Livre de Madame Daspance et réponse de Monsieur Cornu

Compagnon

Tombé par hasard ce matin sur cette polémique elle m'afflige.
Aussi bien l'attitude de Sogyal Rinpoché que celle de Madame Daspance paraissent discutables. Et peu responsables, pour l'un comme pour l'autre.
Je ne prétend pas être expert en bouddhisme loin s'en faut et Monsieur Cornu ici présent est bien évidemment à 100 lieux plus qualifié que moi en la matière, toutefois je ne vois pas bien comment un école ou un courant même particulièrement "original" du bouddhisme pourrait justifier le comportement de Sogyal Rnimpoché. Il est fait mention dans un autre article de l'édition du soir de Ouest-France du fait que Sogyal Rinpoché se placerait de son propre aveu dans la tradition dite de la "folle sagesse". Je suis aller voir ce que c'était, je mets ce que j'ai trouvé en dernier.

L'express

Dérives sexuelles, humiliations et business, la face cachée du bouddhisme


Par Anna Benjamin, publié le 14/09/2016

Le dalaï lama est en visite en France cette semaine. Au même moment sort le livre-enquête Les dévots du bouddhisme, une plongée au coeur de la version occidentale du bouddhisme, très éloignée de celle pratiquée au Tibet.

Le dalaï lama a entamé à Paris une visite d'une semaine, sa première en France en cinq ans, au moment où paraît Les dévots du bouddhisme, un livre-enquête de Marion Dapsance. Pendant sept ans, cette anthropologue s'est plongée dans la version occidentale du bouddhisme, celle de Sogyal Rinpoché. Le quotidien de ce lama controversé est bien loin de la vision que l'on peut se faire des moines qui renoncent à toute possession matérielle et mènent une vie exemplaire. Pourtant Sogyal Rinpoché est l'un des plus célèbres à avoir exporté sa religion en Occident. Marion Dapsance décrit une "star", un "gourou omnipotent" dont les pratiques religieuses ne correspondent pas à la doctrine tibétaine.


Vous avez suivi le lama Sogyal Rinpoché pour écrire votre livre. Qui est-il?

Sogyal Rinpoché est né dans les années 1950 au Tibet dans une famille d'aristocrates ruinés. Sa mère l'a envoyé en Europe pour rebâtir la fortune familiale. C'est un best-seller, publié en 1992 (Livre tibétain de la vie et de la mort), qui l'a rendu célèbre et richissime, alors même qu'il a été écrit par deux de ses disciples anglais. Cet ouvrage, essentiel pour ses adeptes, donne des notions de bouddhisme tibétain mais il mêle aussi des auteurs très différents, comme Raymond Moody, un médecin spécialiste des expériences de mort imminente, Daniel Goleman, un psychiatre américain, Montaigne ou encore William Blake.

Grâce à sa fortune, il a pu construire un réseau de "centres du dharma" en France, Rigpa. Le plus important est le centre de retraite de Lérab Ling, dans l'Hérault. Des milliers de personnes y passent chaque année et en 2008, le dalaï lama a même béni ce temple aux côtés de Carla Bruni, Alain Juppé, Rama Yade ou encore Bernard Kouchner, ce qui lui a donné du crédit.


Vous décrivez le "Lama care" que Sogyal Rinpoché organiserait. De quoi s'agit-il exactement?

Sogyal Rinpoché est l'un des plus célèbres lamas à avoir exporté sa religion en Occident en proposant une nouvelle version du bouddhisme tibétain pour les Occidentaux. Il se focalise sur ce qu'il a appelé la "folle sagesse". Cette pratique spirituelle consiste à faire l'inverse de ce qu'on attend d'un maître bouddhisme, c'est-à-dire vivre comme une star, se faire préparer ses repas, ses vêtements, arriver en retard devant les disciples, les humilier en public, réclamer un trône pour livrer ses enseignements.

Sogyal Rinpoché se comporte comme un gourou omnipotent qui se place au centre de cet univers, et invoque le droit de mettre dans son lit des jeunes filles de la communauté. C'est ce que m'a raconté Mimi, son assistante personnelle pendant trois ans. Elle s'est faite séduire et Sogyal Rinpoché a réussi à la faire venir dans sa chambre, car c'est un honneur de servir le maître. Certaines femmes au service de Rinpoché m'ont aussi rapporté leur passage dans la chambre du lama qui retournait les peintures de divinités pour laisser apparaître des photos de nus, notamment d'Emmanuelle Béart. Et tout ça passe pour être de la "méditation en action" qui doit amener les élèves à l'éveil.


Qu'est-ce que le bouddhisme pour Occidentaux?

C'est un bouddhisme qui dit privilégier la méditation et serait une sorte de psychothérapie, de pratique tournée vers le bien-être. Il est très différent du bouddhisme enseigné en Asie qui ne consiste pas à améliorer son état ou sa dépression. Traditionnellement, les Tibétains laïcs ne font pas de méditation, ils récitent des prières, font des dons aux monastères, tentent de purifier leur karma en usant de reliques. En réalité, beaucoup d'Européens en rupture avec le christianisme se sont imaginé cette religion comme une spiritualité idéale, en prenant le christianisme comme contre-modèle: on dit refuser les êtres surnaturels, les dogmes, le clergé, les prières, mais on y adhère sans problème dès lors qu'ils se rattachent au bouddhisme. Les Asiatiques, eux, ne considèrent pas que le bouddhisme soit sans dieux, sans rituels, sans clergé, sans foi.

Vous attirez l'attention sur le fait que le bouddhisme peut devenir un business en Occident.

Oui, car pour s'engager dans le bouddhisme il faut de l'argent. Au centre de Sogyal Rinpoché les dépenses sont nombreuses: adhésion, frais de cours, frais de retraites très élevés, dons en liquide au lama, achats de livres et d'objets liturgiques, pèlerinages éventuels en Inde ou dans les régions himalayennes, parrainage d'enfants ou de moines.

Qu'en pense le dalaï lama?

Il faudrait lui poser la question. En 1994, il y a eu un procès contre Sogyal Rinpoché aux Etats-Unis mais il y a eu un accord financier à l'amiable entre lui et la victime. Deux ans plus tard s'est tenue une réunion de crise à Dharamsala, au Tibet, où des pratiquants occidentaux ont demandé une charte de bonne conduite pour éviter les malentendus et éventuellement les dérives. Le dalaï lama a refusé de signer cette charte, probablement pour ne pas ternir l'image du Tibet et de sa religion. Pourtant le bouddhisme est mal connu des Occidentaux et il serait utile d'établir des repères clairs.

Le monde des Religions :

Philippe Cornu : « Quand le bouddhisme est attaqué… »
publié le 02/11/2016

Philippe Cornu(1) reproche à Marion Dapsance, qui vient de publier un livre sur «la face cachée du bouddhisme en France», de présenter cette religion sous le prisme d’un «scandale religieux présumé» dans un livre «digne de la presse à scandale».

Il fallait s’attendre à ce que le bouddhisme, surtout tibétain, courant majoritaire en Occident, devienne l’objet de critiques, voire d’attaques, comme celles qui touchent toutes les grandes traditions religieuses à notre époque. Une lune de miel de près de quatre décennies ne pouvait durer indéfiniment, et les bouddhistes, malgré le préjugé favorable dont ils bénéficiaient, se devaient d’y être préparés.

Familier du dialogue interreligieux, j’ai parfois souffert pour mes amis catholiques et musulmans malmenés par une presse d’opinion défavorable. Mais côté bouddhisme, je me croyais préparé à la confrontation par une réflexion approfondie sur la traduction des termes, les difficultés interculturelles et les défis d’adaptation du bouddhisme en Occident, sans parler des instrumentalisations simplificatrices de la méditation sous couvert de la Mindfulness et autres « méditations laïques ». Je m’attendais à des débats d’idées et à des questionnements de fond.

Quelle n’a pas été ma surprise quand j'ai lu le livre de Marion Dapsance(2) et les articles qu’elle a récemment publiés dans les médias, et surtout en apprenant que tout ce déballage médiatique découlait d’un travail de doctorat en anthropologie soutenu à l'École pratique de hautes études (EPHE).


Nos efforts en péril

En tant qu’universitaire spécialiste de la question, j’aurais été le premier à applaudir un travail mené sans parti pris, couvrant un terrain ethnographique plus vaste que le seul groupe Rigpa et son lama pris ici pour cibles. Un vrai débat aurait stimulé les consciences, révélé et permis de poser de bonnes questions sur l'acculturation du bouddhisme tibétain. Bref, il eut été intéressant de faire avancer la réflexion anthropologique sur ce phénomène inédit en Occident – d'ordinaire plus enclin à exporter ses valeurs qu’à en importer.

Au lieu de cela, un livre digne de la « presse à scandale » et des articles où l’accumulation d’inexactitudes et d’incompréhensions égrenées au fil des pages ruine, à mes yeux, la validité de la démonstration. Plus grave, ce réquisitoire met en péril les patients efforts réalisés pour ajuster des enseignements spirituels de haute volée à un contexte occidental pressé, sans en gommer les subtilités, travail auquel je m’attèle, comme bien d’autres, dans mes traductions et ouvrages depuis plus d’une vingtaine d'années.

L’auteure nous dépeint un célèbre maître tibétain comme un opportuniste et un affairiste. Il aurait, dans Le Livre tibétain de la vie et de la mort, « reformulé un ouvrage de 1927 intitulé Le Livre tibétain des morts, écrit par un Américain adepte de la Société théosophique […]. Ce dernier livre est donc déjà une création occidentale destinée à un public d’Occidentaux, réalisée à partir d’une sélection hasardeuse et mal comprise de prières tibétaines. Les proches de Sogyal Rinpoché […] ont eu l’idée de reprendre Le Livre tibétain des morts , pour le remettre au goût du jour. Il s’agit par conséquent, pour bonne part, d’un commentaire occidental d’un texte essentiellement occidental. »

Que d’inexactitudes ! Malgré un titre proche, les deux livres n’ont rien à voir. Le Livre des morts tibétain, en réalité le Bardo thödröl , certes malmené par Evans-Wentz, forme un cycle de textes tibétains d’une tradition datée du XIVe siècle sur la mort et les états post mortem ou bardo. Or, dans les chapitres dévolus à ce sujet, le livre de Sogyal Rinpoché ne s’y réfère aucunement, mais plutôt à l’enseignement du Longchen Nyingthik, une autre tradition tibétaine authentique bien distincte. Et même si ses deux collaborateurs ont bien mis sous forme écrite ce livre, Sogyal Rinpoché, qui avoue ne pas être « écrivain », en est bien l’inspirateur direct à l’oral et reconnaît publiquement leur travail d’éditing et de co-auteurs. Quant aux autres chapitres, ils répondent aux critères herméneutiques du bouddhisme traditionnel, même si des ponts avec l’Occident et des citations d’auteurs occidentaux l’émaillent ici et là.

Sur le terrain aussi, Madame Dapsance se trompe lourdement quand elle confond ses impressions subjectives avec une enquête anthropologique : où se trouve la rigueur scientifique quand elle prend parti à chaque page de son livre et dans ses interviews ? Tous les témoignages recueillis sur Rigpa sont ceux d’ancien(ne)s étudiant(e)s déçu(e)s ou se débattant avec leur vie spirituelle et leur relation biaisée au maître. Jamais il n’est fait appel à des témoignages positifs. L’angle choisi est celui d’un préjugé défavorable à l’encontre de la relation maître-disciple, des enseignements bouddhiques, des pratiques tantriques et, plus grave, l’idée que tous les « adeptes » sont des égarés et des naïfs manipulés par un gourou businessman sans scrupules.


Un caillou dans la chaussure

L’anthropologie use certes de la subjectivité dans l’observation participante, à condition qu’elle s’accompagne d’une prise de distance et de neutralité. Mais ici, c’est un acharnement suspect qui transparaît, doublé d’une méconnaissance de la culture, de la langue tibétaine et du bouddhisme. Le lama n’est pas l’illettré qu’elle décrit, je l’ai vu personnellement traduire oralement des textes tibétains difficiles, et même s’il donne des enseignements « spontanés », il commente des textes traditionnels en retraite.

En outre, Rigpa offre des formations sur l’aide aux mourants, invite régulièrement des lamas érudits qualifiés, publie d’excellents ouvrages et les études bouddhiques y sont proposées avec sérieux au sein d’un collège d’étude (shedra). Rien de cela n’apparaît dans les écrits de Madame Dapsance. Même ses tentatives d’explication des pratiques préliminaires tibétaines sont truffées de préjugés et de jugements de valeur.

Il ne s’agit pas de défendre Rigpa, organisation bouddhique aux inévitables défauts structurels et humains, ni même Sogyal Rinpoché dont la personnalité singulière ne fait pas l’unanimité. Je leur laisse le soin de le faire. Ce que je trouve dangereux, c’est le discrédit que Madame Dapsance jette sur l’ensemble du bouddhisme tibétain, par ailleurs en péril, par le biais d’une « étude » qui ne souffle mot des efforts d’adaptation ni de l’universalité du message bouddhique – même s’il doit s’extraire de ses habits culturels asiatiques.

Présenter le bouddhisme sous le prisme d’un scandale religieux présumé, réitérer l’idée éculée qu’il s’agirait d’un nihilisme antichrétien, c’est omettre des siècles de pensée et de spiritualité, et fausser l’opinion de ceux qui, en Occident, tentent d’y comprendre quelque chose. Ce sujet passionnant aurait mérité mieux. C’est comme se focaliser sur des cailloux dans sa chaussure alors que la montagne alentours recèle des trésors pour qui sait les voir.


(1) Philippe Cornu, chargé de cours en sciences des religions et en bouddhisme, UCL (Belgique) et INALCO (Paris).

(2) Les Dévots du bouddhisme, Marion Dapsance. Préface de Charles Ramble, professeur de tibétologie à Oxford et à l’EPHE (Max Milo, 283 p., 19,90 €).


Je note en tout cas que le titre du livre de Madame Daspance est dors et déjà malhonnète et trompeur puisqu'il résume le bouddhisme en général à un courant en particulier et qu'elle montre uniquement les possibles dérives d'une seul homme à l'intérieur même de se courant qui plus est dans une tradition "la folle sagesse", vraiment très très spécifique. En généralisant ainsi, en déformant, Madame Daspance porte tort à l'image en général du bouddhisme et aussi à sa propre image en matière de compétence professionnelle, d’honnêteté et d'intégrité.

Wikipédia dispose aussi d'une fiche complète sur Sogyla Rinpoché.
Vu l'accumulation des informations négatives à son sujet je suis surpris qu'il ai toujours des adeptes. Avant de prendre refuge auprès d'un maître il faut se renseigner un minimum sur lui. J'en ai fait (très modestement heureusement) l'expérience au tout début de ma découverte du bouddhisme.

La Folle Sagesse (wikipédia)

La folle sagesse est un registre de comportement dans lequel des maîtres spirituels et des gurus de certaines traditions telles que des écoles du bouddhisme, du soufisme, du taoïsme, se présentent soudainement sous un jour inhabituel, choquant voire détestable afin de provoquer l’éveil spirituel de tout aspirant qui en est témoin.

Le spécialiste du yoga, Georg Feuerstein (en), donne en exemple le comportement de quelques gurus de l’hindouisme qui se déplaçaient nus aux yeux de tous :

« Le terme « avadhuta », plus que tout autre, a été associé à ce comportement apparemment fou de certains paramahamsa qui renversaient les codes sociaux dans un mode de vie caractéristique. Leur nudité est sans doute l’expression la plus symbolique de ce renversement ». Il ajoute que « le message de la folle sagesse et ses méthodes sont, de façon compréhensible, choquants pour les institutions religieuses conventionnelles autant que pour les laïques » mais qu’ « au Tibet et en Inde, les « sages fous » et les « saints déments » sont reconnus comme des figures légitimes dans le spectre de l’accomplissement spirituel » ». Feuerstein donne plusieurs exemples de figures spirituelles illustres, tels que le moine japonais Ikkyū Sōjun au xve siècle qui se promenait avec un squelette dans la ville ou le mythique Nasr Eddin Hodja dans la tradition soufie, au xiiie siècle, ainsi que Saint Isidora (en) dans le christianisme du ive siècle.
Selon l’historienne des religions, June McDaniel :

« La folle sagesse n’est pas limitée à l’Inde. Elle a été explorée dans diverses traditions telles que l’orthodoxie orientale ou le christianisme occidental, et parmi les hassidiques d’Europe de l’Est, autant chez les soufis que chez les pratiquants de transes dans diverses parties du monde. Platon, lui-même, distinguait deux types de folie, l’une provenant de la maladie et l’autre d’un « état divin » qui « nous libérerait de nos habitudes ».

Selon le chercheur et enseignant en anthropologie du Droit, Christoph Eberhard, dans son ouvrage sur le bouddhisme :

« Les maîtres de vajrayana, les mahasiddhas ou grands accomplis manifestent souvent la « folle sagesse », et ne rentrent plus dans des cadres qu’on essayerait de leur imposer. Il leur arrive d’agir de manières qui peuvent paraître complètement folles ou choquantes d’un point de vue conventionnel et ils mènent souvent des vies fort peu conventionnelles. Ils ont en effet, en coupant tout « espoir » de voir les choses comme ils le souhaiteraient, transcendé l’action liée à des points de référence ».
Dans le bouddhisme tibétain, on appelle la folle sagesse yeshe chölwa. Dans ce contexte, elle sert à décrire non pas uniquement le comportement du maître, mais également celui de l'étudiant qui souhaite atteindre l'éveil en adoptant un comportement particulier.

Plusieurs gourous de l’époque contemporaine se sont référés à la notion de « folle sagesse », ou l’ont utilisée comme explication de leur comportement, parfois de façon controversée. Osho, Chögyam Trungpa, Lee Lozowick, Franklin Albert Jones, en sont quelques exemples.

Selon Lee Lozowick :


« Les gens se demandent souvent pourquoi, après avoir atteint l'éveil, un maître aurait « besoin » d'agir de manière choquante et provocante. En vérité, le maître n'en a aucun besoin, ce sont les élèves qui ont besoin qu'il agisse de la sorte. Le mental ordinaire fonctionne de manière si étroite, il est tellement bouffi de fausse vertu que les élèves doivent lâcher du lest quant à leurs attentes et projections. C'est pourquoi le maître agit de manière « folle » pour le bien de ses élèves ».
Selon Chögyam Trungpa :

« Si un bodhisattva est sans ego, complètement ouvert, il agit en accord avec cette ouverture et n'aura pas à suivre les règles. Il n'est pas possible qu'un bodhisattva détruise ou blesse d'autres personnes, parce qu'il incarne la générosité transcendantale. Il s'est ouvert totalement et ne fait donc plus de discernement entre ceci ou cela. Il agit simplement en accord avec ce qui est. Son esprit est si précis qu'il ne fait jamais d'erreur (...) un exemple parfait est la transmission de l'illumination par Tilopa à son disciple Naropa. Tilopa retire sa sandale et gifle Naropa avec ».

Dans une recension de l'ouvrage « Le Livre noir des gourous – La vie secrète des maîtres spirituels », l'UNADFI rapporte que la notion de folle sagesse pourrait éventuellement servir de « rationalisation » pour des « comportements déviants » alors présentés comme une façon de tester le disciple.

Dans le cadre de certaines affaires de mœurs au sein du bouddhisme tibétain, le dalaï-lama, lors de sa participation à une conférence sur le sujet des problèmes entre maîtres et disciples, avait été interrogé sur le fait que la tradition rapporte des exemples anciens de maîtres spirituels aux comportements discutables (tel que Drukpa Kunley au Bhoutan). Tout en suggérant de dénoncer les enseignants qui se comportaient mal, il confirma le postulat traditionnel de la folle sagesse en répondant que Kunley « comprenait les conséquences de ses actes sur le long terme » de par sa « vision ».


jap_8
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davi
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Seul un éveillé peut reconnaître un éveillé dit-on. Sogyal Rinpoché est-il un éveillé ? Je ne sais pas... Un épicurien* ? Par contre, il vaut mieux jugé sur pièce, et les dires des uns et des autres... Pour ce que j'ai lu de son ouvrage "Le Livre tibétain de la vie et de la mort", je n'ai rien à redire par rapport à mes autres références. Il y a un style, qui mêle effectivement quelques références ou plutôt citations de penseurs occidentaux (Montaigne sur la mort, William Blake**) et de Rinpochés, mais ça n'a rien de New Age à mon sens; nous sommes des occidentaux et nos références sont occidentales. Ceux qui réfléchissent à leur condition ne sont pas seulement à trouver à l'est. Mais 95 % de l'ouvrage est clairement d'orientation tibétaine.

*La clé de la sagesse épicurienne consiste à comprendre que nous pouvons être heureux si nos désirs, au lieu d'être illimités, se ramènent à la dimension restreinte des besoins de notre corps. — (Roger-Pol Droit, Lucrèce, l'épicurien, en préface à la traduction de Lucrèce)

**Voir le monde dans un grain de sable
Et le paradis dans une fleur sauvage
Tenir l'infini dans le creux de sa main
Et l'éternité dans une heure.
S'indigner, s'irriter, perdre patience, se mettre en colère, oui, dans certains cas ce serait mérité. Mais ce qui serait encore plus mérité, ce serait d'entrer en compassion.
Compagnon

@Davi : l'article wikipédia concernant Sogyal Rinpoché détaille les controverses qui l'entourent depuis 20 ans au moins. Je comprends la logique de la "folle sagesse", et le fait qu'elle puisse être pédagogique dans certaines circonstances mais là les accusations et plaintes sont graves. Certes apparemment le contenu doctrinal semble conforme mais la pratique, les comportements de l'homme en question ne peuvent pas ne pas jeter le discrédit sur le bouddhisme tibétain en particulier et le bouddhisme en général. Il y a eu des procédures judiciaires, des plaintes, il y a eu des enquêtes, dont c'est quelque chose de sérieux, de pris au sérieux par les autorités compétentes et pas seulement du oui-dire vague.
Surtout qu'il me semble bien que les Bouddha Shakyamuni a un avis on ne peut plus clair concernant les rapports sexuels chez les moines. C'est sans équivoque. J'ai un article complet de Bhante Hénépola Gunaratana sur la question et c'est on ne peut plus clair.
J'ai malheureusement rencontré un problème similaire chez une autre figure du bouddhisme contemporain pourtant réputée pour sa sagesse et sa compréhension intellectuelle du dharma. Là aussi la justice avait du s'en mêler et le fautif avait finît par reconnaître les faits et par s'excuser pour les souffrances engendrées.
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yudo
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De surcroît, j'ai personnellement connu une dame ayant été sa secrétaire pour l'Hérault, il y a une bonne dizaine d'années, qui sortait avec un pratiquant du zen.
Elle a tout largué brutalement, Rigpa, le Bouddhisme tibétain, le Bouddhisme tout court, et son compagnon pour faire bonne mesure lorsque Sogyal a tenté de se la faire.

Je pense que Cornu tombe dans le travers de toutes les organisations qui tendent à balayer sous le tapis.
La responsabilité des élèves est d'empêcher le maître de se "prendre pour un maître".
Compagnon

@Yudo : je ne comprends pas ta référence à Monsieur Cornu.
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yudo
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Compagnon a écrit :@Yudo : je ne comprends pas ta référence à Monsieur Cornu.
J'ai déjà personnellement rencontré Cornu, et c'est quelqu'un que j'apprécie, mais j'observe que la tendance dans toutes les organisations est trop souvent de balayer les problèmes sous le tapis pour ne pas "ternir l'image". C'était le cas même à la Fédération des Motards en Colère, dans les années '80, où dénoncer les abus de pouvoir du porte parole du mouvement ou les "honnêtetés approximatives" d'un des administrateurs de la Mutuelle des Motards m'avait valu de me faire reprocher de "nuire au mouvement".

Je ne pense même pas que quelqu'un comme Cornu puisse être malhonnếte dans sa dénonciation de ce qu'écrit Daspance. Il tend juste à refuser de croire que quelqu'un d'aussi célèbre que Sogyal soit un escroc, sans compter l'aspect inconscient qui veut qu'on tende toujours à éviter de reconnaître qu'on s'est fait bananer.

Brad Warner écrivait dans son dernier article:
We always know what’s right. But we do not always consciously acknowledge what we know. Sometimes we shout it down. We yell and scream so loudly against what we know to be right that we can even end up convinced that we don’t know. But that’s bullshit. We know that too, we know we’re fooling ourselves, but we can shout that down as well.
"Nous savons toujours ce qui est juste. Mais nous ne reconnaissons pas toujours consciemment ce que nous savons. Parfois nous le faisons taire. Nous crions et hurlons si fort contre ce que nous savons être juste que nous pouvons même finir par nous convaincre que nous ne le savons pas. Mais c'est du pipeau. Et nous le savons aussi, nous savons que nous nous mettons la tête dans le sable, mais nous pouvons faire taire cela aussi."

J'avais, il y a très longtemps, pris conscience de cela pour moi-même, et cela a représenté une borne importante de mon parcours de vie. Mais cela reste toujours difficile.

Mais pour moi, il n'y a plus aucun doute: Sogyal est bien le DSK du Bouddhisme tibétain...
La responsabilité des élèves est d'empêcher le maître de se "prendre pour un maître".
Compagnon

@Yudo : j'ai une interprétation différente des lignes de Monsieur Cornu. Je peux comprendre sa prudence. J'ai dis comprendre, rien de plus. Je souhaitais juste être sûre d'avoir bien compris ce que tu voulais dire :)
ted

Bon. En tout cas, comme il ne s'agit pas d'enseignements bouddhistes mais de presse à scandale, je déplace le fil dans "Salon de thé".

:mrgreen:

Au fait, les évêques de France se sont réunis à Lourdes pour demander pardon.
A qui ? Pourquoi ?
Je vous laisse trouver.
Robi

ted a écrit :Bon. En tout cas, comme il ne s'agit pas d'enseignements bouddhistes mais de presse à scandale, je déplace le fil dans "Salon de thé".

:mrgreen:

Au fait, les évêques de France se sont réunis à Lourdes pour demander pardon.
A qui ? Pourquoi ?
Je vous laisse trouver.
Au fait, la réponse est simple:
A Lourdes, les évêques demandent pardon pour leur silence coupable face aux abus sexuels.
ted

Philippe Cornu a écrit :Il fallait s’attendre à ce que le bouddhisme, surtout tibétain, courant majoritaire en Occident, devienne l’objet de critiques, voire d’attaques, comme celles qui touchent toutes les grandes traditions religieuses à notre époque. Une lune de miel de près de quatre décennies ne pouvait durer indéfiniment, et les bouddhistes, malgré le préjugé favorable dont ils bénéficiaient, se devaient d’y être préparés.
Tout à fait Philippe.
Mais ça fait 20 ans qu'ils s'entraînent à infiltrer le bouddhisme en occident pour pouvoir le démolir de l'intérieur un jour. :)

Le bouddhisme tibétain est nettement dans le collimateur pour l'instant avec ses divinités courroucées. Mais le tour des autres viendra.

Ces attaques seront de bonnes occasions de pratiquer le détachement. Car les bouddhistes ne cherchent pas le pouvoir temporel.
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