Je croyais que c'était l'extinction des désirs qui menait au nirvana et non pas le nirvana qui réalisait tous nos désirs.

Je me suis trompé ???
ted

Peut-être bien ! :D
Le nirvana n'est pas un endroit. Et il n'est pas non plus "produit" par quelque chose comme " l'extinction des désirs".
Zopa

Je sens bien que le nirvana n'est pas un endroit géographique, sorte de septième ciel....mais qu'est ce qui le permet ?
ted

La fin de l'ignorance.
Zopa

La Fin de l'ignorance n'entraîne -t-elle pas aussi la fin des désirs ?
ted

Zopa a écrit :La Fin de l'ignorance n'entraîne -t-elle pas aussi la fin des désirs ?
paticcasamuppāda la coproduction conditionnée, est un enseignement extrêmement subtil qui ne se résume pas à de simples causalités. Ce n'est pas non plus une philosophie qui se réfute à coup d'argumentaires. C'est un dharma qui s'actualise par la pratique.

Le désir n'est qu'un maillon :

Conditionnés par :

l’ignorance (avijjā), apparaissent :
les facteurs d’existence (saṅkhārā),
conditionnée par les facteurs d’existence apparaît la conscience discriminative (viññāṇa),
conditionnée par la conscience discriminative apparaît l’individualité psychophysiologique (nāma rūpa),
conditionnés par l’individualité psychophysiologique apparaissent les six bases des activités des sens (saḷāyatana),
conditionné par les six bases des activités des sens apparaît le contact (phassa),
conditionné par le contact apparaît le ressenti (vedanā),
conditionné par le ressenti apparaît le désir ardent (tanhā),
conditionné par le désir ardent apparaît l’attachement (upādāna),
conditionné par l’attachement apparaît le devenir (bhava),
conditionnée par le devenir apparaît la naissance (jāti),
conditionnés par la naissance apparaissent la décrépitude et la mort (jarā maraṇa).
Zopa

Le désir est certes un seul maillon dans cette chaîne qui en comporte douze.

Mais le désir est aussi appelé la soif,
et la soif n'est-elle pas considérée comme un maillon essentiel, une cause principale du devenir avec l'ignorance ?
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jules
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Zopa : C'est bien un désir la aussi, magnifique sur le fond, qui libère et élève. Est-il réaliste ?
Il s'agit de tendre vers la volonté altruiste...c'est difficile en effet, mais c'est au travers de la considération de cette difficulté que nous pouvons progresser et purifier nos désirs égoïstes je pense.
Et la spécificité du désir, c'est bien de tendre vers quelque chose : tu parles de s'élever, c'est effectivement je pense de cela qu'il s'agit, sachant que le ciel n'a pas de toit, c'est en cela que ce désir me semble réaliste parce qu'il est tension vers.
Elever est d'ailleurs un terme qui me plait lorsqu'on souligne son emploi dans une expression telle que : Elever un enfant.
Il y'a un chemin très long entre le bodhisattva exemplaire dont l'histoire nous dit qu'il s'est jeté à la gueule d'une tigresse affamée et ne pouvant plus nourrir ses petits et là où nous en sommes, c'est certain, mais cette histoire est comme une lumière lointaine de laquelle nous pouvons chercher à nous rapprocher. Est-ce réaliste de penser que tous les humain puisse incarner parfaitement la perfection de ce bodhisattva ? Sans doute non, en tous les cas, il est clair que nous n'en sommes pas là, mais il est réaliste de penser que nous puissions tendre vers cette perfection je pense, chacun à son petit niveau, essayer de progresser en ce sens.
ted

Zopa a écrit :Le désir est certes un seul maillon dans cette chaîne qui en comporte douze.
Mais le désir est aussi appelé la soif,
et la soif n'est-elle pas considérée comme un maillon essentiel, une cause principale du devenir avec l'ignorance ?
La soif (tanhā), ce désir ardent, dévorant, qui exige, qui veut s'approprier, qui enflamme les sens de l'individu, n'est qu'un maillon plus facile à repérer que les autres (en tout cas, c'est mon avis). Voilà pourquoi il y a beaucoup de textes à ce sujet. Mais il est possible de briser la chaîne par n'importe quel maillon et de ne pas se focaliser sur tanhā. De plus, il ne faut pas confondre tanhā, qui est plutôt une sorte d'attachement obsessionnel, avec le désir/aspiration au sens large, celui qui peut être un moteur pour la pratique.

Dans le sermon du feu (Samyutta Nikaya), le Bouddha explique que tous les maillons enflamment les agrégats de façon égale :
Ainsi l'ai-je entendu. Un jour, alors que le Bouddha résidait à Gayasisa, près de Gaya, entouré de mille ascètes, il s'adressa à eux ainsi :
« Moines, tout brûle. Et quel est ce tout qui brûle ?

« Les yeux brûlent. Les formes matérielles brûlent. La conscience visuelle brûle. Le contact visuel brûle. Et toutes les sensations ayant pour cause et condition le contact visuel – que ce soit le plaisir, la douleur, ou ni le plaisir ni la douleur – brûlent également. Et qu’est-ce qui a allumé cet incendie ? C’est le feu du désir, le feu de l’aversion et le feu de l’ignorance. Je vous le dis, c’est le feu de la naissance, du vieillissement et de la mort ; le feu du chagrin, des lamentations, de la douleur, de la détresse et du désespoir.

« Les oreilles brûlent. Les sons brûlent. La conscience auditive brûle. Le contact auditif brûle. Et toutes les sensations ayant pour cause et condition le contact auditif – que ce soit le plaisir, la douleur, ou ni le plaisir ni la douleur – brûlent également. Et qu’est-ce qui a allumé cet incendie ? C’est le feu du désir, le feu de l’aversion et le feu de l’ignorance. Je vous le dis, c’est le feu de la naissance, du vieillissement et de la mort ; le feu du chagrin, des lamentations, de la douleur, de la détresse et du désespoir.

« Le nez brûle. Les odeurs brûlent. La conscience olfactive brûle. Le contact olfactif brûle. Et toutes les sensations ayant pour cause et condition le contact olfactif – que ce soit le plaisir, la douleur, ou ni le plaisir ni la douleur – brûlent également. Et qu’est-ce qui a allumé cet incendie ? C’est le feu du désir, le feu de l’aversion et le feu de l’ignorance. Je vous le dis, c’est le feu de la naissance, du vieillissement et de la mort ; le feu du chagrin, des lamentations, de la douleur, de la détresse et du désespoir.

« La langue brûle. Les saveurs brûlent. La conscience gustative brûle. Le contact gustatif brûle. Et toutes les sensations ayant pour cause et condition le contact gustatif – que ce soit le plaisir, la douleur, ou ni le plaisir ni la douleur – brûlent également. Et qu’est-ce qui a allumé cet incendie ? C’est le feu du désir, le feu de l’aversion et le feu de l’ignorance. Je vous le dis, c’est le feu de la naissance, du vieillissement et de la mort ; le feu du chagrin, des lamentations, de la douleur, de la détresse et du désespoir.

« Le corps brûle. Les choses tangibles brûlent. La conscience tactile brûle. Le contact physique brûle. Et toutes les sensations ayant pour cause et condition le contact physique – que ce soit le plaisir, la douleur, ou ni le plaisir ni la douleur – brûlent également. Et qu’est-ce qui a allumé cet incendie ? C’est le feu du désir, le feu de l’aversion et le feu de l’ignorance. Je vous le dis, c’est le feu de la naissance, du vieillissement et de la mort ; le feu du chagrin, des lamentations, de la douleur, de la détresse et du désespoir.

« Le mental brûle. Les idées brûlent. La conscience mentale brûle. Le contact mental brûle. Et toutes les sensations ayant pour cause et condition le contact mental – que ce soit le plaisir, la douleur, ou ni le plaisir ni la douleur – brûlent également. Et qu’est-ce qui a allumé cet incendie ? C’est le feu du désir, le feu de l’aversion et le feu de l’ignorance. Je vous le dis, c’est le feu de la naissance, du vieillissement et de la mort ; le feu du chagrin, des lamentations, de la douleur, de la détresse et du désespoir.


« Ayant entendu et compris cet enseignement, le noble disciple perd toute attirance pour les yeux, perd toute attirance pour les formes matérielles, perd toute attirance pour la conscience visuelle, perd toute attirance pour les contacts visuels. Et, envers les sensations ayant pour cause et condition le contact visuel – que ce soit le plaisir, la douleur, ou ni le plaisir ni la douleur – il perd aussi toute attirance

« Il perd toute attirance pour les oreilles, perd toute attirance pour les sons, perd toute attirance pour la conscience auditive, perd toute attirance pour les contacts auditifs. Et, envers les sensations ayant pour cause et condition le contact auditif – que ce soit le plaisir, la douleur, ou ni le plaisir ni la douleur – il perd aussi toute attirance

« Il perd toute attirance pour le nez, perd toute attirance pour les odeurs, perd toute attirance pour la conscience olfactive, perd toute attirance pour les contacts olfactifs. Et envers les sensations ayant pour cause et condition le contact olfactif – que ce soit le plaisir, la douleur, ou ni le plaisir ni la douleur – il perd aussi toute attirance

« Il perd toute attirance pour la langue, perd toute attirance pour les saveurs, perd toute attirance pour la conscience gustative, perd toute attirance pour les contacts gustatifs. Et, envers les sensations ayant pour cause et condition le contact gustatif – que ce soit le plaisir, la douleur, ou ni le plaisir ni la douleur – il perd aussi toute attirance

« Il perd toute attirance pour le corps, perd toute attirance pour les choses tangibles, perd toute attirance pour la conscience du toucher, perd toute attirance pour les contacts physiques. Et, envers les sensations ayant pour cause et condition le contact physique – que ce soit le plaisir, la douleur, ou ni le plaisir ni la douleur – il perd aussi toute attirance

« Il perd toute attirance pour le mental, perd toute attirance pour les idées, perd toute attirance pour la conscience mentale, perd toute attirance pour les contacts mentaux. Et, envers les sensations ayant pour cause et condition le contact mental – que ce soit le plaisir, la douleur, ou ni le plaisir ni la douleur – il perd aussi toute attirance

« Ayant perdu toute forme d’attirance, il abandonne toute forme de passion. Libre de toute passion, il est totalement libéré. Avec la libération totale vient la connaissance de sa propre libération. Il comprend : « La naissance a pris fin, la vie sainte a été vécue jusqu’au bout, la tâche a été accomplie. Il n’y a plus rien au-delà en ce monde. »

Ainsi parla le Bouddha. Les moines se réjouirent de ses paroles et lui en furent reconnaissants.

Et, tandis que ce sermon était donné, le cœur des mille ascètes, lâchant tout attachement, fut pleinement libéré et purifié.

source : http://www.dhammadelaforet.org/sommaire ... yaya.html/
Zopa

Bonsoir,

Ted et Jules, je vous remercie pour ces échanges. J'y puise pour ma part des remarques utiles pour ma réflexion. Vos réponses sont donc fécondes.

Jules, tu as poursuis dans ton dernier post avec les désirs altruistes comme étant ce qui nous élèvent. Un désir qui nous élève est aussi un désir qui nous libère. Enfin je crois, il me semble que se libérer de quelque chose favorise une certaine élévation.

Auriez-vous d'autres exemples de désirs qui libèrent, parmi les désirs simples, les désirs de la vie quotidienne, mais qui néanmoins nous allègeraient de quelque chose ?
<<metta>>
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