La Relation de Maître à Disciple Par Thich Tri Sieu

Compagnon

La Relation de Maître à Disciple

Par Thich Tri Sieu

Depuis la Maternelle jusqu’à l’aboutissement de nos études, nous avons étudié auprès de nombreux enseignants. Sans eux, comment aurions-nous appris à lire, à écrire ou à calculer ? En dehors de l’école, le mot « maître » désigne aussi celui qui nous montre comment faire. Si nous n’avons personne pour nous montrer comment nous y prendre, nous avons beaucoup de mal à réaliser quoi que ce soit.

Il en va de même pour le Bouddhisme. Le pratiquant débutant a grand besoin de la guidance d’un Maître. Selon les règles de la discipline monastique, les novices ne peuvent pas quitter leur maître. Même les bhikshus n’ont pas le droit de s’éloigner trop rapidement de lui, de peur que n’ayant pas encore la force suffisante, leur pratique ne dégénère, ou qu’ils ne s’égarent.
C’est la raison pour laquelle la place du maître est si importante.


La deuxième raison est l’importance de l’influence du maître : si notre maître est bon, nous deviendrons bon, s’il est mauvais, nous deviendrons mauvais.

C’est pourquoi nous devons être particulièrement prudent dans le choix d’un maître digne de confiance. Le bon choix nous assurera des progrès rapides. Notre aspiration à la pratique risque de dégénérer et nous pourrons abandonner la Voie et éprouver haine et rancoeur vis-à-vis de tous les maîtres à la suite d’un mauvais choix.

Comment faire ce bon choix ?


Avant tout, vous devez sincèrement aspirer à la Libération, à l’Eveil. Ensuite, priez les Bouddhas et les Bodhisattvas pour qu’ils nous permettent de trouver un maître parfaitement qualifié. Enfin, ne vous précipitez pas, ne choisissez pas à la hâte. Prenez le temps de faire sa connaissance, de vous renseigner, faites un examen critique.

D’après les « 50 Stances de Dévotion au Gourou » (Gurupancasika) d’Ashvaghosha , un maître qualifié doit posséder les 10 qualités suivantes :

1. Garder purs ses voeux et engagements,
2. Pratiquer la méditation et maîtriser la quiétude mentale,
3. Avoir la Sagesse et avoir dissipé toutes les illusions et les obstacles,
4. Avoir une connaissance supérieure à celle de son disciple dans le domaine enseigné,
5. Etre patient et avoir la joie d’enseigner,
6. Avoir une vaste connaissance des Textes,
7. Comprendre la vacuité en profondeur,
8. Savoir utiliser les moyens habiles appropriés en fonction des aptitudes et inclinations
naturelles du disciple,
9. Avoir une grande compassion envers le disciple,
10. Instruire les disciples sans se lasser, sans discrimination de leurs niveaux d’intelligence ou de leur rang social.


Si vous avez la chance, grâce à l’accumulation de vos mérites antérieurs, d’avoir rencontré un tel maître, empressez-vous de lui exprimer votre dévotion et demandez-lui de vous accepter comme disciple.

Dans mon livre traitant du Mahamoudra, je parle d’une technique méditative propre au Vajrayana, le « Guru Yoga ».

Tous les pratiquants du Mahamoudra en particulier, et du Mantrayana en général, passent par une période de pratique de cette technique. Sans entrer dans le détail, il s’agit de visualiser son maître assis au-dessus de sa tête avant tout autre visualisation. Le rôle du Gourou est absolument essentiel dans le Vajrayana.


Le rôle du maître dans le Vajrayana est-il le même que dans le Mahayana ?

Dans la tradition Mahayaniste, le maître auprès duquel nous prenons refuge, ou qui nous donne pour la première fois les préceptes, est considéré comme étant notre Gourou. D’un point de vue formel, il est notre maître, que nous l’apprécions, que nous l’admirions ou non, car c’est lui qui a accompli la première cérémonie qui nous fait entrer dans le Dharma. Si nous comparons ce Guru au Maître tantrique, nous pouvons provisoirement l’appeler le « Maître formel ».

Selon le Vajrayana, le maître qui nous fait réaliser directement la nature de l’esprit est notre « Maître - Racine » (rtsa ba’i bla ma - prononcé tsawé lama). N’importe quel enseignant peut donc devenir notre Maître-Racine, qu’il nous ait transmis les préceptes ou non.


Qu’il soit votre maître ne dépend d’aucun élément formel, comme d’une cérémonie de refuge, de transmission de préceptes, ou tout autre rituel. Le maître ne dira pas non plus au disciple :
« Je suis ton Gourou » !


Il n’y a que le disciple qui puisse choisir son maître. C’est ce que nous pourrions appeler le
« Gourou selon l’affinité ».


Si vous avez déjà trouvé votre maître, vous devez lui témoigner une entière confiance, autant de respect et de dévotion que s’il était le Bouddha lui-même.


Si vous considérez votre maître comme un être ordinaire, ses enseignements resteront du niveau de l’ordinaire et vous n’obtiendrez qu’un résultat médiocre. Si vous le considérez comme un Bodhisattva, vous recevrez l’enseignement d’un Bodhisattva et si vous le suivez, vous deviendrez vous-même un Bodhisattva. Enfin, si vous considérez votre maître comme un Bouddha, son enseignement sera celui d’un Bouddha et vous deviendrez un Bouddha en suivant ses instructions.

Considérer son Gourou comme un Bodhisattva ou un Bouddha est le fondement du Vajrayana. Avez-vous déjà essayé de voir votre maître de cette manière ?

Si vous ne l’avez jamais fait, essayez !
Vous constaterez que c’est bien plus facile à dire qu’à faire !


Tant que nous sommes encore sous l’emprise de l’attachement à notre « Je », de l’orgueil et de la fierté, nous avons tendance à ne voir que les défauts des autres. Si nous ne parvenons même pas à leur accorder ne fût-ce que quelques petites qualités, comment pourrions-nous les considérer comme des Bodhisattvas ou des Bouddhas ?

Le Mahamoudra distingue trois aspects de la pratique,
qui sont comparés aux trois parties du corps :


1. la dévotion au maître correspond à la tête,
2. la méditation correspond au tronc,
3. le renoncement à la vie mondaine correspond aux jambes.

La dévotion au Maître est la source de tous les accomplissements (siddhi ), et l’on ne saurait assez insister sur l’importance capitale d’avoir un maître pour nous guider. Je ne peux que vous conseiller vivement de chercher un tel maître qualifié qui puisse vous soutenir tout au long du trajet qui mène à la Libération.


Le rapport entre un maître et son disciple est un lien particulièrement sacré. Si nous pouvons suivre un maître pleinement réalisé, ou qui pratique la voie juste, nous atteindrons certainement l’Eveil, si ce n’est dans cette vie, ce sera dans l’une de nos vies futures, et ce grâce à la connexion karmique que nous avons établie avec ce maître.

Dans sa grande compassion, il ne nous abandonnera jamais, même si devaient s’écouler des centaines de milliers de vies.
Que nous trouvions notre maître rapidement ou non dépend de notre karma.
Les Bouddhas et les Bodhisattvas sont plus nombreux que les grains de sable du Gange, ils résident partout et ont fait le voeux de sauver les êtres - comment se fait-il que nous ne les voyons pas ?


Si vous n’avez pas encore trouvé votre gourou, priez avec sincérité, récitez les soutras, repentez-vous de vos mauvaises actions passées et continuez de chercher. Comme le dit un proverbe tibétain :
« Lorsque le disciple est ’mûr’, le maître apparait ».


De nos jours, nous sommes pour la plupart indifférents vis-à-vis de la relation Maître-disciple.
Les hommes vont rarement au temple, et s’ils s’y rendent, c’est souvent avec une attitude orgueilleuse : il est rare qu’ils consentent à rendre hommage avec humilité ou à s’abaisser pour demander respectueusement au précieux maître qu’il leur enseigne le Dharma.


Les femmes, au contraire, se rendent fréquemment au temple, mais elles sont souvent en proie au désir, à l’attachement et à la jalousie. Soit elles servent les maîtres en vue d’accumuler des mérites, soit elles viennent leur confier des propos futiles, et ce n’est que rarement qu’elles souhaitent vraiment s’enquérir du Dharma.


Tous devront dès lors attendre bien longtemps avant de trouver leur maître ou ami spirituel.

Plongés dans l’ignorance et la stupidité depuis la nuit des temps, comment pourrez-vous atteindre la Libération sans rencontrer un maître qualifié pour vous guider ?


Congrégation Bouddhique Mondiale Linh Son
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Zopa2
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La fin du texte est une perle ....

Les femmes seraient souvent jalouses, en proie au désir, bavardes, futiles, ne s'intéressant pas au dharma.
Les hommes seraient orgueilleux, etc.

Préjugés, jugements réducteurs, vision partiale et partielle du comportement d'autrui : tout pour plaire.


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Et pour conclure en beauté : "Vous est plongés dans l'ignorance et la stupidité". "C'est pourquoi vous avez besoin d'un maître."

Réponse personnelle possible ( parce que je suis en mode "rebel") : Oui, oui, bien sûr monsieur. Vous aussi peut être. Apparemment l'ignorance et la stupidité, vous connaissez bien. Alors vous devriez faire attention à ce que vous dites avec un ton si péremptoire.
Vous parlez de la relation entre un maitre un disciple. Hé bien, permettez moi de ne pas vous considérer comme un modèle.
Vous penserez peut être que ma réaction est causée par l'orgueil. Peu m'importe.
Compagnon

@Zopa2 : ma première réaction fut assez semblable à la tienne. Mais... me méfiant de ma première impression, je me suis dis : cette homme ne dit peut peut être pas cela à la légère, et si c'était le constat qu'il avait tiré fruit de son expérience personnelle dans son temple ? Peut être a t-il finit par faire ce constat après avoir vu défilé des visiteurs pendant des années et des années. Peut être y a t-il dans son vécu, son expérience, suffisamment de faits pour alimenter un tel constat. Qu'en savons-nous ? Justement nous sommes ignorants du vécu de cet homme et parce que nous pensons différemment, parce que nous jugeons différemment la situation, parce que nous pensons qu'il a tort car son point de vue est différent du nôtre, nous pensons qu'il fait erreur et que nous avons raison. Mais qu'en est-il réellement ?

Lorsque, juste après l'Eveil, sous l'arbre de la Bodhi, le Bouddha porta un jugement sévère sur les hommes, trouvant initialement ceux ci incapables de comprendre son Dharma et il faillit renoncé, il fallut une intervention extérieur pour attiré son regard sur certains hommes, pour changer ce regard, et pour faire changer d'avis le Bouddha, non, sa tâche ne serait pas vaine, cela valait la peine de faire tourner la Roue du Dharma.

Prudence.
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Zopa2
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@Compagnon : oui, j'ai également pensé que si l'auteur de ce texte disait cela, c'est parce qu'il avait observé des comportements divers et en était arrivé à tort ou à raison (je pense à tort) sur cette sombre conclusion sur les femmes et sur les hommes. C'est plutôt la manière de le dire qui m'interpelle.

Le Bouddha s'exprimait-il de cette manière : "vous êtes ignorants et stupides, et donc, vous avez besoin de moi" ?
Dernière modification par Zopa2 le 12 juillet 2017, 20:30, modifié 1 fois.
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jules
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Pour moi, si l'être le plus ignorant et le plus stupide qui soit sur cette terre se met à manifester le plus petit désir de s'extirper de cet état, il manifestera par là le plus haut degré de sagesse qui soit.
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Zopa2
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jules a écrit :
12 juillet 2017, 20:30
Pour moi, si l'être le plus ignorant et le plus stupide qui soit sur cette terre se met à manifester le plus petit désir de s'extirper de cet état, il manifestera par là le plus haut degré de sagesse qui soit.
Cela voudrait dire qu'il est conscient de sa bêtise, et que c'est précisément cette prise de conscience qui devient le premier pas vers la sagesse.

"Je ne sais qu'une chose" disait Socrate, "c'est que je ne sais rien". Pourtant, il était considéré par l'oracle de Delphes, comme le plus sage des Athéniens. Cela renvoie tout à fait à ta remarque Jules.

Et d'une autre côté, Socrate avait conscience de la vérité dont les êtres était porteurs.
C'est pour cela qu'il se comparait à une sage-femme : il essayait de faire accoucher les êtres de la vérité dont ils étaient porteurs.
Il y a là un signe d' une véritable humilité chez Socrate et un sens profond de la pédagogie.
Dernière modification par Zopa2 le 12 juillet 2017, 20:47, modifié 1 fois.
Compagnon

Zopa2 a écrit :
12 juillet 2017, 20:29
@Compagnon : oui, j'ai également pensé que si l'auteur de ce texte disait cela, c'est parce qu'il avait observé des comportements divers et en était arrivé à tort ou à raison (je pense à tort) sur cette sombre conclusion sur les femmes et sur les hommes. C'est plutôt la manière de le dire qui m'interpelle.

Le Bouddha s'exprimait-il de cette manière : "vous êtes ignorants et stupides, et donc, vous avez besoin de moi" ?
Etre vexé ou choqué quand on entend "vous êtes ignorants et stupides" c'est simplement refuser d'accepter la chose, nous refusons de nous l'attribuer en raison de la haute opinion que nous avons de nous.

Si quelqu'un qui vient de courir plusieurs kilomètre approche de moi et que je lui dis : vous puez. Est ce vexant ou la vérité ?
Surtout si il pue en effet.

Si le Bouddha dit : les hommes sont en général stupides et ignorants. Est ce faux ?

Zopa2 ne serais tu pas par hasard attaché à une certaine image du Bouddha , tu le vois comme quelqu'un aux propos bien particulier, tu n'imagines pas certaines mots dans sa bouche. Non ce n'est pas possible, il ne peut pas avoir dit cela. Mais est ce là ton idée du Bouddha ou la réalité du Bouddha ? Connais tu personnellement le Bouddha ? L'as tu rencontré durant des années ?

Si les circonstance exigent à un moment donné que le Bouddha use de certains mots car c'est le moyen habile adéquat à un moment donné vis à vis d'une certaine personne ou d'un groupe, justement en raison de sa sagesse, de sa science il emploiera les mots adéquat. Comme ce maître zen qui provoqua l'Eveil chez un disciple trop sérieux en lui disant d'un ton moqueur : vous êtes pire qu'un clown !
Un autre moine trouva l'Eveil en se prenant un sandale dans la figure parait-il !

Donc si la Bouddha a eu besoin a un moment donné de traiter certaines personnes d'ignorantes et de stupides parce que c'est ce qu'il fallait faire à ce moment là avec ces personnes là tu peux être certain qu'il l'a fait. Sans haine. Sans violence.
J'ai d'ailleurs il me semble croisé au moine une fois dans un sutra du Mahayana des propos du même genre tenus par le Bouddha. Il ne blâmait pas, il constatait c'est tout.
Dernière modification par Compagnon le 12 juillet 2017, 20:48, modifié 1 fois.
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jules
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Zopa : Cela voudrait dire qu'il est conscient de sa bêtise, et que c'est précisément cette prise de conscience qui devient le premier pas vers la sagesse.
Non non, ce n'est pas le premier pas vers la sagesse, mais c'est la sagesse même à mon avis. :oops:
Compagnon

@Jules : ta conception de la sagesse :)
Mais est ce LA sagesse ?

Le Bouddha est au delà du bien et du mal, de nos conceptions du politiquement correcte ou non, de ce qu'il est poli ou respectueux de dire ou non, il est pragmatique, si insulter quelqu'un doit provoquer en lui le déclic alors il le fera. Sans se soucier de se que l'on pourra dire de lui. Il aura employé me moyen parfaitement adéquat par ce qu'il a la connaissance absolue. C'est ce que l'on nous demande de croire non ? D'avoir foi en la connaissance parfaite du Bouddha non ? :)

Alors croyez le, aillez confiance en ses méthodes quel qu'elles soient.
Dernière modification par Compagnon le 12 juillet 2017, 20:52, modifié 1 fois.
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Zopa2
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@ Compagnon : Avouons le franchement, personne ne sait comment s'exprimer exactement le Bouddha.
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