La souffrance est-elle justifiée ?

ted

Je pensais qu'il y avait clairement deux voies, une voie chrétienne, doloriste, où on souffrait avant de trouver la rédemption. Où la souffrance était parfois accueillie et bienvenue comme étant méritée. Où il était bien vu de revivre la passion du Christ, voire ses stigmates.

Et une voie bouddhiste où la souffrance pouvait-être abandonnée d'un seul coup, à la vision/compréhension d'une Félicité Plus Grande.

Or, je tombe régulièrement sur des textes qui donnent des exemples de personnes vertueuses, ayant réalisé qu'il existe une Grande Paix, une Grande Joie, une Grande Clarté, mais qui doivent, malgré tout, subir des situations désagréables, parce qu'elles avaient encore parait-il, un reste de karma à brûler ! :shock: (exemple : angulimala)

Et dans les deux cas, chrétiens ou bouddhistes, ceux qui souffrent à ce stade gardent le sourire et ont l'air heureux de franchir cette épreuve ultime ! :shock:

La souffrance est-elle donc un point de passage obligé avant d'être libéré définitivement ?

Alors, le vén. Aṅgulimāla, demeurant seul, reclus, attentif, vigilant, ardent et résolu, en un rien de temps atteint et demeura dans le but de la vie sainte pour laquelle les hommes de clan quittent à bon droit la vie domestique pour vivre sans domicile fixe, sachant et réalisant pour eux-mêmes dans l'ici et maintenant : "La naissance est finie, la vie sainte est remplie, la tâche est accomplie. Il ne reste rien pour moi en ce monde." C'est ainsi que le vén. Aṅgulimāla devint l'un des arahants.

Alors, le vén. Aṅgulimāla, tôt le matin, ayant mis ses robes et portant son bol, se rendit demander l'aumône à Sāvatthi. Alors, ce jour-là, une motte de terre jetée par quelqu'un l'atteignit sur son corps, une pierre jetée par quelqu'un d'autre aussi, et un tesson jeté par une troisième le toucha encore.

Le vén. Aṅgulimāla — la tête ouverte et dégoulinante de sang, et sa robe de dessus mise en pièces — se rendit alors auprès du Bhagavā. Ce dernier le vit venir de loin et lui dit: "Tiens bon, brahmane! Tiens bon! Le fruit du kamma qui t'aurait fait brûler en enfer pendant de longues années, de longues centaines d'années, voire de longs milliers d'années, tu le vis dans l'ici et maintenant!"


Alors, le vén. Aṅgulimāla, s'étant isolé en réclusion, ressentit le bonheur de la libération.

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jules
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Je pense au fait de souffrir de souffrir, qui serait évaluation de la souffrance, désignation de choses particulières, de sensations identifiées et refusées pour ce qu'elles sont.

Il y aurait avoir le visage en sang et le fait de ne pas l'accepter, ajoutant une souffrance à la souffrance, attitude que nous pourrions peut-être nommer insatisfaction, non acceptation de ce qui est.

Nous pouvons nous exonérer de souffrir de souffrir et le réaliser, c'est proprement à mon sens justifier la souffrance en acceptant qu'elle soit là puisque c'est notre karma, ce qui dévoile une attitude psychologique de lâcher prise quant à ce qui doit être parce que cela est.

Et c'est bien l'être psychique qu'il s'agit de sauver dans le bouddhisme. Le karma lui, suit son cours et c'est une chose qui nous échappe, exactement comme le fait de tourner au coin d'une rue et de rencontrer la mort nous échappe, ou comme le pourquoi de nos pensées grossières au sujet de Barbapapa nous échappe.
Robi

ted a écrit :Je pensais qu'il y avait clairement deux voies, une voie chrétienne, doloriste, où on souffrait avant de trouver la rédemption. Où la souffrance était parfois accueillie et bienvenue comme étant méritée. Où il était bien vu de revivre la passion du Christ, voire ses stigmates.

Et une voie bouddhiste où la souffrance pouvait-être abandonnée d'un seul coup, à la vision/compréhension d'une Félicité Plus Grande.
Pour moi ce que tu dis là est une vue pas tout à fait exacte à la fois du christianisme et du bouddhisme.
Il faut dire que lorsque que l'on rentre dans ce domaine (souffrance/bonheur) qui est le nœud de l'existence humaine et des religions il est difficile de faire court et d'être juste à la fois.

Il n'y a de dolorisme dans le christianisme que pour celui qui le veut bien quelque part. Car pour un chrétien dès qu'il est converti il entre dans la suite du Christ et de sa Résurrection, il ressuscite avec lui. Or réssusciter avec le Chris c'est tout le contraire de la souffrance, c'est connaître le Royaume ici et maintenant ("Le Royaume est au milieu de vous") ou entrer dans la Vie éternelle (la Vie éternelle étant la vie en plénitude).
Quant au bouddhisme, tu parles de souffrance abandonnée d'un seul coup mais pour combien de temps? Etre complètement et parfaitement éveillé est exceptionnel au commun des mortels (le dernier en date c'est Shakiamuni Bouddha).
ted a écrit :Et dans les deux cas, chrétiens ou bouddhistes, ceux qui souffrent à ce stade gardent le sourire et ont l'air heureux de franchir cette épreuve ultime ! :shock:
La souffrance est-elle donc un point de passage obligé avant d'être libéré définitivement?
Comment voudrais-tu vouloir te libérer de quelque chose sans connaître ce quelque chose??
Dernière modification par Robi le 18 avril 2014, 11:27, modifié 1 fois.
ted

J'ai pas vu beaucoup de chrétiens ressusciter. C'est une façon de parler je crois, n'est-ce pas ?
Si mes souvenirs sont bons, tous les justes ressuscitent à la fin des temps, avec un corps parfait (la résurrection de la chair).

Si Theravada s'accorde à dire qu'il n'y a qu'un seul Bouddha avec un éveil Complet, Parfait et Sans Supérieur, par ère, ce n'est pas le cas du Mahayana qui admet une multitude de Bouddhas (aussi innombrables que les sables du Gange). Pour simplifier, le Mahayana vise la bouddhéïté là où Theravada ne vise que nibbana. Or, il n'est pas nécessaire d'atteindre l'Eveil Complet Parfait et sans Supérieur pour mettre fin à la souffrance. Taper dans nibbana ne serait-ce qu'une fois, suffit . Même avec résidus. C'est à dire que nous pouvons mettre fin à la souffrance de notre vivant. Et le chemin pour y arriver est bien connu, que ce soit pour le Theravada que pour le Mahayana (pour qui nibbana n'est qu'une étape). Ce n'est pas du tout un objectif inaccessible. En tout cas, ce n'est pas ce que disent les maîtres.
Robi a écrit :Passage obligé? Si il y avait un autre passage ça se saurait depuis longtemps...
Comment voudrais-tu vouloir te libérer de quelque chose sans connaître ce quelque chose??
Donc, tu penses que oui ? :roll:
C'est dommage que tu aies effacé ta précédente réponse (celle que j'ai barrée), parce qu'elle avait le mérite d'ouvrir une porte à une alternative possible.

Le Bouddha a d'abord proposé une Voie de libération de la souffrance, il y a 2500 ans. Puis le Christ en a proposé une autre, il y a 2000 ans. Pourquoi ne pas supposer que d'autres Voies sont possibles ? Qu'un jour, un scientifique, un philosophe, ou un religieux, découvrira quelque chose d'ignoré de tous ? Ou quelque chose chose que ni Bouddha, ni Jésus n'ont voulu nous enseigner ? Après tout, le Bouddha a donné trois types d'enseignements distincts.

Mais pour en revenir à ta seconde réponse, elle est d'une sagesse glacée parce qu'elle montre bien que même quand nous pensons être heureux, nous baignons dans dukkha (1ère noble vérité). Et cette vérité là est très dure à accepter et à énoncer. Donc, bravo. jap_8
Robi

ted a écrit :J'ai pas vu beaucoup de chrétiens ressusciter. C'est une façon de parler je crois, n'est-ce pas ?
Tu as vue des bouddhistes renaître?
ted a écrit :Si mes souvenirs sont bons, tous les justes ressuscitent à la fin des temps, avec un corps parfait (la résurrection de la chair).
Non non je t'assure les chrétiens dont déjà ressuscités une première fois de leur vivant avec le Christ.

Frères, vous êtes ressuscités avec le Christ
Paul aux Ephésiens
ted a écrit :Si Theravada s'accorde à dire qu'il n'y a qu'un seul Bouddha avec un éveil Complet, Parfait et Sans Supérieur, par ère, ce n'est pas le cas du Mahayana qui admet une multitude de Bouddhas (aussi innombrables que les sables du Gange).
Ces bouddhas n'en ont pas fini définitivement avec la souffrance...

ted a écrit :Le Bouddha a d'abord proposé une Voie de libération de la souffrance, il y à 2500 ans. Puis le Christ en a proposé une autre, il y a 2000 ans. Pourquoi ne pas supposer que d'autres Voies sont possibles ? Qu'un jour, un scientifique, un philosophe, ou un religieux, découvrira quelque chose d'ignoré de tous ? Ou quelque chose chose que ni Bouddha, ni Jésus n'ont voulu nous enseigner ? Après tout, le Bouddha a donné trois types d'enseignements distincts.
:lol: Ce scientifique pour te libérer de la souffrance il faut bien que tu l'a connaisses....
ted a écrit :Mais pour en revenir à ta seconde réponse, elle est d'une sagesse glacée parce qu'elle montre bien que même quand nous pensons être heureux, nous baignons dans dukkha (1ère noble vérité). Et cette vérité là est très dure à accepter et à énoncer. Donc, bravo. jap_8
Pourquoi sagesse glacée? En voilà des mots bizaroïdes..
Le Bouddha dit la vie est souffrance , le Bouddha a donc une sagesse glacée selon toi.
J'en prends note. :lol:
Dernière modification par Robi le 18 avril 2014, 11:42, modifié 1 fois.
ted

Mais tu as bien compris ce que je veux dire : ba16 :D Il y a la souffrance que nous ressentons directement.
Et il y a la souffrance larvée, potentielle, structurelle. Celle qui nous guette pendant nos moments de bonheur.
Cette souffrance là est latente.
Sommes-nous obligés de passer par le stade patent ?
Doit-elle forcément s'actualiser ? Comme une sorte de dû ?
Robi

ted a écrit :Mais tu as bien compris ce que je veux dire : ba16 :D Il y a la souffrance que nous ressentons directement.
Et il y a la souffrance larvée, potentielle, structurelle. Celle qui nous guette pendant nos moments de bonheur.
Cette souffrance là est latente.
Sommes-nous obligés de passer par le stade patent ?
Doit-elle forcément s'actualiser ? Comme une sorte de dû ?
ba16 toi-même
longchen2

Robi a écrit :(...) Car pour un chrétien dès qu'il est converti il entre dans la suite du Christ et de sa Résurrection, il ressuscite avec lui. Or réssusciter avec le Chris c'est tout le contraire de la souffrance, c'est connaître le Royaume ici et maintenant ("Le Royaume est au milieu de vous") ou entrer dans la Vie éternelle (la Vie éternelle étant la vie en plénitude).(...)
C'est assez proche d'une pratique tantrique où tout est perçu comme la Terre Pure de tel ou tel Bouddha, ici et maintenant.
FleurDeLotus
ted

Pour tenir compte des remarques, je reformule donc la question :

  • En complément de la souffrance "latente", "potentielle", et "structurelle" du monde,
    la souffrance "patente", "concrète", "actualisée", "vécue", "endurée" est-elle un point de passage obligé avant d'être libéré définitivement ?
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