La vérité ne relève pas de la mémoire...

ted

Bon.
Supposons qu'on pratique suivant une vue dites "grossière" (du point de vue des prasangikas).
Et qu'on réalise un non-soi dit "grossier", toujours de ce point de vue. On est censé être à quelle terre pour les prasangikas ?

Est-ce que la réalisation d'un non-soi grossier signifie qu'il y a encore des traces d'attachement "subtiles" ?

Est-ce que la réalisation d'un non-soi dit "grossier" n'est pas finalement un objectif plus raisonnable à atteindre pour un pratiquant moyen, que la réalisation d'un non-soi dit "subtil" qui lui est censé nous mener à la bouddhéïté ?
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Dharmadhatu
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Supposons qu'on pratique suivant une vue dites "grossière" (du point de vue des prasangikas).
Et qu'on réalise un non-soi dit "grossier", toujours de ce point de vue. On est censé être à quelle terre pour les prasangikas ?
:D Pour les prasangikas, on atteint les terres de Bodhisattva uniquement si on a une perception yogique du non-soi subtil.
Est-ce que la réalisation d'un non-soi grossier signifie qu'il y a encore des traces d'attachement "subtiles" ?
Toujours pour les prasangikas, oui.
Est-ce que la réalisation d'un non-soi dit "grossier" n'est pas finalement un objectif plus raisonnable à atteindre pour un pratiquant moyen, que la réalisation d'un non-soi dit "subtil" qui lui est censé nous mener à la bouddhéïté ?
Encore dans le contexte prasangika, on n'atteint ni le nirvana ni la Bouddhéité si on ne réalise pas le non-soi subtil.

Mais Sa Sainteté le Dalaï Lama évoque la possibilité pour certains pratiquants de l'Anuttara-yoga Tantra ayant la vue Chittamatra d'accéder finalement à la vue correcte prasangika; il cite le 3ème Panchen Lama dans The Gelug/Kagyü Tradition of Mahamudra. Il leur faut pour cela arriver à pratiquer l'étape dite "isolement de l'esprit", c'est à dire reconnaître la nature la plus subtile de l'esprit, celle qui se manifeste ordinairement au moment de la mort.

Amitié FleurDeLotus
apratītya samutpanno dharmaḥ kaścin na vidyate /
yasmāt tasmād aśūnyo hi dharmaḥ kaścin na vidyate

Puisqu'il n'est rien qui ne soit dépendant,
Il n'est rien qui ne soit vide.

Ārya Nāgārjuna (Madhyamakaśhāstra; XXIV, 19).
Aldous

Bonjour,

voici le point de vue de deux théravadins français et érudits purs et durs si j'ose dire à propos de renaissance et karma:

http://www.buddhaline.net/La-renaissanc ... bouddhisme

http://www.bouddhismes.net/node/272

cordialement,
antodume

C'est bien sûr faux puisque pour un chittamatrin, le non-soi d'un sautrantika est un non-soi grossier; pour un madhyamika, le non-soi phénoménal d'un chittamatrin est un non-soi grossier, pour un prasangika, le non-soi personnel et le non-soi phénoménal d'un svatantrika sont des non-soi grossiers. Mais il faut avoir étudié les Siddhantas pour le savoir et je répète que les vues bouddhistes ne s'arrêtent pas à ce qu'Antodume accepte ou non.
Il ne s'agit là que de spéculations. Le fait de dire qu'une spéculation existe ne fait pas exister pour autant l'objet de la spéculation.
Ca peut être le cas si on parle de la nature de Bouddha des phénomènes comme étant leur vacuité, leur nirvana naturel, mais si on parle de la nature de Bouddha telle qu'exposée dans les Sutras du 3ème tour de Roue, il s'agit d'un type de conscience, que tous les phénomènes ne possèdent pas forcément. Maitreya le rappelle dans son Abhisamayalamkara et Nagarjuna dans son Dharmadhatustavam.
Idem ci-dessus. Il n'y a pas, d'un côté, le nirvana des phénomènes et, de l'autre, le nirvana de type conscience. Le nirvana n'est pas une conscience, ainsi qu'on te l'a déjà expliqué. Mais c'est parce que vous (je parle des adeptes de ton école) avez inventé des chimères que vous vous égarez.
Si les deux non-soi étaient parfaitement identiques, alors la personne serait ses agrégats. Si les deux non-soi étaient différents alors on pourrait absurdement trouver une action sans agent. ;-) Le non-soi d'une sensation et le non-soi d'Antodume sont d'une même saveur, celle de la vacuité, mais les bases dont elle est la nature sont différentes.
Je n'ai pas dit identiques mais équivalents. La Vacuité n'est pas à séparer en deux parties, l'une du soi et l'autre des phénomènes. Les phénomènes sont l'expression de la Vacuité, localement (c'est à dire dans leur expression karmique). Preuve que vous inventez des choses qui n'existent pas et, à l'intérieur de ces inventions, vous créez une rhétorique qui n'appartient qu'à vous.
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Dharmadhatu
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Il ne s'agit là que de spéculations. Le fait de dire qu'une spéculation existe ne fait pas exister pour autant l'objet de la spéculation.
:D Le fait de dire sans autre justification que seul ce que pense le Zen ou ce qu'Antodume en a compris est vrai n'est qu'une spéculation dogmatique et le fait de dire qu'une spéculation existe ne fait pas exister pour autant l'objet de la spéculation.
Idem ci-dessus. Il n'y a pas, d'un côté, le nirvana des phénomènes et, de l'autre, le nirvana de type conscience. Le nirvana n'est pas une conscience, ainsi qu'on te l'a déjà expliqué. Mais c'est parce que vous (je parle des adeptes de ton école) avez inventé des chimères que vous vous égarez.
Idem ci-dessus. Il y a, d'un côté, le nirvana des phénomènes et, de l'autre, le nirvana de type conscience. Le nirvana est une cessation éprouvée par une conscience, ainsi qu'on te l'a déjà expliqué. Mais c'est parce que vous (je parle des adeptes de ton école) avez inventé des chimères que vous vous égarez.
La Vacuité n'est pas à séparer en deux parties, l'une du soi et l'autre des phénomènes.
Il y a LA vacuité quand on parle de la vacuité de l'ensemble des existant, mais sinon les écritures (pour ceux à qui elles n'échappent pas bien sûr) évoquent 4, 16 ou 18 types de vacuités générales. On peut aller jusqu'à parler d'une infinité de vacuité pour une infinité d'existants; mais toutes sont d'une unique saveur; comme les multiples gouttes d'eau de mer ont la même saveur de sel.
Les phénomènes sont l'expression de la Vacuité, localement (c'est à dire dans leur expression karmique).
Tout phénomène n'est pas karmique, la vacuité n'a pas de karma et pourtant elle est un phénomène, un existant; la causalité n'est pas forcément karmique; etc. Tout ramener au karma est pervertir une fois de plus le message du Bouddha: preuve que vous inventez des choses qui n'existent pas et, à l'intérieur de ces inventions, vous créez une rhétorique qui n'appartient qu'à vous. Si veux refaire le débat ou en faire un autre, il te faudra proposer autre chose que des affirmations gratuites.

Merci mon ami. FleurDeLotus
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Florent

Aldous a écrit :Bonjour,

voici le point de vue de deux théravadins français et érudits purs et durs si j'ose dire à propos de renaissance et karma:

http://www.buddhaline.net/La-renaissanc ... bouddhisme

http://www.bouddhismes.net/node/272

cordialement,
thank's pour les articles c'est très intéressant.

Pour revenir au débat, je ne sais pas qui a raison, moi ce que je vois c'est que c'est pas ça l'important, l'important dans le Dharma c'est de mettre fin a dukkha et si une vue ou une autre met fin a dukkha et amène à Nibbana alors c'est très bien, au final c'est ce qui compte non?
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Dharmadhatu
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Florent a écrit :Pour revenir au débat, je ne sais pas qui a raison, moi ce que je vois c'est que c'est pas ça l'important, l'important dans le Dharma c'est de mettre fin a dukkha et si une vue ou une autre met fin a dukkha et amène à Nibbana alors c'est très bien, au final c'est ce qui compte non?
:D La seule vue menant à la cessation de l'ignorance et de ses effets est celle qui contrecarre toute trace d'adhésion à une quelconque conception essentialiste.

Bonne journée à tous. FleurDeLotus
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Aldous

Dharmadhatu a écrit :
Idem ci-dessus. Il n'y a pas, d'un côté, le nirvana des phénomènes et, de l'autre, le nirvana de type conscience. Le nirvana n'est pas une conscience, ainsi qu'on te l'a déjà expliqué. Mais c'est parce que vous (je parle des adeptes de ton école) avez inventé des chimères que vous vous égarez.
Idem ci-dessus. Il y a, d'un côté, le nirvana des phénomènes et, de l'autre, le nirvana de type conscience. Le nirvana est une cessation éprouvée par une conscience, ainsi qu'on te l'a déjà expliqué. Mais c'est parce que vous (je parle des adeptes de ton école) avez inventé des chimères que vous vous égarez.
Mais Dharmadhathu, la conscience est un phénomène, donc comment pourrait-il y avoir séparation? Quand la conscience éprouve le nirvana c'est un phénomène (la conscience) qui éprouve le nirvana (qui est de réaliser le non-soi de tous les phénomènes: vacuité ultime de tous les phénomènes physiques et mentaux dans le Mahayana).
Dharmadhatu a écrit :
La Vacuité n'est pas à séparer en deux parties, l'une du soi et l'autre des phénomènes.
Il y a LA vacuité quand on parle de la vacuité de l'ensemble des existant, mais sinon les écritures (pour ceux à qui elles n'échappent pas bien sûr) évoquent 4, 16 ou 18 types de vacuités générales. On peut aller jusqu'à parler d'une infinité de vacuité pour une infinité d'existants; mais toutes sont d'une unique saveur; comme les multiples gouttes d'eau de mer ont la même saveur de sel.
Ce n'est quand même pas LES écritures dans le sens où elles font référence à tout le bouddhisme (ou même au Mahayana).
Dernière modification par Aldous le 27 mars 2012, 10:07, modifié 2 fois.
Florent

Dharmadhatu a écrit :
Florent a écrit :Pour revenir au débat, je ne sais pas qui a raison, moi ce que je vois c'est que c'est pas ça l'important, l'important dans le Dharma c'est de mettre fin a dukkha et si une vue ou une autre met fin a dukkha et amène à Nibbana alors c'est très bien, au final c'est ce qui compte non?
:D La seule vue menant à la cessation de l'ignorance et de ses effets est celle qui contrecarre toute trace d'adhésion à une quelconque conception essentialiste.

Bonne journée à tous. FleurDeLotus
Je ne sais pas ce qu'est une conception essentialiste :D
chakyam

Re: La vérité ne relève pas de la mémoire...
de Dharmadhatu » 26 Mar 2012, 22:01
Chakyam a écrit:Personne car il n'y a personne. Pas de conscience car chacune d'elle se dissout à la disparition des agrégats. Pas de karma à hériter car qui pourrait hériter de quoi que ce soit puisque même les objets constituant l"héritage sont soumis à la vacuité constitutive et s'annihilent pas plutôt entrevus.
Chakyam a écrit:1 - Je n'ai jamais formulé une quelconque critique sur ce continuum de conscience dont Rahula sait pertinemment qu'il n'a qu'une existence fantasmatique; d'ailleurs, il n'en parle même

Dans l'intérêt du lecteur éventuel, juste pour précision, Rahula n'en parle pas dans l'extrait du post initial, mais il en parle dans L'Enseignement du Bouddha, son livre phare:

Mais ce qui est difficile à concevoir, c'est que, suivant la théorie karmique, les effets d'une action basée sur une volition puissent continuer à se manifester même dans une vie posthume.(...)
Nous savons qu'un être n'est qu'une combinaison de forces ou d'énergies physiques et mentales. Ce que nous appelons mort, c'est l'arrêt complet du fonctionnement de l'organisme physique. Ces forces, ces énergies prennent-elles fin absolument avec la cessation du fonctionnement de l'organisme ? Le bouddhisme dit: non. (...)
Lorsque ce corps physique n'est plus capable de fonctionner, les énergies ne meurent pas avec lui, mais elles continuent à s'exercer en prenant une autre forme, que nous appelons une autre vie.(...)
De même un homme qui meurt ici et renaît ailleurs n'est ni la même personne ni une autre (na ca so na ca añño). C'est une continuité de la même série. (...)
... le dernier instant de la pensée en cette vie conditionnera le premier dans ce qu'on appellera une vie suivante, qui n'est en fait que la continuation de la même série
.

_-_-_-_-_-_-_-_-_-_-_-_-

Dans le précédent débat sur la Renaissance, j'avais souhaité que cesse les multiples citations de textes qui soutiennent l'opinion de qui les sollicitent et qui ne convainquent personne et surtout pas l'interlocuteur qui lui également va citer d'autres textes. Je préfère essayer, à partir de ma propre expérience, de dire la vraisemblance, pour moi, de la thèse présentée et non d'aller chercher chez un Prasangika ou un Svatantrika un texte supposé contredire le premier présenté, d'autant que l'on risque d'avoir des surprises.

Exemple : Aldous le 27/03 à 7h47 propose la lecture de « la Renaissance selon le bouddhisme ancien » dans lequel je lis : Un pratiquant bouddhiste sincère ne cherche pas vraiment à savoir ce qui se passe après la mort et ne spécule pas sur les différentes hypothèses fournies par les traditions religieuses ou matérialistes en termes d’éternalisme ou d’annihilationisme ; il est plutôt inviter à examiner la question « Y-a-t-il une vie avant la mort ? » et à vivre dans la culture de la vigilance et des actions conduisant à l’harmonie intérieure et extérieur - Tiens ! on dirait du zen -
« Pour l’individu libéré, ce qui est ancien est achevé. Il n’y a plus de production à nouveau. Sa pensée est détachée vis-à-vis des existences nouvelles. De tels sages qui ont ainsi détruit les germes de l’existence future, dépourvus de désirs de redevenir, s’éteignent comme une lampe s’éteint. » (Sutta Nipâta)[/color]

Quant au texte proposé par Dharmadhatu pour contredire le mien, j'attire l'attention des lecteurs futurs sur le concept suivant : continuation de la même série

C'est une postulation idéologique que rien ne vient corroborer. L'affirmer ne la rend pas plus réelle pour autant et n'est que spéculation. On prend souvent l'exemple de la flamme d'une bougie avec laquelle on allume une autre bougie pour dire : continuité. FAUX. C'est une autre flamme, une autre bougie et le passage en réalité résulte d'une coupure de type « quanta » qui au niveau sud-atomique exprime la discontinuité même si au niveau macrocosmique une continuité apparaît.

Pour alimenter la discussion en me plaçant sur un terrain qui n'est pas le mien (celui des citations), je rappelle une autre citation : Toutes questions sur la renaissance et ses modalités sont fortement découragées dans le bouddhisme originel. Les réponses que l’on peut construire, à défaut d’être issues de la vision profonde engendrée par l’Éveil, constituent des obstacles sur la voie de la libération de l’insatisfaction et de la souffrance - c'est moi qui souligne -

J'ai lu dans ces colonnes qu'il s'agissait d'un lieu d'échanges. Pour moi, échanges veut dire échange d'expérience et non de connaissances livresques absolument intéressantes mais qui jamais, à elles seules, ne permettront la vision satorique. Je continue donc à demander aux laudateurs du continuum de conscience, aux champions de la Renaissance, le récit de leur expérience transmigratoire ou transmigratrice et non la citation de tel ou tel Panchen Lama ou les affirmations des Prasangika qui ne seront utiles et nécessaires à personne, pas même à eux.

FleurDeLotus Butterfly_tenryu
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