Contempler le monde des six sens dans son propre espace

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tirru...
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Bonjour,

Contempler la conscience à travers les six sens c'est contempler le monde.

Bouddha parle du monde dans ces termes :
"Le monde, l'origine du monde, la cessation du monde et le chemin qui mène a la cessation du monde"
ِِEn réalité, en parlant du monde il désigne notre propre corps et non pas un monde en tant qu'espace, que lieu :
"Ce n'est pas par un voyage qu'on peut arriver au bout du monde car ces quatre choses sont contenus dans ce corps lui-même long d'une aune"
Le monde est donc dans ce corps et ce mental, le monde se manifeste dans cette conscience qui apparait, change et disparait continuellement. Les phénomènes physiques et mentaux apparaissent dans ce corps à travers les six portes des sens, le sixième étant mental. De ce point de vue, le monde c'est cette conscience. Sans conscience, point de monde :
Vénérable Ajahn Tate a écrit :
Le monde semble vaste quand l’esprit est dissipé et qu’on le laisse vagabonder parmi les objets des six sens. Le monde va rétrécir quand l’esprit aura été entraîné à rester concentré : il sera sous votre contrôle et pourra contempler les six sens dans son propre espace...

...Quand votre concentration sera forte et bien stabilisée, vous serez en mesure de contempler ce monde de l’esprit où se développent les sensations, les perceptions, les pensées, ainsi que tous les concepts erronés et les pollutions[...]

...Tant que les sens continuent à résonner en nous, les réactions mentales continueront à nous faire souffrir. C’est pourquoi ceux qui le savent et qui ont vu la souffrance qui en découle, sont prêts à se libérer de leur emprise pour ne laisser parler que le cœur qui est neutre, neutre, neutre … sans pensées, sans images, sans concepts d’aucune sorte. Dès lors, où le monde pourrait-il prendre forme ? … Voilà comment le Bouddha nous apprend à trouver le bout du chemin, là où le monde s’arrête.
anjalimetta
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Upekkhā
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Bonjour tirru,

Merci de faire un rappel :)

Pour ma part je vois " le monde" (loka) synonyme de dukkha dans le sens ou la signification de "monde" représente l'image du monde ( monde filtré avec nos jugements de valeurs) du monde tel qu'il est réellement ( sans le filtre mental pollué).

Et vu que c'est seulement une image et non la réalité, on est en porte à faux. Et ce décalage génère automatiquement dukkha. C'est pour ça que c'est synonyme pour moi.

anjalimetta
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tirru...
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Upekkhā a écrit :... ce décalage génère automatiquement dukkha. C'est pour ça que c'est synonyme pour moi.
Tout à fait Upekkhā. En sachant que ce décalage, c'est précisément cette ignorance des quatre aspects des nobles vérités cités au début du sujet. Ignorance qui occulte les véritables caractéristiques de la réalité (dukkha, anicca, anatta) que le maitre Ajahn Chah nomme les trois fosses :
Ajahn Chah a écrit :Le coeur de la méditation vipassana est de jeter chaque objet de l’esprit dont vous faites l’expérience dans ces trois "fosses" d’aniccam, dukkham et anatta. Quoi que ce soit, que ce soit bon, mauvais ou pire, jetez-le dans ces trois fosses et très vite vous commencerez à gagner de la sagesse et de la vision pénétrante. Source
Ici, l'accent et surtout mis sur les moyens d'accentuer sa concentration en tournant et en ramassant le regard vers le monde intérieur car bien souvent celui-ci se perd dans le monde extérieur ! Mais comment pourrait-il y avoir cet immense monde extérieur sans cette minuscule conscience bien intérieur pour l'accueillir ?

jap_8
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davi
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Upekkhā a écrit :Pour ma part je vois " le monde" (loka) synonyme de dukkha dans le sens ou la signification de "monde" représente l'image du monde ( monde filtré avec nos jugements de valeurs) du monde tel qu'il est réellement ( sans le filtre mental pollué).

Et vu que c'est seulement une image et non la réalité, on est en porte à faux. Et ce décalage génère automatiquement dukkha. C'est pour ça que c'est synonyme pour moi.

anjalimetta
il n’y a absolument aucun champ expérimental qui soit en dehors des cinq agrégats. Ceci est la grande découverte que fit le moine Gotama, l’Éveillé, Bouddha, il y a vingt-cinq siècles, sous l’arbre de la « boddhi ». Il observa très clairement l’apparition des cinq agrégats et la disparition des cinq agrégats. Il en tira la conclusion suivante ; Quoi qui soit, quoi que ce soit, ce sont toujours les cinq agrégats. Il n’y a absolument rien qui soit en dehors des cinq agrégats.
http://www.dhammadana.org/dhamma/5_agregats.htm
S'indigner, s'irriter, perdre patience, se mettre en colère, oui, dans certains cas ce serait mérité. Mais ce qui serait encore plus mérité, ce serait d'entrer en compassion.
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Upekkhā
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Heu ok. Je n'ai pas compris pourquoi tu postes ça en me citant.
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davi
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D'accord. J'avais cru comprendre à travers tes propos que tu faisais exister quelque chose en dehors des cinq agrégats.
S'indigner, s'irriter, perdre patience, se mettre en colère, oui, dans certains cas ce serait mérité. Mais ce qui serait encore plus mérité, ce serait d'entrer en compassion.
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Upekkhā
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Peut être que je n'ai pas été assez explicite dans mon message. Je disais juste que le monde que l'on croit être vrai ( c'est à dire, se fabriquer une image de la réalité infusée avec nos opinions, jugement de valeurs, etc..) est pour moi, un synonyme de dukkha car cette image erronée va justement créer dukkha.

Pour illustrer vite fait mon propos, imaginons ceci: il y a la vision de la réalité telle qu'elle est (sans jugement mondain donc sans l'ignorance). Nommons la "A". De par notre ignorance, nous allons nous créer une image de cette réalité à travers nos jugements: c'est la réalité "A' " que l'on croit comme étant la réalité "A". Du coup ce décalage va créer dukkha. C'est pour ça que je disais que pour moi, dukkha = l'image que l'on a de loka ("A' ").
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axiste
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Cette histoire me parle parfaitement :
« Un voyageur se trouvait sur la route quand vint le crépuscule, il avait encore un long chemin à faire ; avisant au milieu des champs une masure abandonnée, il y pénétra pour passer la nuit. Il venait de s’asseoir, lorsqu’il vit entrer un démon aux cheveux verts, portant sur les épaules un cadavre. L’horrible créature, posant à terre l’homme mort, s’apprêtait à le dévorer, quand un second démon, aux cheveux rouges, fit irruption, et voulut disputer à l’autre sa proie. Un terrible combat allait s’engager, quand les monstres aperçurent notre voyageur, blotti, vert de peur, dans son coin. Ils s’emparèrent de lui, l’amenèrent au centre de la pièce, et lui demandèrent d’arbitrer leur querelle. Terrifié, l’homme crut devoir raconter exactement ce qu’il avait vu, et témoigner en faveur du démon aux cheveux verts : ‘Il est entré le premier avec le cadavre, c’est donc à lui que ce dernier appartient’. Alors l’autre démon s’emporta : se saisissant du naïf voyageur, il lui arracha un bras, qu’il se mit aussitôt à dévorer. Pris de compassion, et pour prouver sa reconnaissance au bon témoin, le démon vert pris un bras à son cadavre, et le mit à la place de celui du voyageur. Mais l’autre démon enleva encore à ce dernier son second bras, et l’autre dut encore le remplacer. Le monstre aux cheveux rouges poursuivant son festin et successivement les diverses parties du cadavre furent greffées sur le voyageur. Alors les démons s’en allèrent, et notre homme, délivré de son horrible cauchemar, se demanda quel corps était le sien ! »
http://bica-vipassana.blogspot.fr/2007/ ... ca_27.html

Et le courant mental change encore plus vite...
« Est-ce que j’existe ? » Cette question du poète peut se sembler naïve de prime abord, cependant elle s’inspire d’une pensée profonde. Que sommes-nous, sinon des ombres changeantes et fugitives ? On comprend mal que dans ces conditions, des hommes aient encore soif de gloire et de richesses, et qu’ils n’hésitent pas à dépouiller et asservir leurs semblables pour satisfaire leurs appétits.
Je retiens aussi cette phrase dans le texte "bica-vipassana qui me semble résumer beaucoup de choses:
Notre vie en amènera une suivante, puisse elle être bénéfique, jusqu'à l'arrêt total des souffrances et des attachements terrestres et supra-terrestres.
Chaque instant, chaque souffle, chaque respiration, chaque clignement d'yeux, chaque vie, chaque pas...
Cinq clefs pour la parole correcte :
- dire au bon moment, prononcer en vérité, de façon affectueuse, bénéfique et dans un esprit de bonne volonté."
ted

Upekkhā a écrit : Et vu que c'est seulement une image et non la réalité, on est en porte à faux. Et ce décalage génère automatiquement dukkha
N'y a t'il pas une troisième voie ? : reconnaître le décalage et l'accepter ?
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Upekkhā
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ted a écrit :
Upekkhā a écrit : Et vu que c'est seulement une image et non la réalité, on est en porte à faux. Et ce décalage génère automatiquement dukkha
N'y a t'il pas une troisième voie ? : reconnaître le décalage et l'accepter ?
Le reconnaître et l'accepter est l'une des premières choses à faire, c'est connaître la deuxième vérité des Nobles: l'origine de Dukkha. Pour se guérir d'une maladie, il faut savoir que l'on est malade. C'est admettre que l'on est un sous la chaîne du désir et de l'aversion, c' est admettre que l'on est un ignorant, un non-arya.

Mais si on s'arrête là et que l'on fait rien pour se sortir de tout ça ( => la cessation de Dukkha), alors on ne pratique pas ce que le Bienheureux nous a enseigné.

FleurDeLotus
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