Paraboles Zen

Compagnon

Convention, notion, même chose. Pas de problème là dessus. Néanmoins, même si tu ne nomme rien ou ne pense à rien ou ne porte aucun jugement ou aucune nomination sur les choses sur lesquelles tu portes ton regard... si tu plonges ta main dans l'eau... elle sera mouillé, la sensation sera bien là, même si tu n'appelle pas cela de l'eau, que tu ne nomme rien. Il y a bel et bien un effet, une conséquence à ton acte de plonger la main dans l'eau et un effet sur la main, avant séche après mouillée. On ne peut nier ce changement d'état. Mais par contre on peut se défaire du jugement (j'aime, j'aime pas) que l'on porte sur cette conséquence. Un exemple flagrant me vient, quelque chose d'extrême mais qui illustre je crois la situation :
L'auto-immolation de Thích Quảng Đức au Vietnam en 1963. Ce moine bouddhiste c'est auto-immolé par le feu pour protester contre les politique anti-bouddhiste du gouvernement catholique de Jean-Baptiste Ngô Đình Diệm.
Evidemment ce moine est mort. Mais il n'a pas bougé d'un iota pendant que le feu dévorait son corps, alors qu'il était assis en position du lotus. D'un coté il y a eu quelque chose qui s'est produit, on ne peut nier le phénomène, peut importe le regard que l'on porte dessus, l'enveloppe de Thích Quảng Đức a cessé de vivre. Vulgairement il est mort. Mais pour résister ainsi a une mort aussi atroce, et douloureuse il a dut porter un regard totalement indifférent sur ses sensations. La souffrance était là, son corps s'est carbonisé, son coeur a cessé de battre, mais il a choisi d'être indifférent à cela. On peut décrire la scène dans n'importe quelle langue, en n'importe quel terme ou justement en gardant le silence sans porter de jugement, il s'est bel et bienv produit quelque chose. Après évidement notre conscience porte un jugement sur cette scène, lui donne un sens, la décrit avec des mots, mais le phénomène ne peut être nié, il est bel est bien là. 15 minutes avant ce moine était "en vie", 15 minutes plus tard il ne l'était plus.
Je veux bien que l'on face attention aux mots que l'on emploi, je suis le premier à dire qu'il le faut, mais cela ne signifie pas qu'il faut nier le fait qu'un phénomène se produit simplement parce que les langage conventionnel est impropre à le décrire correctement.
Je le répète, le Bouddha Shakyamuni a bien du la plupart du temps s'en remettre à des mots, à de la parole, à du langage, avec différentes strate de compréhension de ces mots.

Penses-tu que l'horizon possède sa propre existence ?

Sa propre existence ? C'est à dire ? Qu'il est conscient, en vie ? autonome ? Ce mot là... existence, plus je le lis plus il me paraît problématique.

Pour moi exister signifie exister pour.

Causalité donc ? "Pour" c'est "dans un but" non ?

Toi tu voudrais faire exister ce quelque chose pour toutes les autres choses.

Non, je me contente d'un "par" peut être, la vacuité, rien de plus, l'inter-être comme dirait Tich Nhat Hanh. Je n'invente aucun concept c'est juste ma façon d'expliquer et développer la notion de vacuité. Tout dépend de tout d'une certaine façon.
Tout est par rapport à quelque chose tout le temps, rien n'est indépendant de tout, tout se définit par rapport à tout le reste. Non-soi.

Qui va dire que des choses existent et que d'autres n'existent pas ? Qui va dire qu'il y a des milliards de gouttes d'eau dans l'océan ou qu'il n'y en a aucune, à part la convention ?

Pour l'instant excuse moi je ne ressens aucun besoin de me poser ce questionnement, il m'est inutile pour le moment dans ma pratique. Au mieux il me donne la migraine :) Désolé. chacun ses besoins.

C'est important de retirer toute trace de soi la plus subtile qui soit si notre idéal est l'état de pure illumination d'un Bouddha. Tant qu'il y a la moindre trace de soi il n'y a pas de libération totale possible. Peut-être que se libérer d'une saisie du soi grossière suffit pour se libérer de sa propre souffrance, mais cela ne suffit pas pour libérer les autres de la souffrance (état d'illumination du Bouddha qui guide les êtres vers la cessation de leur souffrance). C'est la vision du mahayana.

Je comprends je crois que tu essais de m'aider... mais là pour le moment.. je n'en suis pas encore à ce stade. Autant il y a certaine choses qui sont évidentes pour moi et que je tente d'expliquer quand l'occasion se présente et que je sens que l'interlocuteur n'a pas encore bien saisi ce qui personnellement j'ai compris, autant là pour le moment... je ne suis pas encore au stade que tu développe. Merci quand même. Je creuse mes propres pistes quotidiennement :)
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davi
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Compagnon a écrit :Davi- Penses-tu que l'horizon possède sa propre existence ?

Sa propre existence ? C'est à dire ? Qu'il est conscient, en vie ? autonome ? Ce mot là... existence, plus je le lis plus il me paraît problématique.

Davi- Pour moi "exister" signifie "exister pour".

Causalité donc ? "Pour" c'est "dans un but" non ?
Ni existence (vacuité des apparences à l'esprit), ni non existence (interdépendance des apparences à l'esprit). Quand je dis exister pour, je veux dire exister pour un sujet. Donc, avec cette définition, s'il n'y a pas de sujet, il n'y a pas d'existence. J'ai donné l'exemple de l'arc-en-ciel et de l'horizon parce que c'est plus facile à comprendre qu'avec une tasse, la Terre ou une personne.
Compagnon a écrit :Davi- Toi tu voudrais faire exister ce quelque chose pour toutes les autres choses.

Non, je me contente d'un "par" peut être, la vacuité, rien de plus, l'inter-être comme dirait Tich Nhat Hanh. Je n'invente aucun concept c'est juste ma façon d'expliquer et développer la notion de vacuité. Tout dépend de tout d'une certaine façon.
Tout est par rapport à quelque chose tout le temps, rien n'est indépendant de tout, tout se définit par rapport à tout le reste. Non-soi.
Dakpo Tashi Namgyal a écrit :En recherchant la vue, on doit établir la compréhension de la non-dualité selon deux principes. Le premier, formulé par l'école de l'Esprit-seulement, dans les enseignements que Maitreya transmit à Asanga, et celui-ci à son frère Vasubandhu, stipule que les objets perçus n'ont pas d'existence réelle, du fait que c'est la conscience qui se manifeste dans la multiplicité des apparences extérieures et qu'elle est simultanée à ses contenus. Le second principe - la production interdépendante -, formulé par l'école de la Voie médiane, précise que, comme la réalité objective est vide d'existence réelle, l'esprit qui la perçoit est nécessairement dépourvu d'essence. Pour ces deux écoles mahayanistes, la vraie vue repose sur la sagesse qu n'établit pas de dualisme entre le sujet et l'objet.
Rayons de lune, Les étapes de la méditation du Mahamudra
S'indigner, s'irriter, perdre patience, se mettre en colère, oui, dans certains cas ce serait mérité. Mais ce qui serait encore plus mérité, ce serait d'entrer en compassion.
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@Davi : au nom du principe de vacuité, l'horizon ne peut avoir d'existence "propre" dans le sens d'existence "en soi".
Un horizon est forcément l'horizon "de quelque chose". L'horizon d'un paysage, l'horizon des événements d'un trou noir.
D'ailleurs le mot même "horizon" est tout aussi "vide" que l'idée qu'il cherche à exprimer.
Le "mot" est vide, le concept est vide.
D'ailleurs un horizon n'a techniquement aucune limite réelle , ou commence t-il au juste ? Ou se termine t-il au juste ? Par rapport à qui ? Ses limites dépendent de la visibilité de l'observateur entre autre, elle changent tout le temps en plus.
L'image des spationautes en orbites qui voient le "terminateur" (au sens astronomique du terme) se mouvoir en permanence à la surface de la Terre que eux mêmes voient défiler depuis l'orbite est très parlante, le terminateur astronomique est un horizon aux limites imprécises et en changement constant par rapport à un référentiel relatif (le spationaute qui observe). Je ne vois pas d'exemple plus parfait :)
C'est à la fois un phénomène physique observable par un sujet, un concept et un mot, et les 4 sont vides.
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davi
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"terminateur", je ne connaissais pas ce mot. :D
Je n'ai pas bien compris si pour toi les choses ont une existence en dehors de l'appréhension ou non. Par exemple, penses-tu que, même en l'absence de sujet (observateur), les choses continuent d'exister, en relation les unes des autres ?
S'indigner, s'irriter, perdre patience, se mettre en colère, oui, dans certains cas ce serait mérité. Mais ce qui serait encore plus mérité, ce serait d'entrer en compassion.
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davi a écrit :"terminateur", je ne connaissais pas ce mot. :D
Je n'ai pas bien compris si pour toi les choses ont une existence en dehors de l'appréhension ou non. Par exemple, penses-tu que, même en l'absence de sujet (observateur), les choses continuent d'exister, en relation les unes des autres ?
La question a déjà été posée, cela revient à ce demandé si un arbre tombant au milieu d'une forêt sans aucune oreille humaine pour l'entendre fait du bruit ? (Il peut y avoir d'être être vivant pour percevoir le son : animaux, insectes, plantes).

De plus je l'ai déjà dit, le mot "exister" est problématique, qu'entend t-on par là ?
Est ce : avoir une substance matérielle ? Etre là ?

De plus existe t-il un endroit quelconque dans l'univers ou il n'y a aucun observateur, de quelque nature que ce soit ?

Puisqu'il y a interdépendance de tout, même si en un lieu précis il n'y a pas un observateur, tout ce qu'il y a en ce lieu existe même si personne n'est là pour l'observer. Puisque tout est interdépendant, il ne peut y avoir un seul endroit nulle part ou il y ai le moindre néant, car sinon alors tout serait néant. C'est comme un tricot, un tissu, des mailles, si on dit que l'existence du tricot dépend de l’entrelacs de toutes les mailles, si une seule manque, tout le tricot disparaît, on a pas besoin de d'observer simultanément toutes les mailles pour savoir que tout le tricot existe.
Hors d'après le Bouddha, la vue nihiliste est une conception erronée de l'univers.

Et même sans l'opinion du Bouddha, il y a une observation simple à faire, prends une force fondamentale de l'univers qu'est la gravité, il fut un temps ou l'homme primitif ignorait totalement son existence, il était même incapable de penser le concept de force, il n'avait aucun instrument pour la mesurer, la percevoir, et pourtant la gravité s'exerçait bel et bien sur l'homme primitif, il l'a subissait. Quand un Cromagnon jetait une pierre au loin, celle-ci retombait après une certaine distance dans les airs. Le Cromagnon voyait une conséquence de la gravité, mais il ne voyait pas la gravité, il n'observait pas la gravité en ce disant : mon caillou retombe en raison de la gravité, il ne savait même pas qu'elle existait ! Et pourtant la gravité s'exerçait déjà sans que l'homme primitif ne pense même à l'observer faute de la penser tout court.
Cela me paraît un argument assez convaincant en faveur du fait que les choses puissent "exister" ou "être là" ou "se manifester" à un endroit sans qu'il y ai forcément un observateur pour être témoin. Toi, moi là ou nous somme en ce moment, à cet instant, nous sommes sujet à des forces qui s'exercent sur nous même si nous ne les voyons pas, et elle s'exercent pourtant bel et bien.

Du moins à une certaine échelle d'observation. Y a des choses bizarres qui se passent au niveau quantique. Des phénomènes défiant le bon sens, la logique la plus élémentaire.

Donc ce qui est certain à une échelle particulière d'observation l'est peut être moins à une autre. On retombe sur le principe de "vérité relative" :) J'ai déjà réfléchis à la question en matière de religion est même si c'est un principe difficile à comprendre ou a admettre une fois que cela est fait.... c'est libérateur :) C'est une dimension je crois de la libération du "piège des notions", du "dualisme".
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davi
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Kant a écrit :si nous supprimions par la pensée notre subjectivité ou même seulement la constitution subjective des sens en général, toutes les propriétés, tous les rapports des objets dans l’espace et le temps, l’espace et le temps eux-mêmes disparaîtraient et ne peuvent, comme phénomènes, exister en soi, mais seulement en nous.

[...]quant à ce qui pourrait être tenu pour une caractéristique des objets en eux-mêmes et abstraction faite de toute cette réceptivité de notre sensibilité, cela nous reste entièrement inconnu.
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Pourquoi me demander ce que j'en pense puisque tu disposes déjà visiblement de ta propre réponse ? :)
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davi
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Déjà pour savoir exactement ce qui nous différencie, afin d'éviter de parler inutilement. Ensuite j'aime bien, quand je suis parti "un peu trop loin", revenir sur mes pas pour être sûr de ne pas être aller trop loin ou dans une mauvaise direction. Ceci afin que "mes réalisations" soient plus proches de vues justes que de vues fausses. Donc je suis bien content d'avoir cette opposition et de pouvoir creuser ce que j'estime ou non être des incohérences ou des vérités non définitives. C'est plus pour me convaincre moi que convaincre les autres. Mais si ça peut servir les autres, ce n'est pas un mal non plus. Je crois que nous avons tous besoin les uns des autres. :D
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Les extrêmes sont nuisible, le nihilisme est un extrême.
Les dualismes mène à la souffrance, donc considérer que le nihilisme et son contraire s'opposent est une vue non juste qui mène à la souffrance.
Les opposés dépendent l'un de l'autre, on les retrouve donc l'un dans l'autre.

Toutefois, ces spéculations sur la nature ou non de la réalité, sur ce qui existe ou non, me semblent tomber dans les spéculations philosophiques considérées comme vaine et inutiles par le Bouddha Shakyamuni pour ce qui est de la progression sur la voie. Le Bouddha Shakyamuni a dit qu'au moins 1 chose existait : la souffrance. C'est déjà bien assez.

Il y a un sutra ou l'un de ses disciples lui pose un ultimatum en lui demandant des choses comme : l'univers a t-il une fin ou non.
Le Bouddha Shakyamuni lui fait remarqué que jamais lui même ne s'est engagé à répondre à ce genre de question. Il ne faut donc pas d'attendre à ce qu'il y réponde. On peut aller voir ailleurs pour ce genre de réponse, chez Kant peut être ? ;)
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davi
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Il est essentiel de savoir ce qui existe et ce qui n'existe pas. Tu parles de souffrance ? Tu connais sûrement le sutra sur les deux flèches (Sallatha Sutta), où Le Bouddha explique qu'il existe une douleur physique et une douleur mentale inutile. De même pour le soi. Toujours en terme de souffrance, il est essentiel de savoir si un soi existe ou non.
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