Une histoire dont je viens de me souvenir

Katly

Enfant, je passais de ma chambre à celle de mon frère par la corniche de l'immeuble au 9ème étage d'une tour pour lui faire des surprises. :D Un jour, très sûre de moi, j'ai trouvé la fenêtre bien fermée. L'effroi m'avait saisit, léger chancellement. Je me suis dite que j'allais tombé bêtement et mourir bêtement que ma vie n'était rien, qu'elle n'était pas à moi, à ma famille, c'était ainsi, j'allais tomber dans le vide. Mais je n'ai jamais recommencé. :D
Mais par contre, s'il y avait eu un incendie chez nous, je connaissais le chemin pour sauver mon frère.
Les mutilés, les fracassés de la vie ne retournent pas sur le champs de bataille pour refaire la guerre, a moins qu'on les y oblige. Ils ont compris pas la peine de rejouer le film.
Bien que je saches me défendre, et que j'oublie ma peur quand il s'agit de protéger un autre, les rapports de force, c'est pas mon truc.La recherche de sensations fortes et démonstration d'exploits c'est pas mon truc non plus. Vivre sa vie est déjà parfois un exploit en soi, quand on sait que d'autres lâchent avant et se suicident sur le parcours. Je ne crains pas pour autant d'affronter les déserts, et les forêts de feu inextricables, s'il le faut. La peur existe, il faut la reconnaître, mais aussi passer au-delà.
Parfois, dans la forêt, il y a les rochers escarpés, il y a les précipices, mon pieds, moins jeune et moins sûr, les grands et vieux arbres précaires, fragilisés par les tempêtes et les foudres , au bord du chemin. Il y a le pont rouge très haut au-dessus de la rivière, je scrute le vide, où je vois tomber une feuille, et je pense à cette feuille depuis sa "naissance" et qui, là maintenant tourbillonne dans le vide.
Les expériences de vide intérieur, c'est un peu sûrement comme les expériences de mort imminente.J'ai souvent, laisser aller comme le blessé en retrait, jusqu'à l'abysse, laisser aller, plus rien, la souffrance au-delà de la souffrance, un abandon de soi, puis étonnant, il y a le lâcher de tout poids, de tout fardeau, et le rebond, une force naturelle.
On touche quelque chose qui nous renvoie naturellement à la vie. On ouvre les yeux à la surface, comme percevant un rayon de fil d'Ariane. Le soleil. Retournant à l'ordinaire, l'élémentaire du plus simple, on savoure la banalité de la vie. Rien n'est plus pareil.

Depuis le nouvel an, j'avais une peur, une anxiété réapparue à cause d'un mauvais coup de téléphone et du retour de quelqu'un, jusqu'à la boule d'angoisse dans la gorge. Grande difficulté à la faire partir, méditation assise concentrée sur l'inspir expir, marche, huile essentielle le soir.Rien à faire, ça revenait sans cesse. Alors j'ai fais une méditation allongée comme une morte, suivant ma respiration, je me suis imaginée mourir, sur mon lit de mort ou d'hôpital avec le son des appareils respiratoires, suivant inspir/expir de mon ventre. Cela allait beaucoup mieux et c'est parti dans le rire. Car je me suis mise alors à lire des contes taoistes et divers. :lol: Des fous rires. Je n'aurai pas rit de la souffrance de quelqu'un, mais le rire contre la peur... au delà de la peur c'est génial.
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Flocon
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ted a écrit :Les montagnes russes si on n'a pas peur, quel intérêt ?
Aucun ou presque, à mon avis. C'est comme avec les films d'horreur : on se fait peur pour le plaisir d'avoir peur. Après, je crois que c'est affaire de goût. Moi j'aime bien les montagnes russes et les films d'horreur, mais aux yeux des gens qui n'aiment pas, je dois passer pour stupide. :lol:

Concernant la peur de mourir, je pense moi aussi qu'elle constitue le fond de la plupart de nos peurs. Mais comme nous sommes des êtres vivants, dont le corps est constitué en sorte de produire automatiquement cette peur pour se protéger, je crains que le désir d'y échapper ne soit qu'une illusion de plus. :?:
Quand on sonde les choses, les connaissances s'approfondissent.
Les connaissances s'approfondissant, les désirs se purifient.
Les désirs une fois purifiés, le cœur se rectifie.
Le cœur étant rectifié, on peut réformer sa personne.

Kong Tseu
Jean

Katly a écrit
Depuis le nouvel an, j'avais une peur, une anxiété réapparue à cause d'un mauvais coup de téléphone et du retour de quelqu'un, jusqu'à la boule d'angoisse dans la gorge. Grande difficulté à la faire partir, méditation assise concentrée sur l'inspir expir, marche, huile essentielle le soir.Rien à faire, ça revenait sans cesse. Alors j'ai fais une méditation allongée comme une morte, suivant ma respiration, je me suis imaginée mourir, sur mon lit de mort ou d'hôpital avec le son des appareils respiratoires, suivant inspir/expir de mon ventre. Cela allait beaucoup mieux et c'est parti dans le rire. Car je me suis mise alors à lire des contes taoistes et divers. :lol: Des fous rires. Je n'aurai pas rit de la souffrance de quelqu'un, mais le rire contre la peur... au delà de la peur c'est génial.
C'est la méditation sur la mort. C'est plus pointu que la méditation générale sur l'impermanence. On y est plus impliqué personnellement. Je crois qu'on la retrouve dans toutes les écoles Bouddhistes. C'est donc une autre méditation-clef du Bouddhisme. TNH l'enseigne aussi. Je l'ai sur un CD de méditation mais elle va encore plus loin que la simple mort, elle continue sur la décomposition progressive du corps.

Elle peut être faite aussi en posture de méditation ou avant de s'endormir.

Elle permet de faire le tri de ce qui encombre la tête. Elle est assez radicale. Je l'utilise de temps en temps, rarement, quand les autres types de méditations ne marchent pas).

Il y a les visualisations tantriques moins morbides où on voit l'univers qui se fond dans le corps, le corps qui se fond dans la syllabe germe au coeur, la syllabe germe dans le bindu du coeur et le bindu qui disparait dans l'esprit/vacuité. On trouve cette médiation dans le Dzogchen ou chaque étape est accompagnée du chant HA. On peut passer plus ou moins de temps ou un temps égal de méditation sur le Bindu ou dans l'esprit mais il n'y a pas l'aspect émotionnel de "Capri, tout est fini" que l'on trouve dans la méditation sur la mort. La méditation sur la mort est une pratique sutrique. Un tantrika est supposé avoir pratiqué et pratiquer les sutras. Il a déjà pratiqué cette méditation et la pratique de temps en temps en tant que "moyen habile" ponctuel comme Tong Len.

A chanter en guise de sadhana/puja avant une méditation sur la mort. Il y aura aussi certains qui réagiront en disant : "Plutôt mourir tout de suite". Une autre manière d’entamer la méditation sur la mort.

http://www.youtube.com/watch?v=IuVwd3DsBwE
Dernière modification par Jean le 05 février 2014, 09:34, modifié 1 fois.
longchen2

Il y a également la pratique de Chö qui est préconisée pour le détachement. Je connais une forme de Chö qui n’utilise ni tambour ni trompette (si cela avait été obligatoire je ne l’aurais pas fait), et comme cela avait été transmis avec bonheur je l’avais essayé pendant un temps.
Je ne dis pas que j’en ferais ma pratique principale, car à y réfléchir c’est assez spécial, mais ma grande surprise c’est à quel point on se sent bien après ! Je ne vous mens pas !
FleurDeLotus
Dernière modification par longchen2 le 05 février 2014, 09:50, modifié 1 fois.
Katly

Ah, pour moi, c'était juste un truc que j'avais fais déjà différemment instinctivement contre l'anxiété, il y a longtemps, puis que j'ai relié à la respiration.
Dans une forêt, il y a les pourrissements...
J'ai fais quelques méditations allongées sur le côté aussi en forêt, sur l'herbe près de la rivière, où je laissais mon corps s'enfoncer dans le sol, je pensais à la terre, n'avais plus peur d'aucun insectes, immobile je regardais les roseaux balancer dans le vent qui passait sur moi comme sur l'herbe, les papillons voleter, les oiseaux furtifs et les nuages passer. Je fermais les yeux, le sourire montait, calme, tranquillité, le petit bruit de la rivière. Sans aller jusqu'à la morbidité extrême, j'étais empli de la Terre et du Ciel, de la Terre-mère, de la vie et de la mort.
Cadeau précieux de la nature. :D jap_8
Jean

J'avais oublié Chö! Butterfly_tenryu C'est une méditation très importante qui est même parfois intégrée dans d'autres sadhanas tantriques et elle est aussi très puissante.

A nouveau j'ai parlé de Tong Len; J'imaginais que si je devais perdre complétement la mémoire et me souvenir d'une seule choses, si j'avais le choix, je choisirai Tong Len.

C'est vrai qu'au départ, il est conseillé en général au débutant de se limiter à une seule pratique, et mais quand on a acquis certaine habitude à méditer on peut ponctuellement prendre une autre méditation plus adaptée aux circonstances ou essayer, expérimenter pendant un certain temps un autre type de méditation qui semble intéressant, convenir. S'aborder d'une autre manière peut permettre de contourner ou de défaire certains obstacles sur laquelle la méditation habituelle avait peu d'effets. On apprend aussi que plusieurs chemins mènent à Rome.

Évidemment cela peut être pratiqué "avec intelligence et bon sens" et aussi feeling et intuition comme cela peut être qu'un papillonnage superficiel avec les pratiques.

Une sadhana peut être vue comme un de ces morceau de musique qui amènent à un moment donné à un ou à plusieurs moments dans des espaces de paix, spirituels, mystique, etc.

Chaque sadhane est comme un morceau différent de ce type de musique.

Jouer ce type de musique est pour un musicien une sadhana. S'il est compositeur, improvisateur, c'est "sa" sadhana.

Question à poser : Un bon méditant est-il celui qui suit parfaitement une sadhana traditionnelle au pied de la lettre (corps, parole, esprit) ou celui qui est capable de créer sa propre sadhana en fonction de sa situation comme un musicien improviserait.

Il y a pour un yidam spécifique la sadhana racine et à partir de là il y a une variétés de sadhanas sur ce même yidam. Chaque grand lama a ajouté quelque chose. Il y a la sadhana écrite par tel Lama, la sadhana écrite par tel autre Lama, la sadhana écrite par un Lama qui a fait une synthèse des deux autres sadhanas et y a ajouté certaines pratiques, etc, etc au cours des siècles.

Le fait d'ajouter, synthétiser est créatif. La première fois qu'elle a été créée, cela a été une improvisation.

Tradition/Créativité. Une bon exemple seraient Yudi Manuhin et Stéphane Grapelli. Musique classique et jazz. Tous les deux immenses musiciens....et Etres Humains remarquables.

La reponse à la question serait : "les deux! Mon capitaine!"
Dernière modification par Jean le 05 février 2014, 10:28, modifié 1 fois.
Katly

Probablement, et chacun va à son rythme, fait avec ce qu'il est, dans sa voie. :)
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axiste
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Est-ce que toutes les peurs sont liées à la peur de mourir ?
Oui, beaucoup je crois aussi.
Peur de disparaître, d'être absorbée ou engloutie. D'ailleurs ces peurs existent déjà dans l'enfance et on les gère plus ou moins bien. La nuit nous avale croit-on quand on est petit. C'est difficile de s'endormir alors: lampe de poche sous les draps, on lutte, et quand la peur d'être surpris par l'autorité parentale se mêle à la peur de disparaître on souhaite presque mourir pour sortir du chaos. Finalement on s'endort assommé par nos peurs et c'est une sorte d'oubli. Quand on se réveille le matin on a du mal à y croire: tiens, je suis toujours là ! J'ai survécu ! Et on classe peu à peu les peurs dans la catégorie "histoires". Mais "histoires vraies" . On oscille entre un virtuel et le réel et au milieu on danse un peu. Comme on peut.

Après on grandit. Les ombres intérieures s'en vont peu à peu.
C'est à dire que le monde semble vaste et qu'il nous tire ailleurs.
On se lie aux autres qui deviennent des soleils ou des nuages. Le point de référence c'est toujours soi et autour le monde gravite comme des planètes étranges. Certaines explosent en pleine course et petit à petit les limites explosent. On vit les autres et leurs souffrances comme si elles étaient nôtres et c'est pas supportable: on consolide les limites qui s'effritaient doucement.
Dernier effort ultime pour maintenir son soi: mais c'est pourtant essentiel de le maintenir, on est trop petit pour se diluer autant. On est pas fou: on sait qu'on doit d'abord construire avant de détruire: son château de sable pour l'offrir à la mer, si vaste… si là.

Peu à peu ça bascule. Il n'y a pas la mer là et nous ici. C'est mélangé et les tonalités deviennent des notes de musique dans une grande partition.

Mais on a toujours un corps et ses limites. Et même si on médite, même si on prend conscience de son caractère fluctuant et énergétique, son image on peut pas s'en extraire et pourtant le temps vient sonner pour nous dire de partir.

Alors on part. Mais comme on est est toujours dans une oscillation, ça peut-être quelques voyages et quelques remises en question qui se répondent mutuellement. C'est une fuite aussi: on perd quelques affaires mais c'est pas une affaire: on devient plus léger certainement.

Mais l'attachement au corps, il est là. C'est le dernier bastion de notre vie. Je côtoie beaucoup de personnes âgées et je vois beaucoup de choses. Beaucoup de souffrances qui s'expriment en mille gammes et c'est un cri que nous partageons tous. Chaque cri est notre. Sinon, on ne l'entendrait pas.
D'ailleurs la société entière entend mais se bouche les oreilles trop souvent tellement ça résonne fort. Mais je vois aussi des personnes qui entendent et des choses bougent, tout se répond et se répand en résonances…
C'est comme de voir une personne séduisante... On peut se laisser emporter par l'attirance.. Ou on peut déconstruire cette attirance par un raisonnement précis... Et l'illusion s'en va... Mais parfois, c'est tellement agréable de rester dans l'attirance...
Oui. Comme tu dis c'est encore une histoire de "maître" peut-être. On sait des choses. On ne sait pas exprimer. Il y a tout un travail de reconnaissance.

Et puis c'est pas si simple, parce qu'on doit négocier avec des images et qu'on est pas ces images. Faut épurer, trier, ranger.

L'attirance je trouve ça plutôt bien: on reconnait beaucoup de choses en l'autre.
Mais ça n'est pas forcément physique, d'ailleurs, ça ne se joue pas sur ce plan là véritablement. Ca peut donner des manifestations physiques mais c'est pas le coeur des choses, l'essentiel c'est pas les ondulations parce que c'est au delà de la vague je crois.

Bon, si la peur est trop grande, vaut mieux pas insister.
Je ne sais pas.Comme dit Flocon :
le corps est constitué en sorte de produire automatiquement cette peur pour se protéger, je crains que le désir d'y échapper ne soit qu'une illusion de plus.
Katly on partage des corniches !

love2 Les expériences de vide intérieur, c'est un peu sûrement comme les expériences de mort imminente.J'ai souvent, laisser aller comme le blessé en retrait, jusqu'à l'abysse, laisser aller, plus rien, la souffrance au-delà de la souffrance, un abandon de soi, puis étonnant, il y a le lâcher de tout poids, de tout fardeau, et le rebond, une force naturelle.
On touche quelque chose qui nous renvoie naturellement à la vie. On ouvre les yeux à la surface, comme percevant un rayon de fil d'Ariane. Le soleil. Retournant à l'ordinaire, l'élémentaire du plus simple, on savoure la banalité de la vie. Rien n'est plus pareil. love2


Merci à tous pour vos mots
( le fil a un peu glissé je crois bien) oiseau2julie
Cinq clefs pour la parole correcte :
- dire au bon moment, prononcer en vérité, de façon affectueuse, bénéfique et dans un esprit de bonne volonté."
Jean

Flocon a écrit
Le corps est constitué en sorte de produire automatiquement cette peur pour se protéger, je crains que le désir d'y échapper ne soit qu'une illusion de plus.
On peut dire qu'il y la peur animale, l'instinct de survie c'est dans les génes et la peur psychologique de l'ego de disparaitre . Les deux sont liées et toutes deux sont très profondes, c'est pour cela qu'elles sont difficiles éradiquer.
ted

Katly a écrit :Enfant, je passais de ma chambre à celle de mon frère par la corniche de l'immeuble au 9ème étage d'une tour pour lui faire des surprises. :D Un jour, très sûre de moi, j'ai trouvé la fenêtre bien fermée. L'effroi m'avait saisit, léger chancellement. Je me suis dite que j'allais tombé bêtement et mourir bêtement que ma vie n'était rien, qu'elle n'était pas à moi, à ma famille, c'était ainsi, j'allais tomber dans le vide. Mais je n'ai jamais recommencé. :D
On peut marcher sans peur sur un trottoir. C'est le cas en général. Mais sur une corniche qui ferait la même largeur que le trottoir, à 50 mètres au-dessus du sol, là, la peur s'invite. Et c'est elle qui va nous faire tomber. Pas le vide, ni la corniche. Simplement, notre peur qui va faire trembler nos jambes au moment ou justement, il ne faut pas qu'elles tremblent.

C'est terrible de voir cette personnalité que nous chérissons tant, que nous nourrissons de plaisirs nombreux, nous trahir au plus mauvais moment...
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