La conscience

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axiste
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Ajahn Sumedho

La conscience n’est pas personnelle. Pour qu’elle le devienne, il faut qu’on se l’approprie : « Je suis une personne consciente ». Mais s’il n’y a que la présence consciente, on pénètre dans l’observation de l’instant et alors, la conscience est ainsi. Ensuite, on peut être attentif au son du silence ; juste maintenir cette écoute, être capable de se poser dans un état naturel de conscience non-personnel et sans attachement. Voir cela, c’est comme s’informer ou s’éduquer soi-même à ce qui est. À la naissance, la conscience qui habite cette forme, ce corps particulier, commence à opérer. Un nouveau-né est conscient mais il n’a pas de concept sur lui-même comme être un garçon ou une fille ou quoi que ce soit. Ces notions sont acquises après la naissance. Notre monde est un monde conscient. Nous pensons peut-être à une conscience universelle ou à viññāna, la conscience sensorielle dont on parle dans les cinq khandha. Mais il y a aussi cette conscience qui est sans attaches, illimitée. À deux endroits dans le Tipitaka, il est question de viññānam anidassanam anantam sabbato pabham – beaucoup de mots pour décrire cet état de conscience naturel, cette réalité. Je trouve très utile de me dire clairement : « La conscience est ainsi ». Si nous commençons à y penser, nous allons vouloir la définir en nous posant des questions comme : « Y a-t-il une conscience immortelle ? » Ou bien nous voudrons en faire une doctrine métaphysique ou encore la nier en disant : « La conscience est impermanente, insatisfaisante et impersonnelle». Nous voulons la définir avec précision, dire qu’elle est impermanente et impersonnelle ou bien l’élever au rang de position métaphysique à laquelle on va s’attacher. Mais nous ne souhaitons pas proclamer des doctrines métaphysiques ni nous limiter à une interprétation héritée de cette tradition. Ce que nous voulons, c’est essayer de l’explorer en en faisant pleinement l’expérience. Ajahn Chah appelait cela pen paccattam, c’est-à-dire une chose que l’on réalise par soi- même. Ce que je vous propose donc maintenant, c’est d’explorer car je ne vais pas essayer de vous convaincre ni de vous convertir à ma vision des choses.

La conscience est ainsi. En cet instant, la conscience est bien présente: nous sommes vifs et éveillés et, de ce fait, nous voyons les choses apparaître et disparaître. Si on maintient cette présence consciente, que l’on se pose en elle sans s’y attacher, sans essayer de faire quoi que ce soit, de trouver quelque chose ni de devenir quelqu’un, si on se détend simplement avec confiance, des choses se produisent. Soudain, on devient conscient d’une sensation physique, d’un souvenir ou d’une émotion. Cette sensation ou ce souvenir devient donc conscient et puis il cesse. La conscience est comme un véhicule ; elle nous présente les choses telles qu’elles sont.

La conscience a-t-elle quelque chose à voir avec le cerveau ? Nous avons tendance à penser qu’elle est une sorte d’état mental qui dépend du cerveau. La position des scientifiques occidentaux est que la conscience est dans le cerveau. Pourtant, plus on l’explore avec sati- sampajañña et sati-paññā, plus on voit que le cerveau, le système nerveux, toute la formation psychophysique apparaît dans cette conscience, qu’elle est imprégnée de cette conscience. C’est pour cette raison que nous pouvons avoir conscience du corps, que nous pouvons réfléchir sur les quatre postures – assis, debout, en marche et couché. Quand nous sommes conscients de notre posture, tels que nous sommes en cet instant, nous ne sommes pas limités à quelque chose qui se situerait dans le cerveau : c’est le corps qui est dans la conscience. Nous sommes conscients de l’ensemble du corps tel que nous le sentons dans cette posture assise.

Cette conscience n’est pas personnelle. Ce n’est pas une conscience qui se situerait dans « ma » tête et, ensuite, une conscience dans « votre » tête ; chacun de nous vit sa propre expérience consciente. Mais cette conscience est-elle ce qui nous unit les uns aux autres ? Est-elle notre « unité » ? Je ne fais que poser des questions. Il y a différentes manières de considérer les choses. Quand nous laissons tomber nos différences – « Je suis Ajahn Sumedho et vous êtes cette personne » –, quand nous lâchons ces identifications et ces attachements, nous constatons que la conscience continue à fonctionner. Elle est pure ; elle n’a rien de personnel ; rien qui la rende féminine ou masculine. On ne peut pas la qualifier. Elle est juste ainsi. Quand nous commençons à reconnaître ce qui nous relie les uns aux autres, nous voyons que notre terrain commun est la conscience et nous constatons ensuite qu’elle est universelle. Quand nous rayonnons mettā vers un milliard de Chinois à l’autre bout du monde, il ne s’agit peut-être pas de sentimentalité et de gentilles pensées ; peut-être y a-t-il là une grande force. Je ne sais pas, je m’interroge. Je ne vais pas me limiter à un point de vue particulier, conditionné par mon héritage culturel, parce que celui-ci est loin d’être parfait, de toute façon. Je n’ai guère le sentiment que mon conditionnement culturel soit très fiable.

Parfois les gens trouvent que le Theravada a quelque chose de nihiliste quand ils entendent parler d’absence d’âme, de Dieu, de « moi » comme s’il s’agissait d’une prise de position inébranlable. Mais l’enseignement du Bouddha n’est-il pas là pour être analysé et exploré ? Nous n’essayons pas d’étayer la position de tel ou tel expert du Canon Pali ; nous utilisons plutôt le Canon Pali pour explorer notre propre expérience – c’est une autre façon de considérer les choses. Si on approfondit cela assez longtemps, on commence à vraiment voir la différence entre la pure conscience et le moment où le « moi » apparaît. Ce n’est pas vague ou confus ; on ne se demande pas : « Est-ce cela le moi ? » C’est une connaissance claire : on sait.

Donc, ensuite, le « moi » apparaît. Je commence à penser à moi-même : mes sentiments, mes souvenirs, mon passé, mes peurs et mes désirs, et le monde entier tourne soudain autour d’ « Ajahn Sumedho ». Il entre en orbite avec mes opinions, mes ressentis, ma vision des choses... Je peux me faire piéger dans ce monde, ce regard sur moi qui apparaît dans la conscience. Mais, si j’en suis conscient, mon refuge n’est plus dans le fait d’être une personne avec sa personnalité et ses opinions. Dès lors, je laisse passer tout cela et le monde d’Ajahn Sumedho prend fin. Ce qui reste, à ce moment-là, c’est anidassana viññāna, cette conscience primordiale non- discriminative ; voilà tout ce qui continue à fonctionner. Cela ne veut pas dire qu’Ajahn Sumedho meurt, que c’est la fin du monde ou que je suis devenu non-conscient.

À propos de fin du monde, cela me rappelle quelqu’un qui en avait très peur. Il disait, dans une espèce de réaction de panique : « Les bouddhistes méditent juste pour voir la fin du monde. Ils veulent vraiment détruire le monde. Ils détestent le monde et souhaitent voir sa fin. » Nous voyons le monde dans son aspect physique: une planète, des continents et des océans, le pôle nord et le pôle sud. Mais, dans le bouddhisme, « le monde » c’est le monde que nous créons dans notre conscience. C’est pour cela que l’on peut dire que nous vivons dans des mondes différents. Le monde d’Ajahn Sumedho ne va pas être le même que celui que vous créez mais ce monde apparaît et disparaît, tandis que ce qui est conscient de l’apparition et de la disparition transcende le monde. C’est lokuttara (transcendantal) et non plus lokiya (du monde).

Quand nous prenons naissance physiquement, nous avons une conscience dans cette forme humaine, dans cette forme séparée des autres. Ce point de conscience commence à fonctionner et ensuite, bien sûr, nous développons une image de nous-mêmes qui nous vient de nos parents et de notre environnement culturel. Nous acquérons des valeurs différentes auxquelles nous nous identifions en tant que personnes, et tout cela est basé sur avijjā, l’ignorance, pas sur le Dhamma mais sur les idées, les opinions et les préférences que possède chaque culture. C’est pour cette raison qu’il peut y avoir des problèmes interminables liés aux comportements différents selon la culture de chacun. Quand on vit dans une communauté multiculturelle comme la nôtre, il est normal qu’il y ait des incompréhensions car nous nous percevons nous-mêmes et le monde qui nous entoure de manière différente selon notre conditionnement. Alors, souvenez-vous que le conditionnement culturel est le produit d’avijjā, de l’ignorance du Dhamma. Ce que nous faisons maintenant, c’est ajouter paññā à la conscience. Paññā est une sagesse universelle qui n’a rien à voir avec une philosophie culturelle.

Quand on étudie le bouddhisme, on voit que ce n’est pas un enseignement culturel. Il ne s’agit pas de la culture ou de la civilisation indienne mais des lois de la nature qui nous entoure, de l’apparition et de la disparition des phénomènes, des choses telles qu’elles sont. Nous parlons d’aniccā, dukkha, anattā. Ce n’est pas de la philosophie ni de la culture indienne ; ce sont des choses qu’il faut découvrir et pleinement réaliser. On ne fonctionne pas à partir d’un système de croyance fondamental qui serait culturel. Le Bouddha met l’accent sur le fait de s’éveiller, d’être attentif, plutôt que de se saisir d’une position doctrinale dès le départ. C’est pour cette raison que nombre d’entre nous peuvent se relier à cet enseignement, parce que nous n’essayons pas de devenir des Indiens ni de nous convertir à une doctrine religieuse qui viendrait d’Inde. Le Bouddha s’est éveillé à « ce qui est », à la loi de la nature. Alors, quand nous explorons la conscience, les enseignements comme les cinq khandha (agrégats) sont des outils précieux et utiles pour investiguer et analyser notre vécu. Ce n’est pas comme si on nous disait qu’il fallait croire dans les cinq khandha, croire qu’il n’y a pas de « moi » ou ne plus croire en Dieu. Il est vrai que certains bouddhistes ont cette attitude, ils adoptent une position doctrinale en tant que bouddhistes mais, pour moi, cet enseignement n’est pas fondé sur une doctrine, seulement sur un encouragement à s’éveiller. Nous partons de ce qui est ici et maintenant, d’une attention éveillée ; nous n’essayons pas de prouver que le Bouddha a réellement vécu. Certains diront peut-être qu’il n’a jamais existé, que c’est juste un mythe, mais cela n’a aucune importance parce que prouver l’existence du Bouddha Gautama n’est pas notre problème. Nous n’essayons pas de vérifier des faits historiques mais de prendre pleinement conscience que la réalité que nous vivons en cet instant est ainsi.

Quand nous nous autorisons à nous poser simplement dans la présence consciente, nous sentons qu’il s’agit d’un état naturel, c’est-à-dire qu’il n’est pas créé par le « moi ». Nous ne recherchons pas des états de plus en plus subtils pour atteindre un sorte d’extase et de paix qui serait le produit d’une expérience de conscience très raffinée. Ce genre d’expérience est très dépendant des circonstances car ce monde conscient dont nous faisons partie inclut aussi bien le grossier que le subtil. Nous ne sommes pas dans un monde spécialement subtil. En tant qu’êtres humains vivant sur la planète Terre, nous ne sommes pas dans le monde raffiné des deva ou des divinités (deva-loka, brahma-loka). Notre sphère est grossière et elle présente un large éventail de réalités qui vont du grossier jusqu’au raffiné. Nous devons vivre avec les réalités d’un corps physique, ce qui est très animal. Les deva n’ont pas un corps physique mais un corps éthérique. Nous aimerions tous avoir un corps éthérique, n’est-ce pas, au lieu d’avoir toutes ces choses gluantes qui circulent dans notre corps – le pus, le sang, toutes ces choses répugnantes avec lesquelles nous devons vivre. Devoir aller aux toilettes, par exemple ; les deva n’ont pas à le faire. Parfois nous aimerions nous illusionner, croire que nous sommes des deva car nous n’aimons pas ces aspects grossiers de notre condition physique. Nous sommes très discrets là-dessus, nous ne voulons pas que les gens les remarquent. Mais la conscience inclut tous les aspects de notre condition humaine, depuis les plus grossiers jusqu’aux plus raffinés.

Il y a une autre chose dont nous devons prendre conscience : nos attitudes compulsives. Cette impression qu’il faut que nous fassions quelque chose, ces habitudes forcenées de devoir agir, devoir obtenir ce que l’on n’a pas, devoir atteindre quelque chose ou se débarrasser de ses défauts. Quand on fait confiance à sa « véritable demeure», on prend du recul par rapport à ce conditionnement des émotions. Nous sommes issus d’une société très compétitive qui nous impose des objectifs à atteindre. Nous sommes programmés pour avoir toujours le sentiment qu’il y a quelque chose que nous devrions faire ou obtenir. Nous croyons toujours qu’il nous manque quelque chose, que nous devons découvrir ce que c’est et l’obtenir. Ou bien nous nous mettons en tête de nous débarrasser de nos faiblesses, de nos défauts et de nos mauvaises habitudes. Voyons clairement qu’il s’agit uniquement d’une attitude qui apparaît puis disparaît. C’est le monde de la compétition, le monde du « moi ».

Nous pouvons toujours nous percevoir selon ce qui ne va pas chez nous en tant que personnes. Sur ce plan-là, il y a tellement de défauts et d’insuffisances possibles. Je n’ai jamais rencontré quelqu’un de parfait. Le « moi » envahit tout. Certains de ses aspects sont plutôt acceptables mais d’autres sont complètement farfelus. Nous ne pouvons pas prendre refuge dans un « moi » car notre « moi » ne sera jamais parfait. Donc, quand nous nous jugeons sur un plan personnel, nous pensons qu’il y a énormément de problèmes, d’insuffisances, de défauts et de faiblesses – peut-être aussi parce que nous nous comparons à l’image d’une personne idéale, généreuse et absolument parfaite. Mais ce qui est conscient du « moi » n’est pas personnel. Nous pouvons devenir conscients du « moi » comme d’un objet mental ; alors les situations personnelles apparaissent puis cessent.

Nous nous surprenons parfois à nous sentir très insécurisés ou à agir comme des enfants parce qu’une situation aura fait réapparaître le « moi ». Je me souviens avoir passé environ trois semaines chez mes parents, du temps où ils étaient encore en vie, parce qu’ils étaient très malades. J’étais Ajahn Sumedho, cinquante-cinq ans, abbé du monastère Amaravati et je rentrais chez moi pour aller vivre dans la même petite maison qu’autrefois avec mon père et ma mère. Cette situation a réveillé toutes sortes d’émotions puériles simplement à cause des circonstances. Nous sommes nés de nos parents. Une mère et un père éveillent en nous des souvenirs, des liens avec notre enfance et les années qui ont suivi. C’est ainsi qu’une grande partie des difficultés que l’on rencontre dans les familles vient du fait que, dans ce contexte, on se sent à nouveau comme un enfant – même quand on est un moine bouddhiste de cinquante-cinq ans et abbé d’un monastère ! Ma mère et mon père n’avaient aucun mal à me considérer toujours comme un enfant. Ils voyaient bien que j’étais un homme d’âge mûr mais ils agissaient encore parfois comme si j’étais leur enfant. Alors, on se retrouve plein de rébellion et de ressentiment, comme un adolescent qui se voit traité en gamin ! Ne soyez donc pas surpris si de telles émotions surgissent dans ce genre de circonstances. Tout au long de la vie, quand on vieillit, le karma mûrit et ces situations apparaissent dans la conscience. Ne vous désespérez pas si, à cinquante ans, vous vous sentez très puéril. Soyez-en simplement conscient : c’est comme ça. Les circonstances pour que cette émotion particulière apparaisse sont présentes mais, ensuite, vous en êtes conscient. Votre refuge est dans cette prise de conscience ; pas en essayant de devenir une personne idéale, mûre, responsable, capable, « normale », à qui tout réussit, et tout et tout. Ce ne serait qu’un idéal.

Ici, on ne me considère pas comme un enfant – je suis même le plus âgé ! Vous me voyez peut-être comme une figure paternelle parce qu’un vieil homme comme moi évoque l’autorité. Je représente l’autorité, le patriarche, le père, l’homme – et même le grand-père pour certains d’entre vous! Il est intéressant de simplement prendre conscience de ce qui se passe quand les circonstances sont présentes. Rationnellement, vous pouvez vous dire: «Ce n’est pas mon père» mais, émotionnellement, vous pouvez me ressentir comme cela, agir envers moi comme si j’étais votre père, à cause d’une certaine habitude émotionnelle. Quand les circonstances font apparaître cette figure masculine autoritaire, c’est ce que vous ressentez, c’est ainsi. Il n’y a rien de mal à cela ; il suffit de remarquer que c’est ce qui se produit. Faites confiance à ce refuge qu’est la claire conscience de ce qui est au lieu de penser que vous ne devriez pas projeter des images paternelles sur moi ou que vous ne devriez pas vous sentir diminué devant une figure d’autorité masculine, et ainsi de suite. Si vous vous sentez diminué à cause de moi, au lieu de me blâmer ou de vous en vouloir, voyez qu’il s’agit simplement d’un sentiment qui est apparu et qui, par conséquent, va disparaître. Sinon, vous retombez dans un monde créé par vous, un monde « personnel » et vous croyez qu’il s’agit de la réalité.

Autrefois, je me mettais très en colère quand une femme se montrait autoritaire. Quand une femme, n’importe laquelle, faisait preuve d’autorité, je sentais la rage monter en moi. Je me suis demandé pourquoi je réagissais aussi fort simplement à une intonation de voix, pourquoi une attitude dirigiste de la part d’une femme me rendait absolument furieux, et j’ai vu que cela remontait à l’époque où j’étais enfant à essayer de m’opposer à la volonté de ma mère. Si nous ne réussissons pas à résoudre correctement ces situations du passé, quand des circonstances semblables se présentent, nos vieilles réactions refont surface. C’est en en prenant conscience que l’on peut résoudre cela. Quand on le comprend et qu’on le considère simplement comme étant « ce qui est », on peut le résoudre ou le lâcher. Ainsi se libère-t-on de la répétition incessante de ces vieilles réactions conditionnées.

Notre refuge est donc dans cette présence consciente et non dans l’espoir vain d’obtenir et de maintenir des états de conscience très subtils. Il est possible, en pratiquant souvent avec beaucoup de finesse, d’apprendre à développer des expériences subtiles mais il faut inévitablement finir par laisser des choses plus grossières se manifester et faire également partie de votre expérience consciente. On dit que se poser dans la présence consciente est comme « rentrer chez soi » ou retrouver sa « véritable demeure ». C’est un espace où l’on peut se détendre, comme un foyer, un lieu où l’on se sent bien, où l’on n’est plus un étranger ou un extra-terrestre. Avec soulagement, on commence à sentir que l’on a enfin trouvé sa place, que l’on n’est plus ce vagabond perdu dans la nature. Et lorsque « le monde d’Ajahn Sumedho » apparaît à nouveau, on ne se sent plus à sa place parce que « Ajahn Sumedho » est un extra-terrestre, un étranger ! Il ne se sent jamais bien nulle part : suis-je toujours américain ? Suis-je britannique ou thaïlandais ? Où est-ce que je me sens bien en tant qu’Ajahn Sumedho ? Je ne sais même plus de quelle nationalité je suis. Je me sens plus à l’aise en Grande-Bretagne qu’en Amérique parce que je vis ici depuis tellement longtemps. En Thaïlande, je me sens chez moi parce que c'est le paradis des moines bouddhistes. On nous traite merveilleusement bien mais il y a toujours des problèmes de visa et on reste toujours un phra farang (moine étranger). Ici, même si je vis dans ce pays depuis des décennies, je reste un Américain pour la plupart des gens. Et quand je retourne aux États-Unis, je ne sais pas ce que je suis. Les gens me disent : «Tu n’as plus l’air d’un Américain. Tu as un drôle d’accent. On ne sait plus d’où tu viens ! » Cela, c’est le monde qui est créé par l’esprit conditionné. Quand celui-ci tombe, ce qui reste c’est notre véritable demeure.

http://www.dhammadelaforet.org/sommaire ... uitive.pdf
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davi
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Merci beaucoup pour ce texte Axiste. loveeeee
Ne vous désespérez pas si, à cinquante ans, vous vous sentez très puéril. Soyez-en simplement conscient : c’est comme ça. Les circonstances pour que cette émotion particulière apparaisse sont présentes mais, ensuite, vous en êtes conscient. Votre refuge est dans cette prise de conscience ; pas en essayant de devenir une personne idéale, mûre, responsable, capable, « normale », à qui tout réussit, et tout et tout. Ce ne serait qu’un idéal.
jap_8
S'indigner, s'irriter, perdre patience, se mettre en colère, oui, dans certains cas ce serait mérité. Mais ce qui serait encore plus mérité, ce serait d'entrer en compassion.
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Floch
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Merci Axiste. jap_8
J'aime bien aussi le passage que tu as souligné Davi. :D
axiste a écrit :
19 mai 2018, 01:04
Ajahn Sumedho
Quand on étudie le bouddhisme, on voit que ce n’est pas un enseignement culturel. Il ne s’agit pas de la culture ou de la civilisation indienne mais des lois de la nature qui nous entoure, de l’apparition et de la disparition des phénomènes, des choses telles qu’elles sont. Nous parlons d’aniccā, dukkha, anattā. Ce n’est pas de la philosophie ni de la culture indienne ; ce sont des choses qu’il faut découvrir et pleinement réaliser. On ne fonctionne pas à partir d’un système de croyance fondamental qui serait culturel. Le Bouddha met l’accent sur le fait de s’éveiller, d’être attentif, plutôt que de se saisir d’une position doctrinale dès le départ. C’est pour cette raison que nombre d’entre nous peuvent se relier à cet enseignement, parce que nous n’essayons pas de devenir des Indiens ni de nous convertir à une doctrine religieuse qui viendrait d’Inde. Le Bouddha s’est éveillé à « ce qui est », à la loi de la nature. Alors, quand nous explorons la conscience, les enseignements comme les cinq khandha (agrégats) sont des outils précieux et utiles pour investiguer et analyser notre vécu. Ce n’est pas comme si on nous disait qu’il fallait croire dans les cinq khandha, croire qu’il n’y a pas de « moi » ou ne plus croire en Dieu.
Expérimentation et non une position doctrinale.
C'est pour cela qu'il n'y a pas un "ordre" pour apprendre le bouddhisme.
axiste a écrit :
19 mai 2018, 01:04
... nous n’essayons pas de prouver que le Bouddha a réellement vécu. Certains diront peut-être qu’il n’a jamais existé, que c’est juste un mythe, mais cela n’a aucune importance parce que prouver l’existence du Bouddha Gautama n’est pas notre problème. Nous n’essayons pas de vérifier des faits historiques mais de prendre pleinement conscience que la réalité que nous vivons en cet instant est ainsi.
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Dernière modification par Floch le 19 mai 2018, 12:41, modifié 1 fois.
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axiste
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C'est un passage qui me parle aussi, notamment l'illustration qu'il partage à propos des liens transgenerationnels que nous établissons est saisissante. Mais il y a beaucoup de choses dans ce texte d'Ajahn Sumedho, plus je le relis plus je lui envoie de la gratitude et c'est spontané !
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Floch
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Merci Axiste,
Il y a beaucoup de réponses à mes questions dans ce texte.

Cette partie là, me semble une évidence:
axiste a écrit :
19 mai 2018, 01:04
Ajahn Sumedho
Si nous ne réussissons pas à résoudre correctement ces situations du passé, quand des circonstances semblables se présentent, nos vieilles réactions refont surface. C’est en en prenant conscience que l’on peut résoudre cela. Quand on le comprend et qu’on le considère simplement comme étant « ce qui est », on peut le résoudre ou le lâcher. Ainsi se libère-t-on de la répétition incessante de ces vieilles réactions conditionnées

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axiste a écrit :
19 mai 2018, 01:04
Ajahn Sumedho
Cela, c’est le monde qui est créé par l’esprit conditionné. Quand celui-ci tombe, ce qui reste c’est notre véritable demeure.

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Floch
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Ajahn Sumedho
La conscience est ainsi. En cet instant, la conscience est bien présente: nous sommes vifs et éveillés et, de ce fait, nous voyons les choses apparaître et disparaître. Si on maintient cette présence consciente, que l’on se pose en elle sans s’y attacher, sans essayer de faire quoi que ce soit, de trouver quelque chose ni de devenir quelqu’un, si on se détend simplement avec confiance, des choses se produisent. Soudain, on devient conscient d’une sensation physique, d’un souvenir ou d’une émotion. Cette sensation ou ce souvenir devient donc conscient et puis il cesse. La conscience est comme un véhicule ; elle nous présente les choses telles qu’elles sont.
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C'est ce que l'on observe en méditation aussi. on observe une sensation physique, une pensée qu'on laisse passer tel un nuage dans le ciel.
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Longchen
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flower_mid jap_8
L’instant présent 🙏
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axiste
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Merci pour vos retours sur le texte jap_8

La présence consciente est ton refuge :
conscience du changement des ressentis,
des attitudes, des humeurs, des situations
et du changement émotionnel.
Reste près de cela – c’est un refuge indestructible.
Ce n’est pas quelque chose qui change.
C’est un refuge en lequel tu peux avoir confiance.
Ce refuge n’est pas quelque chose que tu crées. Ce n’est pas une fabrication; ce n’est pas un idéal. Il est très concret et très simple mais on peut passer à côté sans le voir. Quand tu es attentif tu commences à voir que c’est ainsi.
Ajahn Sumedho.
anjalimetta love3
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