Le singe, le piège et le chasseur

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tirru...
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En ce sens, « Je » suis un singe pris au piège qui apprend à lâcher la friandise ! :oops: :)
Il existe une parabole célèbre au sujet d'un piège à singe du genre de ceux qu'on utilise en Asie - une cage en bois comportant une petite ouverture. À l'intérieur se trouve une friandise. Attiré par la friandise, le singe introduit sa patte dans l'ouverture et s'en empare. Lorsqu'il veut retirer la patte, il n'arrive plus à la faire passer à travers l'ouverture étroite car elle est refermée sur la friandise. Il est pris au piège, jusqu'à ce que le chasseur arrive et le capture. Il ne se rend pas compte que la seule chose à faire pour être libre serait de lâcher sa friandise.
C'est ainsi que nous vivons. Nous sommes pris au piège parce que nous voulons une vie douce et agréable. Incapables de lâcher prise, nous sommes piégés dans le cycle sans fin du bonheur et du malheur, de l'espoir et du désespoir.

Ayya Khema
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davi
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Cette parabole est très parlante. merci tirru
S'indigner, s'irriter, perdre patience, se mettre en colère, oui, dans certains cas ce serait mérité. Mais ce qui serait encore plus mérité, ce serait d'entrer en compassion.
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tirru...
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Je t’en prie Davi jap_8 Merci Ayya Khema. Je trouve la représentation du singe assez forte et proche de la réalité du mental incontrôlable qui saute d’une distraction à une autre mais aussi du fait que l’ego boursouflé qui aime se voir comme superman.women ! Le désir et l’attachement sont représentés par la friandise et le fait de ne pas lâcher-prise. Le chasseur n’est autre que le samsara, que nous nourrissons par notre désir de friandise et notre illusion. Je crois que l’image la plus forte c’est justement celle de l’illusion et de l’ignorance qui empêche de voir ce processus aliénant.
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davi
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Oui, on retrouve aussi la représentation du petit singe dans le bouddhisme tibétain, notamment pour décrire le sentier de samatha (atteinte de la parfaite quiétude d'esprit):
À côté de cette force lourde d'inertie qu'est l'esprit-éléphant, il y a quelque chose de beaucoup plus volatile et inconstant qui est notre attention, ici représentée sous les traits d'un singe espiègle. Comme le dit le Bouddha : « Tout comme un singe dans une forêt se jette de branche en branche, saisit une branche et puis la laisse, de même ce qui est appelé la « pensée », le « mental » ou la « conscience » change sans cesse, nuit et jour. Ce qui est appelé la « pensée », le « mental » ou la « conscience »se produit comme une chose et se disperse comme une autre chose2 ». Une autre image traditionnelle montre l'attention comme un petit singe enfermé dans une maison avec six fenêtres et qui sauterait constamment de l'une à l'autre. Ces six fenêtres étant les six facultés sensorielles : vision, audition, odorat, goût, toucher et mental (le mental est considéré comme une faculté sensorielle qui perçoit les idées, les concepts, les souvenirs, les créations de l'imagination, les désirs, les émotions, etc...).

Le problème de ce petit singe, c'est qu'il est constamment distrait par les phénomènes qu'il perçoit dans le monde et par ses propres pensées. Il ne tient pas en place, il n'est dès lors pas en mesure de s'apaiser et d'apaiser l'éléphant-esprit ; il n'est pas non plus capable de se concentrer afin d'apporter des solutions pour les problèmes de l'éléphant-esprit.

La méditation doit donc dès lors agir sur deux tableaux : ramener d'une part l'attention à l'instant présent sans crispation, garder l'agilité du singe, mais éviter qu'il se disperse dans toutes les directions et qu'il soit obnubilé par la moindre agitation. D'autre part, purifier l'éléphant-esprit de sa négativité, de son ignorance et de ses pensées noires et arriver à le monter pour qu'il aille dans la direction souhaitée.
sentier de samatha.jpg
http://lerefletdelalune.blogspot.com/20 ... ation.html

tirru... a écrit :
02 mars 2019, 11:57
Je crois que l’image la plus forte c’est justement celle de l’illusion et de l’ignorance qui empêche de voir ce processus aliénant.
D'où l'intérêt de méditer sur l'enseignement sur les douze liens de la co-production conditionnée: http://bica-vipassana.blogspot.com/2007 ... ionne.html). La fin de l'ignorance (ne plus voir ce qui n'est pas; voir ce qui est), c'est la fin de l'aliénation mentale.
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axiste
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Merci, beau développement sur la parabole, le lien bica-vipassana sur la production conditionnée est éclairant.
Un peu d’humilité apaise le mental qui agite souvent des vieux airs fredonnés.
love3
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axiste
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J’ai recherché le sens de hoti en pali...être, exister.

Je note une définition intéressante de l’ignorance dans ce lien:
L’ignorance.

Le premier nidana est l’avidya (en pali : avijja), ou l’ignorance. Ce nidana est d’une certaine façon le plus important de tous les nidanas. L’avidya n’est pas tant l’ignorance dans le sens intellectuel que le manque ou la privation de la prise de conscience spirituelle, voire de la conscience spirituelle et de l’être spirituel. L’avidya, dans ce sens, est l’antithèse directe de la Bodhi, de l’Éveil. La Bodhi est le but de tout le processus de l’évolution, et particulièrement tout le processus de l’évolution supérieure. De la même façon, l’avidya représente tout ce qui s’étend derrière nous, ou en dessous de nous, dans ce processus d’évolution. Si l’Éveil représente le but, alors l’ignorance représente les profondeurs d’où nous venons. Si l’Éveil représente le sommet de la montagne, alors l’ignorance représente les vallées dont nous émergeons progressivement, et qui dorment, plongées dans l’obscurité.

Plus spécifiquement, l’avidya est faite de diverses vues fausses. Un certain nombre d’entre-elles sont spécifiées dans les textes canoniques. Il y a par exemple la vue fausse qui consiste à voir le conditionné en tant qu’Inconditionné — penser que toute chose phénoménale peut durer pour toujours. Ce n’est bien sûr pas une conviction intellectuelle, mais une supposition inconsciente : nous nous comportons comme si certaines choses allaient durer pour toujours ; nous nous y attachons donc, et sommes malheureux quand, finalement, nous devons y renoncer.
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Floch
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axiste a écrit :
02 mars 2019, 23:32
Plus spécifiquement, l’avidya est faite de diverses vues fausses. Un certain nombre d’entre-elles sont spécifiées dans les textes canoniques. Il y a par exemple la vue fausse qui consiste à voir le conditionné en tant qu’Inconditionné — penser que toute chose phénoménale peut durer pour toujours. Ce n’est bien sûr pas une conviction intellectuelle, mais une supposition inconsciente : nous nous comportons comme si certaines choses allaient durer pour toujours ; nous nous y attachons donc, et sommes malheureux quand, finalement, nous devons y renoncer.
Oui c'est une chose de savoir que les choses sont impermanentes et ça en est une autre de ne pas souffrir de cette impermanence et de se comporter en fonction de cette compréhension intellectuelle .
Nous nous attachons à l'image qu'on veut donner de nous, aux autres, à nos souvenirs, à nos croyances, à nos biens matériels. On croit que ça nous rassure, mais ça nous rend dépendant et au final, ça nous emprisonne.

Il y a un très long travail à faire en soi pour se dégager de ces attachements, à tenter de lâcher prise chaque fois qu'on en démasque un, et il y en a un certain nombre qui reste encore inconscient.
Espérons que notre volonté et notre vigilance nous permette de parcourir au mieux ce chemin.
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tirru...
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Bonjour Davi,
davi a écrit :
02 mars 2019, 12:27
Oui, on retrouve aussi la représentation du petit singe dans le bouddhisme tibétain, notamment pour décrire le sentier de samatha (atteinte de la parfaite quiétude d'esprit):
Merci beaucoup pour ce rappel sur le sentier de Shamatha et le lien qui l'accompagne qui est riche d'enseignements et converge sur ce qu'on apprend dans le bouddhisme ancien. Au passage, je mets en lien un ancien post dédié au même sujet.

jap_8 white lotus
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axiste
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Espérons que notre volonté et notre vigilance nous permette de parcourir au mieux ce chemin.
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Maxime121
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Pauvres singes... lol
Intéressant le sentier de samatha

merci pour le partage :)
- On est tous sur Terre ,
mais pas dans la même Atmosphère !
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