Bouddha et son image

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AncestraL
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Bonjour à tous !

Je n'aime pas l’idolâtrie.
J'ai lu plusieurs fois sur ce forum que "le Bouddha a dit qu'l ne voulait pas d'idoles, de représentations de lui" : dans quel soutra trouve-t-on cela SVP ?

Cette chose me surprend, car les tibétains et shingon sont les rois de l’idolâtrie.

Merci !
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Longchen
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J’ai consulté le Larousse à idolâtrie, et donc :
"- Culte rendu à des idoles ou à des créatures adorées comme la divinité même.
- Littéraire. Passion ou admiration excessive vouée à quelqu'un, attachement aveugle, quasi religieux, à quelque chose : Aimer quelqu'un jusqu'à l'idolâtrie."


Je ne connais pas le Shingon ; pour ce qui est du Bouddhisme Tibétain on parlera plutôt de dévotion je pense, mais peut être qu’une forme d’idolâtrie n’est pas à exclure, je ne sais pas (?)

J’ai une représentation du Bouddha sur mon autel, mais je ne rends pas de culte au Bouddha, c'est plus une question d'inspiration.
flower_mid
L’instant présent 🙏
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yudo
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AncestraL a écrit :
14 février 2018, 10:21
Bonjour à tous !

Je n'aime pas l’idolâtrie.
J'ai lu plusieurs fois sur ce forum que "le Bouddha a dit qu'l ne voulait pas d'idoles, de représentations de lui" : dans quel soutra trouve-t-on cela SVP ?

Cette chose me surprend, car les tibétains et shingon sont les rois de l’idolâtrie.
Le Bouddhisme est avant tout pragmatique. Avoir des statues ou des représentations, peut être considéré comme de l'idolâtrie, mais la pire des idolâtries c'est de vénérer l'image qu'on a dans sa tête. Mon expérience me prouve que certains monothéistes iconoclastes sont de bien pires idolâtres que tout ce qu'on voudra de tibétains ou de shingons.
La responsabilité des élèves est d'empêcher le maître de se "prendre pour un maître".
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ShraWaKa
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L'ATTITUDE MENTALE BOUDDHISTE

Pas de foi aveugle

....Presque toutes les religions sont basées sur la foi - une foi plutôt "aveugle", semble-t-il. Mais dans le bouddhisme, l'accent est mis sur "voir", savoir, comprendre, et non pas sur foi ou croyance. Dans les textes bouddhiques on rencontre un mot saddhâ (Skt. sraddhâ) qui est généralement traduit par "foi" ou "croyance". Mais saddhâ, à vrai dire, n'est pas la foi comme telle, mais plutôt une sorte de "confiance" née de la conviction. Dans le bouddhisme populaire et aussi dans l'usage ordinaire qui en est fait dans les textes, le mot saddhâ contient, on doit l'admettre, un élément de foi dans le sens où il signifie dévotion pour le Bouddha, le Dhamma (l'Enseignement) et le Sangha (l'Ordre).
....Selon Asanga, le grand philosophe bouddhiste du IVe siècle après J.-C., sraddhâ comporte trois aspects : 1. conviction entière et ferme qu'une chose est, 2. joie sereine pour les bonnes qualités, 3. aspiration ou souhait d'avoir la capacité d'accomplir un objet en vue (21).
....Quoiqu'il en soit, la foi ou la croyance, telle qu'elle est comprise par les religions en général, n'a que peu de place dans le bouddhisme (22).
....La question de croyance se pose quand il n'y a pas vision - vision dans tous les sens du mot. Du moment que vous voyez, la question de croyance disparaît. Si je vous dis que j'ai un joyau caché dans ma main fermée, la question de croyance se pose parce que vous ne le voyez pas vous-même.
....Mais si j'ouvre la main et vous montre le joyau, vous le verrez alors vous-même et il n'est plus question de croire. C'est ainsi qu'il est dit dans les anciens textes : "Comprendre comme on voit un joyau (ou un myrobolan) dans la paume."
....Un disciple du Bouddha appelé Musîla dit à un autre moine : "Ami Savittha, sans dévotion, foi ou croyance (23), sans penchant ou inclination, sans ouï-dire ou tradition, sans considérer les raisons apparentes, sans me complaire dans les spéculations des opinions, je sais et je vois que la cessation du devenir est Nirvâna (24)."
....Et le Bouddha dit : "O bhikkhus, je dis que la destruction des souillures et des impuretés est l'affaire d'une personne qui sait et qui voit, et non d'une personne qui ne sait pas et ne voit pas (25)."
....C'est toujours une question de connaissance et de vision, non de croyance. L'enseignement du Bouddha est qualifié ehi-passika, vous invitant à "venir voir" et non pas à venir croire.
....Les expressions employées dans les textes bouddhistes, indiquant qu'une personne a compris la Vérité, sont les suivantes :
...."L'oeil de la Vérité sans poussière et sans tache (dhamma-cakkhu) s'est ouvert" ; "Il a vu la Vérité, il est passé au-delà du doute, il est sans incertitude " ; "Ainsi avec une sagesse juste, il voit cela comme cela est" (yathâ Bhûtam) (26). Faisant allusion à son propre Eveil, le Bouddha s'exprime ainsi : "L'oeil était né, la connaissance était née, la sagesse était née, la science était née (27)." Il s'agit toujours de voir par la connaissance ou la sagesse (nâna-dassana) et non de croire par la foi.

(...)

Pas d'attachement même à la Vérité

... Le Bouddha expliqua une fois à ses disciples (30) la doctrine de cause à effet et ils dirent qu'ils la voyaient et la comprenaient clairement. Il dit alors :
... "O bhikkhus, même cette vue qui est si pure et si claire, si vous y êtes liés, si vous la chérissez, si vous la gardez comme un trésor, si vous êtes attachés à elle, alors, vous ne comprenez pas que l'enseignement est semblable à un radeau qui est fait pour traverser, mais non pour s'y attacher (31)".
... Ailleurs, le Bouddha explique cette parabole célèbre dans laquelle son enseignement est comparé à un radeau qui est fait pour traverser mais non pour le garder et le porter sur son dos:
... "O bhikkhus, un homme est en voyage. Il arrive à une grande étendue d'eau dont la rive de son côté est dangereuse et effrayante, mais dont l'autre rive est sûre et sans danger. Il n'y a pas de bac pour gagner l'autre rive, ni de pont pour passer de cette rive à l'autre. Il pense : "Cette étendue d'eau est vaste et la rive de ce côté-ci est dangereuse et effrayante; l'autre rive est sûre et sans danger. Il n'y a pas de bac pour gagner l'autre rive et il n'y a pas de pont pour passer de cette rive à l'autre. Il serait bon que je rassemble de l'herbe, du bois, des branches et des feuilles et que je fasse un radeau et qu'à l'aide de ce radeau, je passe en sécurité sur l'autre rive, me servant de mes mains et de mes pieds." Alors cet homme, ô bhikkhus, rassemble de l'herbe, du bois, des branches et des feuilles et fait un radeau et à l'aide de ce radeau il passe en sécurité sur l'autre rive, se servant de ses mains et de ses pieds. Ayant traversé et ayant gagné l'autre rive, il pense : "Ce radeau m'a été d'un grand secours. A l'aide de ce radeau je suis passé en sécurité sur l'autre rive, me servant de mes mains et de mes pieds. Il serait bon que je porte ce radeau sur ma tête ou sur mon dos partout où il me plaira d'aller." Que pensez-vous, ô bhikkhus? En agissant de cette manière, cet homme agirait-il convenablement en ce qui concerne ce radeau?
... - Non, Seigneur.
... - Alors, en agissant de quelle manière agira-t-il convenablement en ce qui concerne ce radeau? Maintenant, ayant traversé et étant passé de l'autre côté, cet homme pense : "Ce radeau m'a été d'un grand secours. A l'aide de ce radeau je suis passé en sécurité sur l'autre rive, me servant de mes mains et de mes pieds. Il serait bon que je dépose ce radeau à terre (sur la rive) ou que je le laisse à flot et que je m'en aille où il me plaira." Agissant de cette manière, cet homme agit convenablement en ce qui concerne ce radeau.
... "De même, ô bhikkhus, j'ai enseigné une doctrine semblable à un radeau - elle est faite pour traverser et non pour la porter (lit. pour la saisir). Vous, ô bhikkhus, qui comprenez que l'enseignement est semblable à un radeau, vous devriez abandonner même les bonnes choses (dhamma), et combien plus encore les mauvaises (adhamma) (32)."
... Il est bien clair, d'après cette parabole, que l'enseignement du Bouddha vise à conduire l'homme à la sécurité, à la paix, au bonheur, à la compréhension du Nirvâna. Toute la doctrine qu'il enseigne tend vers ce but. Il n'a pas dit des choses destinées simplement à la satisfaction de la curiosité intellectuelle. Il était un instructeur pratique et n'enseignait que ce qui apporterait à l'homme paix et bonheur.

Source: WALPOLA RAHULA L'enseignement du Bouddha, d'après les textes les plus anciens.
L'art bouddhique, comme tout autre art religieux et sacré, a été confronté au problème de la représentation de ses symboles et, au premier chef, de « celui » qui incarnait la réalisation la plus haute de son Enseignement, le Buddha lui-même.
Bien que les bouddhistes n'aient pas connu d'interdiction particulière concernant la représentation « personnelle » du Buddha (comme le judaïsme ou l'islam refusent la représentation de Dieu), ils ont été confrontés à un problème tout à fait difficile à résoudre : comment figurer, sous forme « humaine », celui qui, par sa réalisation spirituelle, dépasse toute catégorie humaine ?
Il faudra attendre plusieurs siècles avant que la question ne soit finalement résolue, avec le développement du Mahāyāna et de deux écoles de sculpture apparues à la même époque, au Gandhāra et à Mathurā. Les principes de représentation du Buddha développés alors resteront à jamais ceux de toutes les écoles ultérieures, quelles que soient les époques ou les lieux, donnant ainsi à l'art bouddhique des bases communes encore aujourd'hui préservées et appliquées, qui lui assurent une unité de style tout à fait remarquable. Nous vous proposons d'en découvrir les grands principes...

La question de la représentation du Buddha relève d’un défi quasi insurmontable… Comment figurer dans une forme – forcément conventionnelle et relevant donc, ainsi, du saṃsāra – celui qui, par excellence, a dépassé toute forme et toute convention en atteignant le nirvāṇa ?
« Lui, qui est allé reposer en paix, ne peut être comparé avec absolument rien. Il n’existe tout simplement pas de concepts qui permettraient d’exprimer l’essence de son être. Toutes les idées sont dénuées de sens par rapport à lui, et ainsi tous les propos à son sujet sans utilité », nous dit le Sutta-Nipāta, texte du canon pāli, du Bouddha entré dans le pari-nirvāṇa ; et ce qui est valable pour les propos l’est aussi pour les représentations. Du coup, les premiers bouddhistes ont résolu l’affaire en pratiquant l’aniconisme : l’absence d’icône, c’est-à-dire de représentation humaine du Buddha !
Source bouddhismes.net
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yudo
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La vraie idolâtrie, de toute façon, c'est d'accorder à une image une valeur qu'elle n'a pas. D'avoir des photos de famille n'est pas, que je sache de l'idolâtrie.
J'ai dans ma chambre le portrait de Nishijima (à côté de celui de Bodhidharma). Ce n'est pas de l'idolâtrie que je sache. Même mon bouddha dans son armoire n'est qu'une représentation de l'enseignant qui a lancé cet enseignement. Que je me prosterne devant ne signifie ni que j'adore la statue, ni que j'adore le Bouddha.

Tout est dans la tête, et un iconoclaste qui ne voudrait pas voir la moindre image, s'il se fait une représentation mentale de son dieu et qu'il adore cette représentation au point de concevoir de l'agressivité, voire pire, contre quiconque lui paraîtrait insulter cette représentation, aurait un problème d'idolâtrie bien pire que le plus dévôt des adorateurs de Ganesh.
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jules
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Dans le zen, il me semble qu'on a largement essayé de prévenir ce genre de dérives. Pour exemple :
Un moine demanda à Yunmen : « Qu'est ce que Bouddha ? », « Un bâton à merde ! » répondit Yunmen
.
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yudo
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jules a écrit :
15 février 2018, 13:33
Dans le zen, il me semble qu'on a largement essayé de prévenir ce genre de dérives. Pour exemple :
Un moine demanda à Yunmen : « Qu'est ce que Bouddha ? », « Un bâton à merde ! » répondit Yunmen
.
Ici, encore plus précisément, il s'agit non seulement d'un rappel à l'ordre par rapport à l'idolâtrie mentale, mais aussi à un autre rappel, moins évident, qui est celui de la réalité.
En Chine aux époques anciennes, on se servait d'un bâton laqué pour enlever le plus gros, avant de laver le reste avec de l'eau. (Dôgen parle de boules d'argile, mais personne n'a jamais bien compris ce qu'il décrit comme procédé).
Bref, déféquer fait tout autant partie de la réalité que tout le reste. Dans le Canon Pâli, il y a d'ailleurs un passage où le Bouddha félicite Sâriputra pour la dignité qu'il manifeste en allant déféquer. Ce rappel constant à la réalité, et à la nécessité de considérer tout autant les parties moins... élégantes de la vie quotidienne est une des caractéristiques du zen.
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cgigi2
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Parfois il me plait d'imaginer un Sangha de Bouddhas:)
avec metta
gigi FleurDeLotus

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Ici et Maintenant pleine attention à la pleine conscience
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jules
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Gigi : Parfois il me plait d'imaginer un Sangha de Bouddhas:)
Quelque part, c'est un peu le cas, puisque la démarche de faire partie d'un Sangha révèle la foi en une libération possible, conséquence de l'éveil à l'existence de l'insatisfaction qui cessera d'être considérée comme une fatalité. Pour moi en effet, et cela fait un moment que je pense cela, les Bouddhas naissent de cette prise de conscience qui déterminera de manière inéluctable leur cheminement à venir en vue de la libération. J'aurais donc presque envie de dire que l'éveil véritable du Bouddha s'est manifesté d'une part le jour où il est sorti de son palais pour faire le constat de la souffrance humaine et d'autre part, conséquemment à cette prise de conscience, d'une décision implacable et à laquelle il ne pouvait finalement pas se soustraire, de découvrir l'origine de cette souffrance ; raison pour laquelle il prît la décision de s'asseoir au pied de son arbre avec la résolution de ne pas en bouger avant d'avoir trouvé la réponse. C'est sans doute à partir de là que l'esprit d'éveil doit avoir pris naissance chez lui et je pense que c'est à partir de là qu'il a fait l'épreuve des quatre nobles vérités que je vois comme une sorte d'alpha et d'oméga de la dynamique sotériologique qui mobilise tout chercheur.
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yudo
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Une des phrases de la cérémonie d'ordination selon maître Dôgen, c'est, une fois que l'impétrant a reçu les préceptes, le maître fait sampaï devant lui avant de faire trois fois le tour de la chaise du maître où l'impétrant a pris place, cependant que le maître récite "Une personne qui reçoit les préceptes entre immédiatement dans l'état de bouddha. Elle se tient au même niveau que le Bouddha Gautama. On peut dire d'elle qu'elle est un enfant de Bouddha"
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