La Relation de Maître à Disciple Par Thich Tri Sieu

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jules
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Vas-y envois, c'est trop bon Dogen ! :)
Compagnon

C'est long ça fait des pages, faudra me laisser le temps.

Ce qui est amusant c'est qu'il est considéré comme avoir atteint l'Eveil de son vivant, et que cela ne l'empêche d'user d'un langage peu châtié à l'égard de ceux qu'il désapprouve. Autant pour la parole juste XD
Compagnon

"Lorsqu'on pratique la Voie de l'Eveil suprême, il est extrêmement difficile de trouver un guide. Aussi, qu'importe que ce guide se présente sous les traits masculins ou féminins, l'essentiel est qu'il soit un grand homme, un homme vrai. Il n'est d'aucun âge, et l'esprit d'un renard sauvage peut devenir un mentor. Telles sont les caractéristiques de ceux qui ont atteint la moelle. Ils guident et assistant les êtres sans dissimuler la vérité de la causalité, et ce maître peut être vous, moi ou quiconque".

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"Interrogez les arbres et les pierres, fouillez rizières et villages, questionnez le pilier solitaire, étudiez tuiles et murs. Dans le lointain passé, Tentaishaku interrogea un renard sauvage, lui rendit hommage et fit de lui son maître. Son renom lui valut d'être appelé Grand Bodhisattva, qualité qui ne dépend pas d'un rétribution karmique."

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"Jadis, sous la dynastie Tang, le grand maître Jôshû; qui avait produit la pensée d'Eveil et partait en pérégrination, dit à cette occasion : "Je recevrai l'enseignement de toute personne qui m'est supérieure, serait-ce un enfant de sept ans, et quiconque m'est inférieur, je l'instruirai, eût-il cent ans". Ce qui revient à dire qu'un vieux moine doit se prosterner devant un enfant de sept ans. Voila un exemple sans pareil de la force de caractère et de la détermination dont faisait preuve le vieux bouddha."

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"Une personne qui a atteint l'Eveil est un authentique bouddha. Il n'est plus l'individu qu'il était auparavant; aussi les relations que l'on entretient avec lui ne doivent-elles pas être les mêmes. Le regard qu'il porte sur nous nous accueille dans des conditions entièrement nouvelles, et le regard que nous portons sur lui doit répondre exclusivement à l'attente mutuelle du moment unique du présent."

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"Ceux qui n'ont pas vu l'essence de la Voie du Bouddha même en rêve, seraient-ils doyens d'âge centenaires, sont de loin inférieurs à quiconque, homme ou femme, qui a obtenu la loi. On ne leur doit aucun respect, sauf le respect des règles de politesse. Même un enfant de sept ans qui pratique et atteint la Loi peut devenir le mentor des quatre catégories d'auditeurs et mère compatissante de tous les êtres vivants. L'exemple nous est donné par la fille du roi dragon qui devint bouddha. Elle était l'égale de tous les bouddhas et devait être honorée et vénérée en tant que telle. Telle est la règle de notre tradition qui remonte aux temps anciens."

28ème chapitre du Shôbôgenzô, "Saisir la moelle en se prosternant". Maître Dôgen.
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Zopa2
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jules a écrit :
12 juillet 2017, 21:32
Oui, tu considères l'aboutissement "idéal" alors que moi je considère le chemin qui y mène, ceci dans l'esprit du zen soto qui affirme que le but est le chemin et selon l'idée qu'enseignement, pratique et éveil sont un.
Ta réponse me fait penser à un beau poème, Le Chemin vers Ithaque, écrit par le poète Constantin Cavafy en 1911.

Il s'adresse à Ulysse, mais parlera à tous ceux qui ont soif de meilleur.

En voici une version, traduite par Marguerite Yourcenar :

"Quand tu partiras pour Ithaque,
souhaite que le chemin soit long,
riche en péripéties et en expériences.

Ne crains ni les Lestrygons, ni les Cyclopes,
ni la colère de Neptune.
Tu ne verras rien de pareil sur ta route si tes pensées restent hautes,
si ton corps et ton âme ne se laissent effleurer
que par des émotions sans bassesse.

Tu ne rencontreras ni les Lestrygons, ni les Cyclopes,
ni le farouche Neptune,
si tu ne les portes pas en toi-même,
si ton cœur ne les dresse pas devant toi.

Souhaite que le chemin soit long,
que nombreux soient les matins d'été,
où (avec quelles délices !) tu pénètreras
dans des ports vus pour la première fois.

Fais escale à des comptoirs phéniciens,
et acquiers de belles marchandises :
nacre et corail, ambre et ébène,
et mille sortes d'entêtants parfums.
Acquiers le plus possible de ces entêtants parfums.

Visite de nombreuses cités égyptiennes,
et instruis-toi avidement auprès de leurs sages.
Garde sans cesse Ithaque présente à ton esprit.
Ton but final est d'y parvenir,

mais n'écourte pas ton voyage :
mieux vaut qu'il dure de longues années,
et que tu abordes enfin dans ton île aux jours de ta vieillesse,
riche de tout ce que tu as gagné en chemin,
sans attendre qu'Ithaque t'enrichisse.

Ithaque t'a donné le beau voyage :
sans elle, tu ne te serais pas mis en route.
Elle n'a plus rien d'autre à te donner.

Même si tu la trouves pauvre, Ithaque ne t'a pas trompé.
Sage comme tu l'es devenu à la suite de tant d'expériences,
tu as enfin compris ce que signifient les Ithaques."

Il en est peut-être ainsi avec l'idéal : dans l'aventure qu'il nous propose, celui-ci est à voir comme un voyage. Ce ne sont alors ni la destination, ni le but qui importe, mais le chemin parcouru grâce à lui. L’Ithaque, dit Cavafy n’a rien à offrir, si ce n’est qu’elle a déjà offert le meilleur : l’occasion du voyage.
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jules
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Dans la relation de maître à disciple, le disciple doit me semble-t-il nourrir une immense confiance en son maître. Mais la confiance est une chose qui doit d'abord se gagner. Il me semble de ce fait que l'attitude consistant à se mettre d'office à genoux devant quelqu'un parce qu'il a le titre de maître, pourrait bien empêcher le disciple de discerner ce par quoi celui devant lequel il se prosterne mériterait éventuellement et effectivement ce titre. Et il me semble que comprendre ce qui fait de quelqu'un un véritable maître, c'est être en capacité de cerner le chemin qu'il nous faudrait parcourir pour parvenir jusqu'à lui.
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chercheur
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Je crois que c'est Ramakrishna qui disait qu'il fallait d'abord interroger le maître, le tester puis une fois qu'on a décidé qu'il était notre maître ne plus rien remettre en cause et finalement s'abandonner à lui.
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