Le moine nu

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yudo
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ted a écrit : Malveillance, calomnie, jalousie, rancoeur, ou bien souvent simple malentendu, on trouve de tout, et les naïfs ne sont pas forcément du côté que l'on croit.

Une chose est sure : quand on apprécie vraiment quelqu'un et qu'on le respecte, on ne va pas dire haut et fort sur le web que c'était un menteur et un tricheur. Surtout quand ce quelqu'un est décédé et qu'il n'est plus là pour se défendre.
Ted, je sais que c'est moi que tu vises ici. Mais si (et seulement "si") MT a vraiment affirmé avoir reçu la transmission de SK, alors il mentait. IL y a sans doute la possibilité (extrêmement vraisemblable) qu'il ait dit un truc plus proche de la vérité et qu'il ait été mésinterprété.

Mais lorsque j'ai écrit ce que tu dénonces, je répondais à quelqu'un qui se montrait particulièrement virulent sur les défauts qui venaient d'être révélés, les "secrets de famille de l'AZI". Cette personne était partie en croisade personnelle contre l'AZI (et dans des termes et avec des moyens qui n'ont rien à voir avec ce que j'ai pur dire ou dénoncer ici), et faisait assez peur au "Comité" pour que celui-ci l'invite à la Gendronnière pour discuter. C'est cette personne qui traitait violemment MT de "menteur", de "fasciste" etc.

C'était dans ce contexte que j'avais écrit ce texte, en cherchant à dire, en gros: "d'accord, mais même s'il était toutes ces choses, il faut lui en être reconnaissant".
Voyant à quel point mon intervention a été mal comprise et mal reçue, je l'ai rapidement retirée de la circulation. Trop tard cependant pour qu'elle ne soit pas reprise sur des sites sur lesquels je n'ai aucun pouvoir.

Le contexte est toujours important.
La responsabilité des élèves est d'empêcher le maître de se "prendre pour un maître".
ted

Ok Je comprends mieux.
Tu sais, j'ai suivi de loin les bras de fer de JCP et de l'AZI, en consultant les listes sur le web, par les forums, les témoignages, les déclarations par ci par là.

Vous êtes une génération que je respecte. Vous avez vu le Zen s'installer en France. Vous avez participé à sa construction. Vous avez croisé des maîtres aujourd'hui disparus. Je ne pense pas que tu calomnies maître Deshimaru, mais je suis persuadé qu'il y a eu un malentendu entre ta vision de ce qu'était le Zen, la transmission, et sa vision à lui.

Tu vois, c'est comme si, de nos jours, quelqu'un s'attaquait à Ajahn Brahm, qui a été excommunié pour avoir ordonné des nonnes, et l'accusait d'être un imposteur. On a très bien compris qu'il y a eu réglement de comptes parce qu'il a osé faire évoluer le statut des femmes dans un milieu conservateur.

Mais si on n'a pas ces éléments, on risque de le prendre pour un charlatan, un moine défroqué qui ose encore s'exprimer, alors qu'il s'agit de la naissance d'une nouvelle école, d'un nouveau courant. Brahms continue ses ordinations.

L'erreur a été de retourner au Japon pour s'inféoder de nouveau à un système dont maître Deshimaru s'était libéré. Il me semble que maintenant, pour être moine Zen en France, il faut aller payer une cotisation au Japon. C'est un peu dommage quand même.

Et puis, peut-on vraiment certifier les transmissions depuis Bodhidharma ? Voire depuis le Bouddha ? :oops:
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yudo
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ted a écrit : L'erreur a été de retourner au Japon pour s'inféoder de nouveau à un système dont maître Deshimaru s'était libéré. Il me semble que maintenant, pour être moine Zen en France, il faut aller payer une cotisation au Japon. C'est un peu dommage quand même.
C'est le grand tort de l'AZI. Maître Nishijima, lorsqu'il m'a donné la transmission, m'a demandé si je voulais être affilié à la Sotoshu. Je lui ai répondu non. Des années plus tard, je lui ai demandé si je n'aurais pas mieux fait de m'y affilier, gage de meilleure reconnaissance officielle. Sa réponse a été particulièrement dure et cassante, à l'effet qu'il n'y a rien à attendre de la Sotoshu, guilde d'entrepreneurs de pompes funèbres.

Je me suis en effet rendu compte que même les maîtres bénéficiant d'une transmission sincère et affiliés à la Sotoshu, continuaient à être boycottés par l'AZI (voir Kishigami, dernier disciple reconnu de Sawaki, à qui l'AZI a interdit de prendre la parole à la Gendronnière). Donc, trahissant Mokudo Taisen plus sûrement que mille poignards dans le dos, l'AZI a fait précisément ce qu'il leur avait interdit.

Et puis, peut-on vraiment certifier les transmissions depuis Bodhidharma ? Voire depuis le Bouddha ? :oops:
Non. Il est, par exemple, pratiquement certain que la lignée des maître indiens est artificielle, et que même la lignée des maîtres chinois connaît plusieurs "trous".
Le savoir est important, pour éviter de donner trop d'importance à la lignée des ancêtres. Cela dit, ces ancêtres existent, c'est juste qu'on n'est pas sûr de leurs vrais noms.
La responsabilité des élèves est d'empêcher le maître de se "prendre pour un maître".
Jean

Lointain rapport avec ce qui est discuté précédemment, mais un chouïa quand même

"La gloire du maître rejaillit sur l'esclave". La version adaptée serait "Plus mon maitre est grand, plus je suis un grand disciple", "C'est moi que v'la, attention les yeux"

le sens contraire fonctionne aussi :

"Quoi! mon maître est un imbécile, mais alors moi aussi je suis un imbécile". Enfer et damnation. Rien ne va plus.

Finalement ce ne sont que des histoires d'ego. Quelqu'un qui se pare de la gloire de son maître ou qui réagit par la souffrance à une critique sur son maître est en fait complétement prisonnier de son ego.

Si le disciple était dans un état de pleine conscience, de présence, de non-ego ou de je ne sais quoi d'équivalent, il s'en ficherait complétement.

Ou bien, le maître a enseigné la recette de la tarte aux pommes, le disciple a suivi la recette et s'est fait une délicieuse tarte aux pommes. Il y a une personne qui arrive et qui dit que cette recette ne vaut rien. Qu'est ce que cela peut faire au disciple qui s'est régalé de la tarte aux pommes?

Peut être la personne qui critique a plutôt besoin d'un maître qui lui enseigne la recette de la pizza aux anchois?

Dans un cas comme dans l'autre louer la grandeur du maître est inutile, on peut le faire, mais c'est accessoire. Ce qui est important c'est manger la tarte aux pommes ou la pizza aux anchois.
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Dharmadhatu
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jap_8 Jean rappelle quelque chose d'important: demander à ceux qui goûtent la pizza !

Ca me fait penser à ces journalistes beaucoup plus malins que la plupart des gens bien pensants qui débattent sur l'homoparentalité: ils sont allés voir les enfants eux-mêmes pour leur demander de s'exprimer eux-mêmes.

Nous devrions faire de même pour ce qui est de la relation au Maître: demander à des pratiquants divers et variés qu'ils expriment leur expérience au lieu de demander à des gens bien pensants et sans doute de bonne foi ce qu'ils en voient de l'extérieur.

Non seulement il existe une tradition millénaire sur cette relation dans le Bouddhisme (voyons par exemple le Gurupanchashika d'Ashvagosha), mais si en plus des pratiquants considèrent que ça les aide (et j'en fais partie), alors grand bien leur fasse et laissons-les tranquilles avec leur pizza.

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apratītya samutpanno dharmaḥ kaścin na vidyate /
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cgigi2
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yudo a écrit:Tenir un maître pour un être surhumain est, de notre part, une lâcheté.
gigi dit:
Lâcheté peut-être, je pencherais plutôt pour ignorance,

Pour ce qui est des maîtres, ce qui les empêche d'approfondir leurs pratiques c'est possiblement l'attachement à leur propre image de maître, je me dis que si un maître arrive à se détacher de sa propre image figée dans le costume et autres accoutrements, pour ne pas dire déguisement, sans compter l'attachement aux rituels de toutes sortes et se fondre dans la foule des êtres ordinaires en vivant simplement comme un être ordinaire, là il pourrait à mon avis non se prétendre maître, mais bien l'Être enfin , un Maître de lui-même :D
avec metta
gigi
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jules
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jap_8

Je dirais que le terme de lâcheté aussi peut être considéré comme valable.
En effet, il me semble qu'un être surhumain, dans l'imaginaire, c'est un être qui ne subit plus les contraintes du monde. Il peut aller dans le feu sans se brûler, dans les océans en furie sans se noyer etc... Un disciple voulant lui-même devenir un être surhumain comme son maître qu'il idéalise, c'est quelqu'un qui espère un jour ne plus avoir à faire face à la difficulté. Hors c'est devant la difficulté précisément qu'on peut jauger sa propre pratique et sa maîtrise. Etre maître n'a de sens que face à une situation qui exige de la maîtrise à mon avis. Vouloir s'exhonérer de toute forme de difficulté est une forme de lâcheté.

<<metta>>
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jules a écrit :Vouloir s'exhonérer de toute forme de difficulté est une forme de lâcheté.
C'est un peu ce que je me disais, l'autre jour, ayant surfé sur le web entre les différents bouddhas et bodhisattvas et me trouvant nez à pif avec Amida et son paradis où il serait tellement bon de renaître, tellement favorable à l'Eveil, parce qu'on y est dégagé de toutes contraintes matérielles.
J'étais pas convaincue, quoi...

Bouddha, lui-même, aurait-il trouvé seulement le début du premier pas de son cheminement s'il n'avait pas rencontré sur son chemin la pauvreté, la maladie et la mort ?


Ceci étant dit, l'etre humain a un besoin compulsif, maladif, maniaque, de se créer des images psychologico-mythologiques d'êtres tout-puissants. Qu'en dirait Freud ?
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jules
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Sourire :
Ceci étant dit, l'etre humain a un besoin compulsif, maladif, maniaque, de se créer des images psychologico-mythologiques d'êtres tout-puissants. Qu'en dirait Freud ?
Je ne sais pas ce que dirait Freud, mais j'ajouterais en réponse à ton observation, qu'on pourrait dire peut-être qu'en réalité, en dehors de l'acte maîtrisé, il n'y a pas de maître. Ainsi, il est probable que le disciple devra apprendre à dépasser cette image "maladive" qu'il se fait de son maître, cela afin que le véritable Maître lui apparaisse et qu'il puisse s'en faire à son tour le vecteur d'une manière impersonnelle, c'est à dire, dans la non appartenance de l'acte de maîtrise à un égo, d'ailleurs, acte de maîtrise qui pourra être considéré comme tel pour la raison même qu'il n'appartient pas à un égo. Enfin, c'est une théorie hein :)



<<metta>>
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Dharmadhatu
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:idea: Juste un rappel pour éviter les amalgames: les pratiquants du Guru Yoga ne considèrent pas leur Maître comme un être surhumain, mais comme un Bouddha, donc comme un être humain parfait, avec les qualités et les facultés spirituelles que ça implique.

FleurDeLotus
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