Polir la tuile pour en faire un miroir

Kaïkan
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Bonjour,

Ce sujet est tiré du blog de Yudo Proulx, maître zen à Montpellier.

Maître Nangaku alla trouver Baso et lui demanda : Or donc, grand moine, quelle est votre intention quand vous pratiquez zazen?

Baso Do-itsu lui répondit: Je veux devenir un bouddha.

Nangaku Ejo ramassa un morceau de tuile et se mit à le polir sur une pierre, face à l'entrée de la hutte de Baso.

Baso Do-itsu dit: Maître, que faites-vous là?

Nangaku Ejo répondit: Je polis cette tuile pour en faire un miroir.

Baso Do-itsu dit:Comment pensez-vous faire un miroir en polissant une tuile?

Nangaku Ejo répondit: Comment pouvez-vous penser devenir un bouddha lorsque vous pratiquez zazen?

Baso Do-itsu dit: Que faudrait-il donc faire?

Nangaku Ejo répondit: Lorsqu'un homme voyage en charrette , si la voiture n'avance pas, que doit-il faire? Frapper la charrette ou frapper le bœuf qui la tracte?

Baso Do-itsu ne sut que répondre.

Nangaku Ejo enseigna en plus: Apprendre zazen, c'est apprendre que vous êtes un bouddha en zazen. Lorsque vous apprenez zazen, c'est différent du comportement quotidien, tel s'asseoir ou se coucher. Cependant, lorsque vous apprenez que vous êtes un bouddha en zazen, ce bouddha est au-delà de toute forme fixe.

Nangaku Ejo dit: Dans l'Univers, il ne faut pas préférer le bien ou le mal à l'instant présent. Lorsque vous pratiquez l'être bouddha en zazen, vous vous débarrassez inévitablement du concept de bouddha. S'attacher à la forme de s'asseoir, c'est ne pas avoir compris parfaitement le principe de zazen.

En entendant cet enseignement du maître, Baso se sentit comme s'il avait bu un doux nectar.
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Commentaire de Nishijima roshi

On interprète en général ce kôan dans le sens qu'il ne serait pas possible de devenir un bouddha juste en pratiquant zazen. Mais l'interprétation de maître Dôgen est assez différente. C'est l'idée de devenir intentionnellement qu'il attaque. Lorsqu'une personne est assise en zazen, elle est d'emblée un bouddha. Elle ne peut pas re-devenir un bouddha. Le polissage n'est pas la fabrication d'un miroir, elle n'est que l'action de polir -- l'action d'un bouddha.

Qu'est-ce que cela veut dire qu'on est un bouddha lorsqu'on est assis en zazen? Assis en zazen, nous faisons directement face à la réalité. Nous affrontons nos pensées, nos émotions et l'inconfort (physique et mental). Nous constatons également que la réalité est bien davantage que des pensées ou que le corps.

Voilà qui est difficile à observer, en particulier pour les débutants. Lorsqu'ils sont assis, ce qu'ils ressentent habituellement est douleur et ennui, ce qui s'éloigne beaucoup de l'image idéalisée qu'ils se font de l'Eveil ou de la bouddhéité. Cependant, cette souffrance et cet ennui sont leur réalité.

Au cours de notre vie quotidienne, nous faisons de grands efforts pour échapper à cet aspect de la réalité ou pour le balayer sous le tapis. En zazen, nous l'affrontons directement. On ne peut y échapper; il faut le vivre et en faire l'expérience. La réalité n'est pas que souffrance et ennui, il existe bien d'autres aspects de la réalité différents et bien plus profonds encore. On les affronte eux-aussi en zazen, mais on les affronte tels qu'ils surgissent naturellement d'eux-mêmes.

Les images que notre intellect s'est formé de l'éveil ne pourront en aucun cas accélérer ce processus. L'intellect lui-même n'est rien d'autre qu'un mince couche superficielle à la surface d'un océan de la réalité du corps/esprit qui est bien plus profond.

Maître Baso demande ensuite ce qu'il doit faire et maître Nangaku se sert de la parabole du char à boeufs. Si le boeuf est rétif, on peut le faire avancer en le frappant, mais si la roue du char est coincée, on pourra battre le boeuf tant qu'on voudra, cela ne fera pas avancer la voiture. Nous devons être attentifs à la réalité de la situation et ne pas projeter nos idées préconçues dessus.

Le boeuf représente l'esprit ou les facteurs mentaux. Le char représente le corps ou les facteurs matériels. L'idéaliste ne pense qu'à aiguillonner le boeuf. Il ignore le char, jusqu'à ce que, peut-être, un jour celui-ci perde une roue et le renverse dans la boue.

Le matérialiste ne pense qu'au char. Il le veut peut-être joli et rapide, ou encore le décorer d'or et de pierres précieuses tout en laissant le boeuf mourir de faim, de telle sorte que son beau char ne puisse plus bouger.

Zazen est la pratique du corps/esprit, de l'être tout entier. Le bouddhiste tend à être à la fois le boeuf et le char.

Maître Nangaku poursuit en expliquant la différence entre Zazen et le comportement quotidien. Il explique ce que signifie apprendre zazen : c'est-à-dire apprendre que nous sommes un bouddha en zazen. Il insiste sur la différence entre zazen et le comportement ordinaire, que sont par exemple s'asseoir et se coucher. En quoi est-ce différent? Dans notre vie de tous les jours, nous sommes habituellement liés par des pensées. Nous avons du mal à voir la réalité à cause de ces pensées. En zazen, on coupe à travers les nuages de pensées qui obscurcissent le paysage.

D'autre part, zazen est également différent de nos états de relaxation habituels, en ce qu'il maintient une certaine tension physique et une certaine attention mentale. Maître Nangaku veut établir cette distinction entre zazen et notre vie de tous les jours parce qu'il y avait, et qu'il y a encore, des bouddhistes qui soutiennent que la conduite de notre vie quotidienne n'est pas différente de zazen. Et il est vrai qu'ils sont la même chose en ce qu'ils existent tous deux dans la réalité elle-même, mais au cours de notre vie quotidienne c'est bien plus difficile, et pour la plupart des gens, impossible, de voir avec clarté la réalité.

En zazen, nous sommes assis dans la réalité et en faisons directement l'expérience d'une façon qui ne se produit que bien rarement dans notre vie de tous les jours. Celle-ci se trouve progressivement modifiée par cette expérience. Quand nous sommes assis en zazen, nous sommes des bouddhas. Un bouddha en zazen n'a pas de forme fixe. Il peut être grand et blond, petit et gros, cela peut être un athlète, une vieille femme, un ado. De plus, un bouddha en zazen a plusieurs états: paisible, serein, distrait, ennuyé, joyeux, etc.

Il n'existe pas d'état unique qu'on pourrait pointer du doigt et dire, "Voilà ce que tu cherches. Lorsque tu auras atteint cet état, tu auras atteint la bouddhéité". De telles idées reçues ne sont que des images dans notre cerveau. Il n'y a pas de forme finie pour un bouddha. Chaque personne assise en zazen possède sa propre forme. C'est ainsi qu'on peut dire que Zazen est orné des formes infinies du bouddha.

Maître Nangaku dit ensuite à Baso de ne pas préférer le bien ou le mal à l'instant présent. Au cours du flash instantané de la réalité, ni le bien ni le mal n'existent. Il n'y a ni de bouddhas ni de non-bouddhas. Dans la pratique réelle de zazen, on ne trouvera aucun "bouddha"; nos concepts de bouddha ont été laissés derrière et nous sommes libres de nous asseoir dans la réalité elle-même. Nous sommes libres d'être des bouddhas.

Si nous nous attachons à la forme physique de s'asseoir, par exemple en nous concentrant sur la respiration ou en encourageant une attention physique constante, nous n'aurons pas compris que zazen, c'est s'asseoir dans l'unité du corps-et-esprit, l'état où on ne met aucun accent sur le mental ou sur le physique.
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Voilà. J'espère que ce texte aura apporté un éclairage sur la pratique du zen Sôtô comme il est transmis depuis Dõgen.
Merci à Yudo qui nous a fait connaître Nishijima Roshi à travers ses magnifiques traductions du Shobogenzo et ses commentaires éclairés nous indiquant la Voie vers nehan myoshin (le merveilleux esprit du nirvana).
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J'ai une version quelque peu différente de ce cas (d'après "Le non-mental selon la pensée zen" de D.T. Suzuki ; titre original : "The Zen doctrine of no mind").

Avant de donner le cas, il convient de préciser que Nangaku E. (Huai-jang) fut le maître de Baso (Matsu), lequel fut le maître de Hyakujo (Po-tchang) auquel succédèrent trois disciples : Chokay, Obaku (huang-po) et Isan. La lignée Rinzaï (Lin-Tsi) découle de Obaku (Huang-po).

Ceci étant précisé, voici le texte, selon D.T. Suzuki :

« Ayant remarqué avec quelle assiduité Matsu (Baso) pratiquait chaque jour tso-ch'an (zazen), Nangaku E. dit :
— Ami, dans quelle intention pratiquez-vous zazen ?
Matsu répondit : "Je désire atteindre l'état de Bouddha".
Là-dessus Nangaku ramassa une brique et se mit à la polir. Matsu demanda : "Que faites-vous ?" "Je désire faire un miroir", répondit Nangaku.
— Aucun polissage, si long soit-il, ne fera un miroir d'une brique (Matsu)
— Aucune pratique de tso-ch'an (zazen), si longue soit-elle, ne fera atteindre l'état de Bouddha (Nangaku)
— Que dois-je donc faire (Matsu) ?
— C'est comme si vous conduisiez une charrette, répondit Nangaku, Quand elle s'arrête, que doit faire le conducteur ? Fouetter la charrette, ou fouetter le boeuf ?
Matsu ne dit plus rien.

Nangaku dit une autre fois (à Matsu) :
— Avez-vous l'intention de devenir un maître de tso-ch'an (zazen), ou bien avez-vous l'intention d'atteindre l'état de Bouddha ? Si vous voulez étudier le Zen (ch'an), le Zen ne consiste ni à être assis les jambes croisées ni à être étendu. Si vous désirez atteindre l'état de Bouddha en méditant les jambes croisées, le Bouddha n'a pas de forme particulière. Puisque le Dharma n'est localisé nulle part, vous ne pouvez faire aucun choix. Si vous essayez d'atteindre l'état de Bouddha en méditant les jambes croisées, c'est là tuer le Bouddha. Tant que vous vous attachez à cette posture, vous ne pouvez atteindre le Mental
(traduction personnel : l'esprit de Bouddha, dans le contexte) »

Comme on le constate, le cas de Matsu est traité selon l'esprit de "ne pas s'attacher à une forme particulière de posture". Bien entendu, on comprend que Matsu y était attaché dans l'esprit dualiste d'atteindre quelque chose (l'état de Bouddha) comme si cette chose était un objectif "extérieur" à lui-même, en ce sens que Matsu ne se reconnaît pas encore comme étant un Bouddha. Mais pour se reconnaître comme tel, c'est à dire comme un Bouddha, voici ce que lui répond Nangaku :
(la question de Matsu est, après avoir écouté Nangaku lui répondre ce qui est noté plus haut : "Comment devrai-je me préparer pour être en accord avec le Samadhi au-delà de la forme ?"
Le maître (Nangaku E.) lui dit alors :
— Lorsque vous vous exercez dans l'étude du Mental (esprit de Bouddha), c'est comme si des graines étaient semées dans la terre ; mon enseignement sur le Dharma est comparable à la pluie qui tombe du ciel. Quand tout sera prêt pour la maturité, vous verrez le Tao (la Voie, le Dharma, la nature de Bouddha).

La réponse de Nangaku E. n'a jamais été "vous êtes un Bouddha", mais "Quand tout sera prêt pour la maturité, vous verrez le Tao".

Je ne donne pas toutes ces informations pour créer une polémique, mais pour montrer que les choses "la Grande Affaire", ne sont pas aussi simples qu'on veut bien nous le laisser croire (c'est donc dans l'esprit d'apporter un certain éclairage qui n'était pas évident). Le Zen de Matsu, de Nangaku E. (qui fut son maître), de Huang-po et de Lin-tsi (Rinzaï) qui fut le disciple de Huang-po est bien sûr le Zen de Huineng (le 6ème Patriarche), comme l'est celui de Seigen (le "frère" de Nangaku E.), Sekito (son disciple et maître de Yakusan, lequel fut à la tête de le lignée Sôtô).

Je n'ai pas le temps ici de développer le cas de Matsu (je le ferai ultérieurement), mais l'idée est qu'avant Huineng, la méthode de l'école du Nord (Shen Xiu) était une pratique dualiste (nettoyage du miroir). Depuis Huineng, cette pratique dualiste a cessé et est devenue une pratique selon les indications que Huineng donna à Nangaku E. qui les donna à Matsu.
ted

Quand j'ai commencé Zazen, il y a une quinzaine d'années (voire plus), j'avais du mal à me mettre en Lotus.
Un ami, très sceptique et très rationnel, judoka, m'a demandé si le lotus était obligatoire. A l'époque je lui ai répondu que oui. Que la posture était codifiée.
Il s'est régalé ! :D Il m'a dit en ricanant : "Laisse tomber, t'y arriveras jamais. T'es pas assez souple." :mrgreen:
J'ai passé des années à essayer de m'assouplir. Pour un résultat assez moyen, je dois avouer.

Alors, "le zen c'est zazen" de Deshimaru, était devenu pour moi le symbole de l'exclusion.
Bien sur, je voyais des gens assis sur des chaises (posture du bodhisattva).
Bien sur, j'entendais ce discours comme quoi c'est "l'esprit de zazen" (zazenshin) qui compte.
Mais bon... j'étais pas satisfait. :oops: Je me disais qu'on essayait simplement d'être gentil avec ceux qui n'y arrivait pas. Qu'on n'osait pas leur dire la vérité.

Alors, je me suis tourné vers des voies bouddhistes accordant moins d'importance à la posture (le theravada, le bouddhisme tibétain...).

Mais en réalité, j'avais pas compris ce que c'était Zazen. J'avais juste essayé de polir une tuile pour en faire un miroir.
Kaïkan
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Ted a écrit :Mais en réalité, j'avais pas compris ce que c'était Zazen. J'avais juste essayé de polir une tuile pour en faire un miroir.
Bonjour,

Je crois sincèrement que tout le monde fait cette erreur pendant les premières années de pratique. Il faut dire que le slogan "le zen c'est zazen" vient d'une époque où le zazen était quasiment inconnu en France et que personne ne s'imaginait qu'il y avait cette transmission de shikantaza. Mais les textes de référence (les sutras) sont bien précis : la réalisation ne dépend pas du fait d'être assis, debout ou couché. Il est donc utile de suivre l'enseignement d'un maître qui clarifie la compréhension de ses élèves. Lorsque T. Deshimaru nous a quitté il n'y avait plus de maître compétent à part Narita qui est venu et a été suivi par Fausto Guareshi. Les moines en formation (pour devenir maîtres) ont mis une douzaine d'années avant d' être vraiment reconnus (comme enseignants). Beaucoup de pratiquants se sont retrouvés complètement désemparés et on juste continué de "polir la tuile" ce qui d'ailleurs n'est pas totalement inutile pour peu qu'on fasse le pas de plus ensuite.
:D

NB : Je trouve un peu exagéré le fait que chaque fois que j'essaie de faire un sujet sur le zen sôtô il y ait immédiatement un message venant s'opposer en proposant la façon rinzai de voir différemment ce que je tente d'exposer.
Cette comparaison systématique n'a pas lieu d'être et nuit à une compréhension apaisée. Si on décourage toute tentative alors le forum "bouddhisme zen" sera un lieu où il ne sera question que du zen rinzai en exclusivité car dans le sôtô les "polémiques comparatives" sont considérées comme stériles et le mot d'ordre du sandokai est : ne gâchez pas l'instant présent.
jap_8
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Dumè Antoni

Kaïkan a écrit :Je trouve un peu exagéré le fait que chaque fois que j'essaie de faire un sujet sur le zen sôtô il y ait immédiatement un message venant s'opposer en proposant la façon rinzai de voir différemment ce que je tente d'exposer.
Cette comparaison systématique n'a pas lieu d'être et nuit à une compréhension apaisée. Si on décourage toute tentative alors le forum "bouddhisme zen" sera un lieu où il ne sera question que du zen rinzai en exclusivité car dans le sôtô les "polémiques comparatives" sont considérées comme stériles et le mot d'ordre du sandokai est : ne gâchez pas l'instant présent. jap_8
Excuse-moi, mais 1) tu es sur un sous forum zen. 2) Nangaku E. et Matsu (Baso) sont dans la lignée directe à laquelle se rattache Rinzaï (relire mon post, où je prends justement la précaution de préciser dans quelle lignée se situe l'échange entre Nangaku et Baso. 3) La version que je propose ne fait pas référence à zazen de la même façon que tu le fais (ou plutôt que Nichijima le fait). Mon but n'est pas de critiquer le Sôtô ni de créer des polémiques mais d'éclairer le lecteur lambda qui pourrait s'imaginer que le cas que tu donnes est propre au Sôtô, ce qui est inexact.

Si tu ne supportes pas que j'écrive sur tes fils, je t'invite à les créer sur Zen-et-nous où je ne suis pas inscrit. Là, tu ne risqueras pas la contradiction de ma part.

Edit : je suis en effet dans une "politique d'apaisement" car on m'a souvent reproché, quand j'étais sur VB, de ne "fuir la contradiction" (en sorte que je ne pouvais jamais avoir tort). Je suis à présent sur Nangpa, vous n'allez quand même pas me reprocher de faire ce que vous me reprochiez de ne pas faire quand j'étais sur VB, non ? :lol:
Kaïkan
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Daisetz Teitaro Suzuki
Slavoj Žižek a très bien analysé l'ideologie du discours de Suzuki, et il retient spécialement certains textes 'Zen' de Suzuki permettant au guerrier de tuer en toute tranquillité d'esprit. En France, le sinologue René Etiemble prétendit que Suzuki avait déformé le Chan (le Zen tel qu'il est apparu en Chine). Suzuki a été partial dans ses études sur le zen en exposant le point de vue de l'école Rinzaï, mais pas celui de l'école Soto.
D.T. Suzuki n'a pas été moine mais un écrivain traducteur. Ses livres ont connu du succès.
Dans ce fil il est question du point de vue de l'école sôtô et le texte de Suzuki n'apporte rien si ce n'est rendre la compréhension plus compliquée.

"Si tu ne supporte pas que j'écrive sur tes fils, je t'invite à les créer sur Zen-et-nous où je ne suis pas inscrit."
Non vous n'êtes plus sur Zen et nous puisque vous y avez eu des déboires encore tout à fait consultables lorsque vous étiez un certain "zendo". :lol:

J'ai au moins essayé de faire comprendre à l'ensemble des lecteurs combien ces comparaisons systématiques nuisaient à une compréhension apaisée de ce qu'on veut exprimer dans le fil. Ce sont en fait des digressions qui surgissent à chaque ouverture de sujet.
J'ai donc essayé de le faire comprendre une fois, même si c'est peine perdue.

En ce qui concerne mon emploi du temps et mon organigramme, je vous invite à ne pas vous en préoccuper, merci.
Je me permet également de vous faire remarquer que, dans le message que vous citez, je ne me suis pas adressé directement à vous mais que j'ai émis un souhait sans désigner qui que ce soit. Vous n'avez pas eu cette délicatesse et vous m'interpellez directement ce qui est plutôt déplacé. J'ignorerais toute autre interpellation personnelle dans les débats quelles que soient vos raisons.
:)
delphinus
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Je te laisse la responsabilité de tes propos sur D.T. Suzuki, en particulier quand tu cites Etiemble. Seule l'ignorance de qui était D.T. Suzuki et de qui était Etiemble explique ce manque total de discernement sur la question de ta part.

J'ai quant à moi montré au lecteur une autre approche de l'enseignement de Nangaku et de Matsu, et je crois qu'aucun lecteur sérieux ne remettra en cause la traduction de Suzuki, son sérieux, et sa connaissance du Chan (ou du Zen).

J'ai expliqué que je ne le faisais pas dans un esprit polémique.

Cela étant, je t'invite à te comporter différemment sur ce forum, avec pour le moins un esprit d'ouverture.

(modération)
Kaïkan
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Il est facile de comprendre pourquoi ce mondo est devenu si célèbre. C’est parce qu’il touche directement et complètement à cette question de pratiquer avec un objet – pour quelque chose – ou de pratiquer pour rien.
Dans le zen Sôtô, nous ne pratiquons pas pour obtenir le satori, ou pour devenir bouddha, ou pour devenir pur, pas même pour progresser. D’ailleurs, l’un des principes fondamentaux de Dôgen est que zazen lui-même est satori. Pas besoin de le chercher.
Le satori veut dire comprendre que nous sommes profondément libres ; et cette liberté, ce n’est pas obtenir quoi que ce soit mais plutôt perdre : perdre ses obstructions, ses préjugés, ses idées, ses pensées personnelles, ses fixations, ses coagulations mentales. :lol:
Dògen, Nyojo, Sawaki, Deshimaru, ont tous dit la même chose : mushotoku, sans objet, sans but d'obtention de quoi que ce soit, sans profit, telle est l'essence de la pratique de zazen.
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yudo
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Dumè Antoni a écrit :Seule l'ignorance de qui était D.T. Suzuki et de qui était Etiemble (...)
Je ne vois pas grand chose dans la biographie d'Etiemble qui me paraisse sujette à caution. Aurais-tu l'amabilité d'éclairer ton propos à ce sujet?

Je voudrais ajouter que, quelles que soient les réserves qu'on puisse avoir sur l'oeuvre de vulgarisation de DT Suzuki (à qui, par le biais d'Alan Watts, je suis redevable de mes premières études sur le Zen, il y a plus de quarante ans), il faut toujours avoir en tête le contexte japonais des années '30, où un extrême droite se faisait régulièrement dégommer par une droite encore plus extrême et où les auteurs DEVAIENT, pour survivre, manifester d'une manière ou d'une autre, une adhésion de principe au militarisme. Nishijima faisait remarquer que, quand il était jeune, quiconque aurait refusé de faire son service militaire aurait mis en danger toute sa famille, et quoi qu'en prétende la Soka Gakkai, c'est pour avoir refusé de mettre sur le même plan que le Gohonzon le portrait de l'Empereur que les fondateurs de la SG ont été emprisonnés, pas pour avoir protesté contre la guerre. Même l'amiral Yamamoto, opposé à la guerre, a dû organiser l'attaque de Pearl Harbour dont il savait qu'elle aurait des conséquences catastrophiques.

Donc, que Suzuki ait dû faire l'éloge de l'épée était, d'une certaine manière, un épiphénomène incontournable de son époque.
La responsabilité des élèves est d'empêcher le maître de se "prendre pour un maître".
Dumè Antoni

Yudo a écrit :Je ne vois pas grand chose dans la biographie d'Etiemble qui me paraisse sujette à caution. Aurais-tu l'amabilité d'éclairer ton propos à ce sujet?
Etiemble n'était pas qualifié pour critiquer D.T. Suzuki, en particulier pour le Chan/Zen dont il (Etiemble) n'était ni spécialiste, ni pratiquant. Sa spécialité était (d'après Wiki) le confucianisme et la poésie (haïku). Dans sa préface au Tao To King (édition qu'il a, me semble-t-il, dirigée), il loue les talents de Liou Kia-whay, qui, selon lui, donne une présentation fidèle à l'original. Le problème, c'est que j'ai eu des retours de spécialistes et de pratiquants chinois taoïstes, et par ailleurs excellents francophones. La traduction de Liou Kia-whay est plus que spécieuse, et dénature l'esprit du Taoïsme. N'étant pas spécialiste du Taoïsme, ni lecteur de chinois, j'ai lu, comme beaucoup j'imagine, la traduction préfacée par Etiemble. J'avais une certaine idée du Taoïsme (qui me séduisait) sur cette seule base, et j'ai appris que j'étais totalement à côté de la plaque. Je suis donc plus que réservé sur les compétences d'Etiemble en matière de taoïsme, mais surtout en matière de Chan/Zen, discipline dont je n'ai pas connaissance qu'il ait la moindre autorité (contrairement à un Demiéville, par exemple).

D'une manière générale, je me méfie des universitaires non pratiquants. Le moins qu'on puisse dire, c'est que D.T. Suzuki connaissait parfaitement le Zen/Chan, mais aussi le pratiquait et a eu le kensho (qui est synonyme de satori dans le Rinzaï, sauf que le kensho n'est pas libérateur) attesté par son maître Shaku Soën (voir "Ecrits au bord du vide", son dernier ouvrage). On pourrait (à tort à mon avis et/ou par méconnaissance) ne pas reconnaître le kensho, mais on ne saurait dire que D.T. Suzuki n'était pas pratiquant et avait dénaturé le Chan en l'examinant sous l'oeil Rinzaï exclusivement. Ce n'est pas exact et c'est méconnaître l'homme qu'il était (et cela malgré ses dérives durant la guerre ; dérives dont tout le clergé nippon, sans exception, s'est rendu responsable, avec les réserves que tu expliques très bien, d'ailleurs), c'est à dire un authentique pratiquant, ayant très certainement — bien qu'il ne fut pas moine — passé plus de temps en monastère qu'en avait passé un certain Deshimaru, par exemple...

Quand à citer Slavoj Žižek pour critiquer "l'idéologie" de D.T. Suzuki, là, c'est carrément de l'égarement (c'est comme citer shalistamba pour critiquer les qualités de T. Jyoji :roll: ). No comment.
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