Qui est Dorje Naljorma ?

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davi
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Naropa était l'un des plus grands érudits de l'université bouddhiste de Nalanda qui, dans l'Inde ancienne, formait une véritable ville abritant plusieurs milliers de moines.
Alors qu'il étudiait un jour, comme à son accoutumée, les grandes oeuvres théoriques du bouddhisme, le dos au soleil, il vit une ombre assombrir ses textes. Se retournant, il aperçut derrière lui, venue d'on ne sait où, une vielle femme affligée de pas moins de 37 signes de laideur : les yeux rouges et enfoncés, les cheveux rougeâtres, le front protubérant, le visage creusé par les rides, les oreilles trop longues, le nez tordu, un début de barbe jaune, la bouche de travers, les dents rentrées, la langue débordant sur les lèvres, le teint livide, la peau épaisse, le dos voûté, etc.
La vieille femme, sans autre forme de présentation, demanda à l'érudit ce qu'il lisait.
- J'étudie la grammaire, la logique et la discipline, répondit, surpris, le professeur.
- Comprends-tu ces textes ? poursuivit la vieille femme.
- Bien sûr !
- Cela signifie que tu comprends les mots ou comprends-tu aussi le sens ?
- Je comprends les mots, répondit Naropa, quelque peu interloqué par une telle question.
La vieille femme, ravie, se mit alors à rire et à danser.
Naropa, encouragé par une telle attitude et regrettant avoir avoué ne comprendre que les mots ajouta qu'il comprenait aussi le sens. Mal lui en prit : la vieille femme se mit aussitôt à pleurer et à se lamenter.
L'érudit, peut-être vexé et certainement très intrigué, apostropha son interlocutrice :
- Peux-tu m'expliquer, vieille femme, pourquoi tu t'es montrée si joyeuse lorsque je t'ai dit que je comprenais les mots et pourquoi tu t'es mise à pleurer lorsque j'ai ajouté que je comprenais aussi le sens ?
- Tout simplement parce que lorsque tu as dit comprendre les mots c'était vrai et que cette franchise m'a réjouie ; mais lorsque tu as déclaré comprendre aussi le sens, c'était faux et cela m'a attristée.
- Et qui donc comprend le sens ?
- Mon frère.
- Alors présente-le moi.
- Tu dois le trouver toi-même et lui demander de t'enseigner.
Sur ces mots, la vieille femme disparut !
Plus tard, sa voix se fit de nouveau entendre pour révéler à Naropa le nom du maître qu'il devait chercher : "Au Levant vit Tilopa, personnification de la béatitude et de la connaissance, seigneur de tout ce qui vit. Cherche-le, lui qui est un maître et un bouddha."
La vieille femme si étrange n'était autre que Vajrayogini qui avait revêtu cette apparence pour détourner le brillant érudit Naropa de ses spéculations intellectuelles et pour le conduire, par le biais de Tilopa, qu'il mettra des années à trouver, à la réalisation de la nature de l'esprit.
Naropa comprit bien évidemment que la vieille femme était une apparition divine et que les 37 signes de laideur qui la caractérisaient étaient à la fois une incitation à se détacher du samsara et un symbole des 37 branches de l'Eveil. Ce fut pour lui une profonde prise de conscience qui lui fit abandonner sur le champ ses études et sa position enviée dans la hiérarchie monastique. Prenant son bol de moine, il se mit sans tarder en route vers le Levant, à la recherche d'un mystérieux maître dont il ne connaissait que le nom.
Sa quête dura douze ans parsemés de nombreuses difficultés. Ayant enfin découvert Tilopa, il dut passer par douze grandes épreuves que celui-ci lui fit subir afin de le débarrasser de ses impuretés et de son intellectualisme universitaire. Finalement, son esprit ayant gagné une pleine maturité, l'éveil se révéla à lui lorsque son maître lui asséna un coup de sandale derrière la tête.
La rencontre entre Vajrayogini et Naropa illustre de manière très significative la relation qui unit les pratiquants et les divinités : loin d'être des abstractions ou de simples symboles, elles possèdent la faculté d'intervenir effectivement dans le cours de l'existence des fidèles.

http://www.clairelumiere.com/index.php? ... ptv4r42ma0
Je n'ai pas compté mais sans doute que les crânes formant le collier représentent les 37 branches de l'Eveil dont parle cette histoire.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Trente-se ... %C3%89veil

Bon ben j'ai quand même compté, il y a bien 37 crânes avec ceux situés en diadème sur le dessus de la tête... :)

Sinon le halo de flammes représente la sagesse consumant les obstacles extérieurs et intérieurs; les trois yeux représentent la connaissance des trois temps; les cinq parures (collier, boucles d'oreilles, bracelets aux poignets et aux chevilles, tablier, roue vajra dans les cheveux) représentent les cinq premières paramitas ou perfections que sont le don, l'éthique, la patience, la diligence, la concentration, le corps de Vajrayogini représentant la sixième à savoir la connaissance.
S'indigner, s'irriter, perdre patience, se mettre en colère, oui, dans certains cas ce serait mérité. Mais ce qui serait encore plus mérité, ce serait d'entrer en compassion.
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axiste
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Merci Davi pour ce nouvel éclairage. jap_8
Je n'arrive pas à discerner ce qu'elle a dans les mains... :?:
Cinq clefs pour la parole correcte :
- dire au bon moment, prononcer en vérité, de façon affectueuse, bénéfique et dans un esprit de bonne volonté."
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davi
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Je n'osais pas t'en parler Axiste... c'est une calotte crânienne humaine (kapala) qu'elle tient dans sa main gauche; la divinité se nourrit de la chair et du sang qu'elle contient... :cool:

En fait cela symbolise la mort de l'ego (consommé par la divinité), l'élimination des ennemis du dharma, ou bien la fin du samsara, aboli par la sagesse, la connaissance primordiale; elle peut représentée également la félicité offerte par la mort de l'ego.
Le kapala, le kartika et le khatvanga forment une triade d'attributs caractéristiques des dakinis de sagesse :

- le kapala (calotte crânienne humaine) tenu dans leur main gauche représente les moyens et la félicité;
- le kartika (couperet) brandi par la main droite symbolise la connaissance (il coupe l'ignorance et les concepts);
- le khatvanga (bâton ou sceptre magique) appuyé sur l'épaule gauche symbolise la présence de la divinité masculine et rappelle l'union des moyens et de la connaissance.

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S'indigner, s'irriter, perdre patience, se mettre en colère, oui, dans certains cas ce serait mérité. Mais ce qui serait encore plus mérité, ce serait d'entrer en compassion.
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axiste
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Je n'osais pas t'en parler Axiste.
Ah je n'avais pas imaginé ! Merci Davi pour ces explications jap_8
Cinq clefs pour la parole correcte :
- dire au bon moment, prononcer en vérité, de façon affectueuse, bénéfique et dans un esprit de bonne volonté."
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