C'est terrible !

ted

Vous rendez-vous compte que personne, je dis bien personne, ne saura jamais ce qu'on pense, ce qu'on souffre, ce qu'on ressent au plus profond de nous-mêmes ?

Quelle terrible solitude !

De là à s'inventer une présence omnisciente qui saurait tout de nous, histoire de se sentir moins seul, il n'y a qu'un pas...
Compagnon

ted a écrit :Vous rendez-vous compte que personne, je dis bien personne, ne saura jamais ce qu'on pense, ce qu'on souffre, ce qu'on ressent au plus profond de nous-mêmes ?

Quelle terrible solitude !

De là à s'inventer une présence omnisciente qui saurait tout de nous, histoire de se sentir moins seul, il n'y a qu'un pas...
Est ce que je pense est à chacun instant fondamentalement différent de toutes les autres pensées de tous les autres êtres humains à cet instant ?
Est ce que ma souffrance en cet instant est fondamentalement différente de la souffrance de tous les autres êtres humains en ce instant ?
Est ce que ce que je ressens en cet instant est fondamentalement différent de tout ce que ressentent tous les êtres humains en cet instant précis ?
Suis je vraiment si seul ? Ou est une vue qui n'est peut être pas aussi correcte que cela de la réalité ?

La solitude qui tu énonce je crois n'existerait en réalité que si :
- l'empathie et la sympathie n'existaient pas.
- nous étions tous complètement coupés de toute forme de communication avec nos voisins.

Ce sentiment de solitude n'est ce pas une autre façon qu'a l'ego de faire croire en son existence en nous donnant l'illusion d'être unique, indépendant des autres et donc... terriblement seul ?

Et c'est un être qui, du fait de son profil mental particulier, à de bonne raisons de se sentir encore plus seul que la masse des gens "normaux" dirons nous... qui te parle.
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Circé
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Coup de blues, Ted????

J'ai ressenti cette impression de solitude dans mes premiers contacts avec le bouddhisme. Maintenant c'est l'inverse, je me sens connecté à tout, à tous.Compagnon l'a bien exprimé.
Ta souffrance, ta solitude, ton ressenti, ce sont les nôtres.
ted

On se doute qu'ils souffrent, mais on ne sait rien de leur souffrance, de son intensité, de sa profondeur. La preuve ? Bé les autres ne réagissent pas pareil pour un traumatisme donné. Certains rebondissent, d'autres restent indifférents, d'autres encore s'effondrent.

La communication ? Laisse moi rire. Entre les quiproquos, les tentatives de manipulation, la mauvaise foi... On a vite fait de se taire pour moins souffrir... :)

La sympathie ? l'empathie ?? Comment savoir qu'on ne se fait pas un film, vu que comme je l'ai dit, on ne saura JAMAIS ce qu'il y a au fond des autres ???!!! Même les autres doivent pratiquer vipassana pour savoir ce qu'il y a au fond d'eux ! donc eux-mêmes n'en savent rien au départ.

"J'ai beaucoup appris sur moi-même " diront certains.
Au final, tu t'aperçois que tout ce que t'as appris sur toi même, c'était du VENT !!! Ya aucun toi même. :shock:

On découvre simplement comment des déterminismes se sont tricotés pour monter des oeufs en neige et créer une personne inexistante qui se prend pour quelqu'un. Mais l'illusion est aussi concrète qu'un arc-en-ciel. Et on peut la prendre en photo, comme l'arc-en-ciel.

Donc, vivre sans être éveillé, c'est TERRIBLE ! C'est même horrible ! C'est une souffrance insupportable, car vide ! Issue de rien. Une souffrance qui se manifeste simplement parce qu'on pense qu'elle devrait exister. Un véritable cauchemar !!!
ted

Circé a écrit :Coup de blues, Ted????
Non...
Tristesse de s'ouvrir pour se relier à des autistes, aveugles, sourds et muets...
Si Dieu existe, imaginez sa solitude ! N'avoir personne à qui parler !
On ne peut que finir schizophrène. On se parle à soi-même.
L'éveil ou la schizophrénie... C'est ça le programme du chercheur spirituel.
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Circé
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Bien sûr c'est horrible de vivre sans être éveillé. C'est ça la souffrance, Ted, tu y es en plein. On dirait que tu viens de le découvrir......C'est pour nous tirer de là que Bouddha se décarcasse.
Compagnon

On se doute qu'ils souffrent, mais on ne sait rien de leur souffrance, de son intensité, de sa profondeur. La preuve ? Bé les autres ne réagissent pas pareil pour un traumatisme donné. Certains rebondissent, d'autres restent indifférents, d'autres encore s'effondrent.

Tous les lotus sur l'étang n'ont pas la même forme, la même taille, la même couleur, ne sont pas aussi en fleur les uns par rapport aux autres et pourtant se sont tous des lotus, qui flottent sur l'eau et trempent leurs racines dans la même boue.

La communication ? Laisse moi rire. Entre les quiproquos, les tentatives de manipulation, la mauvaise foi... On a vite fait de se taire pour moins souffrir... :)

C'est une solution en effet mais cela sous entend que l'on croit qu'il n'existe personne de spontané et de sincère. Que chacun se maîtrise au point d'avoir un contrôle parfait de ses émotions et que toute expression, tout communication, est systématiquement parfaitement calculée, artificielle et non naturelle. Peu probable. Prend la video d'une femme pleur hurlant de douleur et de chagrin avec dans ses bras le corps de sont enfant qui vient de mourir. Si toi même tu es parents tu as une petite idée de ce qu'elle ressens précisément en cet instant. Ou elle l’hypocrisie ou la manipulation a ce moment là ?
Avant d'avoir un fils je ne pouvais pas savoir du tout ce que l'on pouvait ressentir, maintenant j'en ai davantage l'idée.

La sympathie ? l'empathie ?? Comment savoir qu'on ne se fait pas un film, vu que comme je l'ai dit, on ne saura JAMAIS ce qu'il y a au fond des autres ???!!! Même les autres doivent pratiquer vipassana pour savoir ce qu'il y a au fond d'eux ! donc eux-mêmes n'en savent rien au départ.

La contagion émotionnelle est un phénomène reconnue, peur, haine, colère, joie, sont communicatifs. Regarde les gradins d'un stade de foot pendant ne match quand tel ou tel équipe gagne, la réaction des supporters.

"J'ai beaucoup appris sur moi-même " diront certains.
Au final, tu t'aperçois que tout ce que t'as appris sur toi même, c'était du VENT !!! Ya aucun toi même. :shock:


A 25 ans j'ai fait une profonde dépression nerveuse pour raison sentimentale, effondrement total de l'ego au sens psychanalytique du terme, je me suis haïe moi même au point de m'effondrer, j'ai mis plus d'un an et demi à m'en remettre.
A la fin de cette periode, je venais juste de me seuvrer des dernier médocs, j'allais plutôt bien, je revivais, euphorique. J'avais envie d'être sympa avec tout le monde, je voyais des coïncidences partout. Et j'ai entamé un boulot ou je suis tombé sur un responsable très pénible, j'ai de nouveau beaucoup souffert car je n'osais pas lui dire ne face un bon gros : merde ! Un soir seul dans mon lit (j'étais encore croyant) en proie au chagrin, un sentiment profond d'injustice, je venais de sortir d'une grosse souffrance pour retomber dans une autre. J'ai en pleur, seul dans mon lit, dans mon petit studio. J'ai demandé à Dieu pourquoi ? Pourquoi encore souffrir. J'ai alors essayé de relativisé, je me suis dis qu'il devait y avoir plein d'autres gens qui souffraient autant si ce n'est plus que moi dans le monde en ce moment. Et... je l'ai ressenti. Je n'ai pas d'autre explication. Pendant un bref instant j'ai était "écrasé" par une masse de souffrance qui m'était étrangère. Ce fut bref. Heureusement. Mais je n'ai pas oublié.
Donc non, d'expérience personnelle, je ne peux que t'affirmer qu'aucun de nous n'est seul. Nous sommes tous interdépendants. Nos joies, nos peines, sont collectives. D'ailleurs n'est ce pas ce que dit la pratique ? Le bonheur individuel est impossible on ne peut trouver le Bonheur véritable que si l'on cherche aussi a faire le bonheur des autres. Les bonheur égoïste ne marche pas. Et si cela ne marche pas... c'est qu'aucun de nous n'est seul.

Donc, vivre sans être éveillé, c'est TERRIBLE ! C'est même horrible ! C'est une souffrance insupportable, car vide ! Issue de rien. Une souffrance qui se manifeste simplement parce qu'on pense qu'elle devrait exister. Un véritable cauchemar !!!

Si tu veux voir le samsara ainsi pourquoi pas. Mais c'est un cauchemard utile. Sans lui il n'y aurait pas le merveilleux "rêve" de l'Eveil. Sans la souffrance il n'y a pas la cessation de la souffrance. Pas de nirvana sans samsara. Ressentir répulsion pour le samasara et avidité pour le nirvana est encore un dualisme... source de souffrance.

Ai de la compassion pour toi et pour les autres. Car nous tous nous vivons en souffrance. Prend soin de toi et des autres avec douceur et tendresse. Plus tu te croira seul plus le poids de la souffrance sera grand en toi car tu réduira ton univers au limites de ton ego. Et la moindre petite souffrance prendra alors une ampleur et un impact immense. (Je paraphrase le Dalaï Lama). Cesse de penser que Toi et l'Autre êtes différents et indépendants.

Non...
Tristesse de s'ouvrir pour se relier à des autistes, aveugles, sourds et muets...
Si Dieu existe, imaginez sa solitude ! N'avoir personne à qui parler !
On ne peut que finir schizophrène. On se parle à soi-même.
L'éveil ou la schizophrénie... C'est ça le programme du chercheur spirituel.


Si je devais parlé comme un bouddhiste tibétain je dirais qu'en ce moment tu es la proie d'un démon puissant du désespoir.

Tu sais quoi ? Je crois là en ce moment d'une certaine façon tu affronte Mara sous une forme ou une autre. Ouvre les yeux et reconnait le pour ce qu'il est : une illusion.

Un remède ? Va sur youtube et cherche des choses comme des scènes de souffrances intenses d'autre personnes dans le monde, et pensent à elle avec tendresse, amour, tu verras alors que tes angoisses du moment sont d'une petitesse risible au regard de ce qu'endurent dans le monde en ce moment certaines personnes.

Tu peux aussi plus positivement lister tout ce que Thich Nath Hanh appelle les "éléments de bonheur disponibles" autour de toi là maintenant, quand je suis déprimé c'est ce que je fais.

Méditation sur le non soi, méditation sur la vacuité.

Le Marchand de Venise

Tirade de Shylock, riche usurier juif :

« Un Juif n'a-t-il pas des yeux ? Un Juif n'a-t-il pas des mains, des organes,
des dimensions, des sens, de l'affection, de la passion ; nourri avec
la même nourriture, blessé par les mêmes armes, exposé
aux mêmes maladies, soigné de la même façon,
dans la chaleur et le froid du même hiver et du même été
que les Chrétiens ? Si vous nous piquez, ne saignons-nous pas ?
Si vous nous chatouillez, ne rions-nous pas ? Si vous nous empoisonnez,
ne mourons-nous pas ? Et si vous nous bafouez, ne nous vengerons-nous pas ?
Si nous sommes semblables à vous en tout le reste, nous vous ressemblerons aussi en cela. »


— acte III, scène 1


Solitude : Du latin solitudinem, accusatif de solitudo, de solus, « seul ».
(Figuré) Sentiment d'être seul ou abandonné.

Seul : Du latin solus.
Qui est sans compagnie ; qui n’est pas avec d’autres.
À l’exclusion de tout autre ; unique.

Sentiment de solitude : manifestation aiguë du moi. Évident non ?
Moi indépendant : illusion.
Solitude : sentiment basé sur une illusion.
ted

Circé a écrit :Bien sûr c'est horrible de vivre sans être éveillé. C'est ça la souffrance, Ted, tu y es en plein. On dirait que tu viens de le découvrir......C'est pour nous tirer de là que Bouddha se décarcasse.
Oui, tu as raison Circé... Je suis pas très net là ... peut-être un peu de tristesse... :roll:

Merci Compagnon pour tes conseils. Mais peut-on vraiment hiérarchiser les souffrances ? Après tout, des personnes se suicident aussi dans les pays riches, avec des parents riches etc...

Même si j'ai un coup de blues, ce que j'ai dit au début me semble quand même exact. A savoir que : ...personne ne saura jamais ce qu'on pense, ce qu'on souffre, ce qu'on ressent au plus profond de nous-mêmes

J'ai dit "au plus profond ".
On peut toujours imaginer, par empathie, sur la base de ce qu'on ressent déjà. Oui Compagnon.
Mais comment imaginer une souffrance qu'on a jamais ressentie soi-même ?

Comment un homme pourrait-il ressentir la souffrance d'une femme qui aura fait une fausse couche après avoir senti son bébé lui donner des coups de pieds ?

Comment partager l'horreur et le dégoût d'un viol si on n'a jamais été violé soi-même ?

Comment comprendre la solitude si on n'a jamais été totalement incompris soi-même ?

La souffrance n'est t'elle pas d'autant plus grande quand on a cru pouvoir y échapper ? :-(
Compagnon

peut-on vraiment hiérarchiser les souffrances ?

Une écharde dans le pied et un pétard qui te fais explosé la main .... c'est kif kif pour toi ?

Etre agacé d'avoir loupé son bus et de devoir poiroté sous la pluie pendant 10 minutes pour avoir le prochain et être trahi par son meilleur ami c'est kif kif pour toi ? Question ressenti ? C'est au même niveau ?

...personne ne saura jamais ce qu'on pense, ce qu'on souffre, ce qu'on ressent au plus profond de nous-mêmes

Est c'est quoi "nous-même" si ce n'est une autre expression de JE, de MOI.

Tu sous entend que les émotions de chacun sont uniques, impartageable, incomparables, cela nous ramène à l'illusion du "soi" séparé et indépendant du reste.

Si tu étais a coté de moi, je te ferais bien une leçon de zen bien directe, sans prévenir je te collerais une gifle bien brutale, et je te dirais : tu ressens quoi là ? Douleur ? Colère ? Incompréhension ? Envie de me la rendre non ?
Et j'ajouterais : mets m'en une. (Tu le ferais)
Je ressens la même chose : douleur, colère et une furieuse envie de te la rendre.
Donc tu es toujours sûre qu'au fond on ne peut pas comprendre le ressenti de l'autre ?

Je peux aussi t'insulter ici et maintenant, je pense pouvoir appuyer là ou cela fait mal, te vexer. Et si j'y arrive cela signifie que je suis capable de ressentir ce que tu ressens. On teste ? XD

Mais comment imaginer une souffrance qu'on a jamais ressentie soi-même ?

Raisonnablement, honnêtement on ne peut pas, enfin peut être un Éveillé si... toutefois... Il y a bien plus de sortes de souffrances communes à tous que de types de souffrances que seule une minorité expérimente.

Et les souffrances de base sont communes à tous : naître, subir maladie, vieillesse, mort. Ça tout le monde le partage.

Comment un homme pourrait-il ressentir la souffrance d'une femme qui aura fait une fausse couche après avoir senti son bébé lui donner des coups de pieds ?

Comment partager l'horreur et le dégoût d'un viol si on n'a jamais été violé soi-même ?

Comment comprendre la solitude si on n'a jamais été totalement incompris soi-même ?


On me rappel parfois que je "pense" trop , que je cherche trop à "comprendre". Je te dis la même chose : il n'est pas forcément nécessaire de parfaitement comprendre l'autre pour l'aider dans sa souffrance, déjà l'écouter en pleine conscience quand il parle de sa souffrance, quand il l'exprime, c'est déjà une aide. Tu sais certains profonds réconforts se passent de mots. Parfois il n'est pas besoin de parler et de comprendre intellectuellement la souffrance de l'autre pour être efficace, il suffit juste de lui ouvrir les bras et de la tenir contre soi pendant qu'elle pleure.

Quand j'ai connu ma compagne, elle venait de perdre sa mère d'un cancer du sein, quand elle était adolescente elle avait perdu son père d'un cancer aussi. J'étais incapable de ressentir ce qu'elle éprouvait. J'en étais conscient, est ce que cela m'a empêché de la sérrer dans mes bras pendant ses coups de blues ? Non. Et d'avoir quelqu'un auprès d'elle l'a aidé à ce moment là. Et elle m'a aussi aidé à sa façon dans ma souffrance pour des choses que pourtant elle ne pouvait comprendre faute de les avoir vécu. Il y a un très bel enseignement de thich Nhat Hanh qui s'appelle "les 4 mantras". Tu peux y aller voir, il est sur youtube, peut être cela t'apportera quelque chose.


Comment comprendre la solitude si on n'a jamais été totalement incompris soi-même ?

Tu te contredis puisque tu dis plus haut que personne ne peut comprendre au fond personne :) Donc tout le monde est forcément totalement incompris, donc tout le monde peut comprendre le fait d'être incompris puisque chacun est incompris :)

La souffrance n'est t'elle pas d'autant plus grande quand on a cru pouvoir y échapper ? :-(

La récompense (nirvana) est d'autant plus précieuse que l'épreuve (samsara) est ardue. Ni plus ni moins.
Dernière modification par Compagnon le 22 mars 2017, 21:15, modifié 2 fois.
ted

La perte de l'omniscience est une souffrance terrible !
Elle débouche sur l'ignorance, source de tous nos malheurs.
Les bouddhas sont omniscients. C'est pourquoi ils ne souffrent pas.
La communication ne peut exister qu'à travers l'ignorance. Donc, la communication est pure souffrance.

Comment avons nous pu perdre notre omniscience ?
Comment une telle horreur a t'elle pu se produire ? :shock:
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